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Pourquoi nous avons besoin des femmes pour faire avancer la science

Les femmes explorent le monde naturel depuis l'Antiquité. Mais nombreux sont ceux qui seraient en peine de nommer une autre femme de science que Marie Curie. Et pour cause. Le plus souvent, ces chercheuses audacieuses n'ont eût d'autre choix que de progresser seules, animées par la curiosité et l'envie de comprendre le monde qui les entoure. Malgré leurs efforts, l'évidence demeure: les femmes se font trop rares dans la sphère scientifique.
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Les femmes explorent le monde naturel depuis l'Antiquité. Mais nombreux sont ceux qui seraient en peine de nommer une autre femme de science que Marie Curie. Et pour cause. Le plus souvent, ces chercheuses audacieuses n'ont eût d'autre choix que de progresser seules, animées par la curiosité et l'envie de comprendre le monde qui les entoure. Malgré leurs efforts, l'évidence demeure: les femmes se font trop rares dans la sphère scientifique.

J'ai très tôt nourri de l'intérêt pour les sciences. À l'âge de six ans, un été, j'ai terrorisé mes deux sœurs en disséquant des grenouilles sur le pas de notre porte. Lesquelles ont applaudi le jour où j'ai volé au secours de fleurs moribondes à l'aide de concoctions de mon invention. Mon père était médecin chercheur et les week-ends, je le suivais à la trace dans son laboratoire de biologie du squelette et auprès de ses patients de chirurgie orthopédique. J'aimais regarder les os de rat et de poulet plongés dans des béchers et soumis à des champs magnétiques, pendant que l'analyseur d'acides aminés noircissait de graphiques des rames de papier. Mes parents ont très vite encouragé ma curiosité naturelle, et la question de savoir si cette voie était vraiment faite pour moi ne s'est jamais posée.

Plus tard, au début de mes études, j'ai attrapé le virus de la recherche en travaillant dans le laboratoire de mon père. Je me suis vite découvert une propension à imaginer des expériences susceptibles d'éclairer ce qui peut conduire le système immunitaire à se dérégler et à s'en prendre à nos propres tissus. Cela m'a captivée d'emblée et j'ai décidé de devenir moi-même médecin spécialisé dans la recherche.

Ce passage de la simple curiosité juvénile à une véritable vocation professionnelle est souvent contrarié chez les femmes attirées par les sciences. Selon un rapport publié cette semaine par la Fondation L'Oréal, les femmes ont trois fois moins de chances que les hommes de devenir docteur en science, une disparité qui se confirme à la sortie du lycée, lorsque les bachelières choisissent leur orientation. Aujourd'hui encore, de nombreuses jeunes femmes croient aux idées reçues selon lesquelles elles ne sont pas faites pour les sciences. Pour combattre ces stéréotypes, nous devons leur donner en exemple des femmes qu'elles pourront prendre pour modèle.

À 31 ans, après des études scientifiques et de médecine, j'ai vécu l'une des périodes de ma vie les plus excitantes et les plus difficiles à la fois. Nommée à mon premier poste universitaire, je montais mon propre laboratoire d'immunologie, je soignais en même temps des patients et me spécialisais en rhumatologie. Pour couronner le tout, j'étais mère d'une fille en bas âge et d'un nourrisson, tandis que mon mari, interne en chirurgie, était constamment de garde.

Les conseils d'un mentor m'ont manqué à cette époque. Aucun professeur plus expérimenté n'était là pour veiller à mon épanouissement intellectuel, émotionnel ou financier. Je n'avais personne pour me dire que ce que je faisais était non seulement possible sur le plan personnel mais scientifiquement nécessaire.

L'un des défis les plus pressants du monde actuel est de dispenser les meilleurs soins possibles aux générations actuelles et futures. La population des pays développés a aujourd'hui une espérance de vie sans précédent et avec le vieillissement, augmente la survenue de pathologies chroniques telles que le cancer, les maladies cardiaques et les troubles neurodégénératifs. Les pays émergents ont pour leur part besoin de traitements plus efficaces contre les maladies infectieuses et d'une généralisation de l'accès aux soins médicaux de base.

Seule la recherche peut permettre de mettre au point de nouvelles thérapies et une meilleure prise en charge médicale. Et les femmes doivent faire partie de la prochaine génération de médecins-chercheurs qui façonneront la santé et le bien-être de demain. Selon le rapport de la Fondation L'Oréal, si nous parvenions à une parité hommes-femmes dans les disciplines scientifiques, nous disposerions d'environ 300 000 chercheurs supplémentaires chaque année. Je ne soulignerai jamais assez l'importance de soutenir et de guider les jeunes femmes qui embrassent la carrière scientifique, pour qu'elles réussissent dans cette voie mais surtout pour qu'elles repoussent leurs propres limites. Ces femmes doivent devenir les chefs de file de la science de demain.

J'ai l'honneur de venir à Paris pour recevoir le Prix L'Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Science, en compagnie de quatre autres femmes de science aux talents exceptionnels, très courageuses et totalement engagées dans leur profession, dans un monde dominé par les hommes.

Ce prix est très important à mes yeux parce que j'ai toujours eu à cœur, au fil de ma carrière, d'être un mentor pour d'autres femmes. Je souhaite que les filles et les jeunes femmes attirées par les métiers scientifiques entendent parler des travaux novateurs de toutes les chercheuses de talent que récompense depuis 16 ans le Prix L'Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Science, et qu'elles y trouvent une source d'inspiration.

Avec les années, j'ai appris beaucoup de choses qu'il m'aurait été utile de savoir à mes débuts. Pour réussir en sciences, il ne faut pas avoir peur de prendre des risques. Les découvertes en laboratoire nécessitent de l'audace et de l'innovation. Faire carrière dans la recherche tout en élevant des enfants n'est pas facile mais si vous voulez mener les deux de front, il faut s'accrocher et ne laisser aucun obstacle s'interposer entre vous et vos rêves.

En définitive, si vos données scientifiques sont irréprochables, rien ne sert de vouloir tout faire à la perfection.

Ce billet est également publié sur DiscovHER, le media online de la Fondation L'Oréal, dédié aux femmes qui font avancer la science.

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