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Apprendre à ma fille à aimer son futur corps

IMAGE DE SOI - Tout a commencé par une simple envie de faire pipi. D'abord ma fille de 5 ans, puis moi. Alors qu'elle se lavait les mains, sans encore avoir remis son pantalon, ma fille déclara: "Maman, tes jambes sont grosses, pas comme les miennes. Regarde les miennes."
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happy mother and daughter...
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J'étais assise sur les toilettes, mi-surprise, mi-insultée, quand je me rendis compte que se présentait soudainement à moi une opportunité exceptionnelle.

Tout a commencé par une simple envie de faire pipi. D'abord ma fille de 5 ans, puis moi.

Alors que je m'installais sur les toilettes et qu'elle se lavait les mains, sans encore avoir remis son pantalon, ma fille déclara : "Maman, tes jambes sont grosses, pas comme les miennes. Regarde les miennes."

Une affirmation qu'elle illustra, telle la co-présentatrice d'une version cruelle de La Roue de la fortune, en me montrant ses jambes.

En baissant les yeux, je voyais mes propres cuisses -- pâles et pleines de bosses -- écrasées sur la porcelaine de la lunette des toilettes comme de la pâte à pain qui refuserait de lever.

D'un coup d'un seul, je revécus alors une scène de mon passé : je me retrouvais dans la cuisine de la maison où j'avais grandi, en train de parler à ma propre mère.

Cette dernière venait de faire un commentaire écoeuré sur la façon dont je mangeais et me prévenait qu'un jour je finirais par savoir ce que c'est d'avoir des hanches comme les siennes.

Tout cela me semblait confus : j'étais déjà adolescente et mon bassin ressortait simplement de mon corps de façon anguleuse mais disparaissait pour laisser place à mon ventre bien plat. Je me touchais les hanches et ne sentais que de la peau et des os.

"Je ne comprends pas, comment est-ce que de la graisse peut venir s'installer sur les os ?" C'est une question que je me posais vraiment et je regardais ma mère en attendant une réponse.

Ma mère eut alors l'air nerveuse et sa voix se mit à trembler : "Attends un peu, tu verras." Elle quitta ensuite la cuisine en courant puis s'enferma dans sa chambre.

C'était il y a 20 ans, avant que je ne comprenne à quel point ma mère détestait ses hanches.

Si j'avais été plus sensible, sa réaction face à ma frêle silhouette et son désir de minceur auraient pu me communiquer la peur de prendre du poids. Cela aurait pu me faire penser qu'il était normal d'être dégoûtée par les changements que subirait mon corps. Cela aurait pu me faire croire en un physique idéal qui me serait génétiquement inaccessible.

Cette échange avec ma mère aurait pu avoir des conséquences négatives et je refusais de laisser une chance à la conversation que je venais d'avoir avec ma fille de tourner aussi mal.

Je quittai donc des yeux mes grosses cuisses et regardai ma fille.

"C'est bien, tu as raison ! Il y a plus de graisse sur mes jambes que sur les tiennes. Quand on devient grande, on a plein de jolies courbes comme celles-là. C'est pas super ?"

Elle examina ses petites jambes, puis les miennes, puis de nouveau les siennes. Et elle sourit. "Je vais te ressembler quand je serai grande ?"

"Oui. Et moi, je te ressemblais quand j'avais 5 ans. C'est plutôt marrant de pouvoir ressembler à autre chose quand on grandit, tu crois pas ?"

Excitée à cette idée, elle commença à faire des bonds et me répondit : "Oui ! Et je grandis déjà tous les jours, maman !"

Tout sourire, elle partit de la salle de bain en courant se sentant à l'aise avec ses petites jambes toutes minces et attendant avec impatience les conséquences qu'aura la Maternité sur ces hanches d'ici 20 ans, laissant derrière elle son pantalon et une mère pleine d'espoir.

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