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New York, le centre du monde le temps d'une semaine

Cette semaine, c'était à New York que ça se passait. Un peu comme lors de la saison des bals à Vienne ou du Mondial de l'Automobile à Paris, chaque année à la même époque tous les yeux se tournent vers Manhattan, qui devient le théâtre d'un intense ballet diplomatique.
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AP

Cette semaine, c'était à New York que ça se passait. Un peu comme lors de la saison des bals à Vienne ou du Mondial de l'Automobile à Paris, chaque année à la même époque tous les yeux se tournent vers Manhattan, qui devient le théâtre d'un intense ballet diplomatique.

À l'occasion de l'Assemblée Générale des Nations Unies, chefs d'Etat et de gouvernement des quatre coins de la planète se relaient à la tribune de marbre vert pour faire de grands discours et tenter de capter l'attention du monde entier - de François Hollande et David Cameron à Hamid Karzai et Yoshihiko Noda.

Un des discours les plus attendus de la saison était, comme de coutume, celui du président des Etats-Unis. Sur fond de tensions croissantes à travers le Moyen Orient, Barack Obama a rendu hommage à l'Ambassadeur Chris Stevens, mort dans l'attaque du consulat américain à Benghazi. Il a condamné l'intolérance où qu'elle soit, tout comme la violence -et notamment celle suscitée par la fameuse vidéo qui circulait sur Internet. Surtout, il a fait un véritable plaidoyer en faveur de l'un des principes fondateurs de la démocratie américaine: la liberté de parole. Obama n'a pas non plus épargné le régime iranien, en déclarant d'un ton plus que ferme que "les Etats-Unis feront ce que nous devons pour empêcher l'Iran d'obtenir l'arme nucléaire." D'ailleurs, les diplomates américains ont boycotté le discours de Mahmoud Ahmadinejad à la même tribune le lendemain.

Son discours était d'autant plus attendu que nous sommes en pleine campagne électorale. A quelques semaines du scrutin, une telle allocution devient inévitablement politisée. Comme le souligne Fareed Zakaria, la symbolique de ce discours est presque aussi forte que son contenu. Barack Obama, en tant que chef d'Etat, se rend à la tribune et s'en acquitte de manière très présidentielle. Le moins que l'on puisse dire est que son rival, Mitt Romney, ne dispose pas de la même plateforme.

Voyant tout de même une opportunité médiatique de tirer sur son opposant et de capitaliser sur la tumulte au Moyen Orient - des tensions entre Israel et l'Iran à l'embrasement de la Libye et de la Syrie - Romney s'est donc empressé de réagir, accusant Obama de laisser les Etats-Unis "à la merci des événements plutôt que de façonner les événements au Moyen Orient".

Ce n'est pas tant le fond de ses déclarations qui surprend, mais le fait que le candidat républicain s'et enfin exprimé sur le plan international. Car, depuis le début de la campagne, il est curieusement silencieux sur le sujet pourtant central de la politique étrangère et a aligné de nombreux impairs.

Bien que n'ayant pas de rôle officiel dans le contexte de l'ONU, Mitt Romney n'a pas été absent des festivités new-yorkaises. En effet, l'activité diplomatique n'est pas cantonnée au périmètre de l'ONU: cette semaine, la ville entière accueille un mystérieux chassé-croisé de limousines aux vitres teintées et aux girophares tricolores transportant des personnalités à des réunions, petits déjeuners, déjeuners, cocktails, ou conférences. Un des hauts lieux est le Council on Foreign Relations où quelques centaines de happy few ont pu écouter l'Italien Mario Monti, le Tunisien Moncef Marzouki ou encore la Libérienne Ellen Johnson Sirleaf.

Mais l'événement à ne vraiment pas manquer est le grand forum de Bill Clinton, le Clinton Global Initiative, judicieusement programmé pour se dérouler en même temps que l'Assemblée Générale de l'ONU et profiter de la présence à New York des plus grands décideurs de la communauté internationale. Les VIP sont étincelants (au long des années, on a pu y entendre Bono, Richard Branson, la Reine Rania de Jordanie ou encore Tony Blair) et la chasse aux accréditations est redoutable. Obama et Romney s'y sont quasiment croisés, car tous deux y ont pris la parole le même jour, bien qu'évidemment pas en même temps, invités par Bill Clinton à s'exprimer sur des sujets dits "globaux". Barack Obama a parlé du combat contre la traite des êtres humains; et Romney a parlé du rôle de la libre entreprise et du secteur privé dans l'aide internationale.

Romney a donc choisi de rester fidèle à son thème de prédilection, et de donner une connotation économique à son propos. Ce qui frappe est combien il continue d'éviter les questions géopolitiques "dures", ce qui est fort inhabituel pour un candidat républicain. En effet, ce sont normalement les Démocrates qui évitent la politique étrangère pour se concentrer sur des questions internes et sociales. Le cas de Romney est frappant : bien qu'il tienne un discours ferme envers l'Iran, la Russie ou la Chine, il n'a pas prononcé le mot "guerre" dans son discours d'investiture à la convention républicaine le mois dernier. Et ceci alors même que l'Amérique est encore engagée en Afghanistan, la guerre la plus longue de son histoire.

Il est plausible que Romney évite délibérément ces questions sensibles car il fait face à un parti républicain très divisé. De plus, n'ayant pas d'alternative cohérente à offrir aux positions de l'administration Obama. Romney focalise ainsi le débat sur l'économie, ce qui est un choix compréhensible, d'autant plus qu'Obama est perçu comme vulnérable sur ce terrain.

C'est Obama qui a choisi de mettre l'international au centre de sa première campagne présidentielle. Quatre ans plus tard, son bilan, pour controversé qu'il soit, reste globalement positif aux yeux du public. Le magazine US News publiait le mois dernier une étude de plusieurs sondages, selon laquelle 48% des Américains font confiance à Obama contre 37% à Romney sur les questions internationales. 58% soutiennent Obama sur sa gestion de la menace terroriste et 48%, une relativement bonne note, sur sa politique étrangère en général. Même un sondage effectué par la chaine Fox en août note qu'alors que seulement 30% des électeurs estiment que la politique étrangère est un facteur "très important" dans leur vote, 51% disent faire confiance à Obama sur ces questions, contre 28% pour Romney.

Un sondage plus récent, publié par le magazine Businessweek, montre toutefois une préoccupation plus accrue de la part de l'électorat en ce qui concerne le reste du monde, et notamment le terrorisme, sujet sur lequel Obama perd quelques plumes (ce qui n'est pas anormal dans la foulée de l'attaque sur le consulat de Benghazi). Mais il montre surtout que ces nouvelles attaques de la part du camp Romney ne lui rapportent guère de points et que les Américains font davantage confiance à Barack Obama qu'à Mitt Romney pour gérer une crise au Moyen Orient.

Le vrai test de leurs différences viendra la semaine prochaine, lors de leur premier débat télévisé, leur premier vrai face à face. Bien que Barack Obama prenne de plus en plus d'avance dans les États-clés, rien n'est encore joué. C'est bien pour cela qu'une fois ses prestations new-yorkaises bouclées, il s'est empressé de rejoindre le heartland, reprenant sans perdre un instant le chemin de la campagne.

Mitt Romney

Obama vs. Romney

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