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Le voyage : une fuite sociétale?

Cette génération du XXIe siècle cherche à obtenir des réponses que notre société ne peut plus lui apporter.
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Aujourd'hui, on ne cesse de parler de cette nouvelle tendance au voyage ou à l'expatriation chez les jeunes. Nous ne parlons plus alors de conquête ou de découverte de nouveaux territoires, puisque le tour de la question a déjà été fait par nos ancêtres. Alors de quoi parlons-nous ? Qu'est-ce qui fait que, depuis ces 10 dernières années, de plus en plus de jeunes ressentent le besoin de partir ?

Peut-on parler de fuite sociétale, ou bien d'un besoin d'apprentissage et de découverte culturelle à travers le monde ?

(photo de la blogueuse Clouzote)

La société du XXIe siècle est rythmée par un cercle social professionnel, le traditionnel «métro, boulot, dodo». Dès notre plus jeune âge, on nous dirige vers des études et un apprentissage qui ont pour objectif de nous amener vers un emploi qui occupera plus de la moitié de notre existence. Sur une vie au complet, l'être humain passe un quart de sa vie à étudier, la moitié à travailler, et le dernier quart à profiter des dernières années qui lui reste avant de rejoindre le tunnel noir. Un cycle de vie qui ressemble étrangement à une machine qui tourne en boucle et qui se transmet de génération en génération.

Lorsque je questionnais mes grands-parents sur leurs rêves, ils me répondaient qu'un bon travail et une famille aimante suffisaient à faire leur bonheur. En est-il de même aujourd'hui chez les jeunes de 20 à 25 ans ? À l'inverse de nos parents, nous avons évolué dans une société dite «de consommation». Le monde de la mode, des nouvelles technologies, de la communication et du marketing font maintenant partie de notre quotidien. Il nous est impossible de sortir de chez nous sans croiser une publicité vantant le dernier téléphone intelligent à la mode ou la nouvelle voiture dernier cri. Si au début nous fermions les yeux face à un futur qui s'annonçait houleux, autant professionnellement que culturellement, la notion de prise de conscience sociale chez les jeunes est très vite apparue au sein de l'actualité.

Après avoir donc passé leur premier quart de leur vie à étudier, ces jeunes diplômés arrivent sur le marché du travail rempli d'ambition et de rêves de carrière. Mais très vite, un nouveau regard se pose sur la réalité qui les entoure et sur cette recherche d'emploi qu'ils débutent. En 2013, l'Institut de la statistique du Québec annonçait que le taux de chômage était plus élevé chez les jeunes que chez les autres groupes d'âge et qui s'élevait à 13 %, soit environ le double de celui des 25-54 ans et des 55 ans et plus. Si cette réalité a su être évitée par certains, d'autres en revanche la vivent au quotidien.

Parmi ces jeunes quittant le pays, je distingue deux catégories. Premièrement, nous avons une grande majorité qui décide de s'expatrier et de tout quitter. Au cours de ces 10 dernières années, le nombre de jeunes partant après l'obtention de leur diplôme n'a cessé d'augmenter. Si nous prenons l'exemple des PVT (permis vacances travail) délivrés par la France, on constate qu'entre 2000 et 2010 le quota était atteint en plusieurs mois, alors qu'aujourd'hui il s'agit plutôt d'une question de minutes, voire de secondes ! Le gouvernement canadien a même dû ajuster son fonctionnement et resserrer les quotas, puisque la demande ne cesse d'augmenter d'année en année. Mais est-ce pour autant une solution ? Malgré un climat économique meilleur qu'en France, la réalité de l'emploi ici est cependant la même. Si, au début, l'expatriation représentait un nouvel eldorado et une opportunité d'enrichir son CV, très vite ces nouveaux arrivants se sont rendu compte qu'il était difficile de se faire une place dans une nouvelle société différente de la leur.

Viens ensuite cette catégorie de personnes décidant de partir à l'aventure en parcourant le globe. Il suffit de faire le tour des blogues de ces voyageurs pour constater une nouvelle prise de conscience, mais cette fois-ci reliée à notre environnement. Ce n'est plus la réalité du chômage que l'on essaie de fuir, mais celle d'une société de consommation qui ne prête plus attention à ce qui l'entoure. En partant découvrir de nouvelles cultures, ces jeunes voyageurs reviennent en portant un nouveau regard sur notre société et sur ce qui importe vraiment dans nos vies quotidiennes. Ils se cherchent, à travers des aventures qui leur font découvrir de nouveaux horizons, de nouvelles façons de vivre et de penser. Ils rencontrent des personnes qui les amènent à voir différemment le monde et à changer totalement leur mode de fonctionnement. À travers des articles, des vidéos et des photos, ils nous partagent ces expériences humaines et culturelles que l'on ne vit qu'en voyage. On assiste alors à une véritable «restructuration intellectuelle». Malgré une société qui nous force à fermer les yeux, ces blogueurs tentent à leur façon de nous ouvrir l'esprit pour pouvoir comprendre et agir sur cet environnement qui a toujours existé et qui nécessite aujourd'hui des actions de conservation.

Que ce soit pour quitter son pays pour en essayer un autre, ou partir pour découvrir le monde, cette génération du XXIe siècle cherche à obtenir des réponses que notre société ne peut plus lui apporter.

Doit-on alors la blâmer, ou devons-nous mieux communiquer pour apprendre à mieux se comprendre ? Le voyage représente-t-il une solution, une fuite, une nécessité, un besoin, ou bien juste une curiosité ? Sans doute tout cela à la fois, et la question n'est finalement plus tant de rechercher les causes de cette expatriation, mais de déterminer comment la société peut soutenir ces jeunes voyageurs, ces nouveaux baroudeurs du XXIe siècle, et se nourrir de leurs expériences. Un questionnement que chacun devrait avoir aujourd'hui.

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