Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Sommes-nous un peuple?

Au Québec, le peuple est le grand absent de la vie politique. Tout se fait sans lui, par-dessus sa tête et depuis longtemps. Certes, il participe à tous les rituels de la démocratie dont ses élus se réclament aussi pour fonder leur autorité. Or, cette participation même fait disparaître et le peuple et l'autorité.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Au Québec, le peuple est le grand absent de la vie politique. Tout se fait sans lui, par-dessus sa tête et depuis longtemps. Certes, il participe à tous les rituels de la démocratie dont ses élus se réclament aussi pour fonder leur autorité. Or, cette participation même fait disparaître et le peuple et l'autorité.

Pourtant, ce peuple a déjà été présent dans l'histoire, pesant de tout son poids sur les institutions politiques coloniales, les faisant grincer, craquer, se tordre et au final les entravant, les immobilisant.

La répression brutale de la rébellion des patriotes en 1837 a désarmé la prise de conscience par le peuple de son pouvoir. La pensée républicaine, qui, ailleurs, bouleverse l'ordre établi, s'éteint ici pour un siècle.

Cette longue éclipse va favoriser toutes les corruptions, en premier lieu celle de la parole, puis celle du récit, des symboles et des institutions, creusant un écart grandissant entre nous et toutes les représentations de nous-mêmes, jusqu'à la rupture.

Érrants, désastrés, inconscients d'être dés lors aspirés dans l'orbite de l'Autre, nous cherchons désespérément dans son regard une confirmation de ce que nous sommes.

Peine perdue! Ce que nous sommes - cette liberté qui nous définit - n'a plus droit de cité. L'image que l'on nous renvoie et à laquelle nous devons nous conformer dorénavant est tronquée, amoindrie, tragiquement réduite.

Nous nous désâmons pourtant à nous y ajuster au nom d'un possible avenir: c'est le passage obligé, le goulot d'étranglement.

Épuisés, éreintés et meurtris, ce qui nous tient est cette promesse de parvenir, dans le renoncement admis de nous-mêmes, au triomphe de l'Autre.

Or, il faut que notre défaite soit permanente pour que le triomphe de l'Autre soit pérenne. L'Assemblée nationale sert de cadre exemplaire à cette défaite. C'est en levant le voile sur son impuissance programmée que l'on révèle son rôle crucial: l'Assemblée nationale est la clé de voûte d'un système fondé sur l'invalidation du peuple.

Cette démocratie est une véritable servitude. Cette servitude est notre condition de peuple et comme elle nous est intolérable, il nous faut donc la voiler.

Comme peuple, nous avons employé toute notre force politique à cette seule fin: nous cacher la réalité de notre servitude, l'oublier, et pour finir, nous abuser nous-mêmes sur cet oubli. Cette servitude est notre absence. Et cette absence est tabou.

Sébastien Ricard

Brigitte Haentjens

Pierre-Laval Pineault

Jean-Sébastien Pineault

Jean-Martin Johanns

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

On aime le Québec!

25 raisons pour lesquelles on aime le Québec

Retrouvez les articles du HuffPost sur notre page Facebook.
Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.