Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Les thérapies de conversion? C'est la compétence de l'autre!

La pétition de 18 000 signatures demandait une action claire du gouvernement, mais sa réponse fut basée sur l'argument du partage des compétences.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.
Dans tous les cas, il est évident que tenter de réorienter la sexualité ou l'identité d'une personne ne peut qu'être négatif.
Vladimir Vladimirov via Getty Images
Dans tous les cas, il est évident que tenter de réorienter la sexualité ou l'identité d'une personne ne peut qu'être négatif.

Le gouvernement fédéral a annoncé samedi dernier qu'il ne donnerait pas de suite à une pétition déposée le 1er février à la Chambre des communes demandant l'interdiction des thérapies de conversion. Le motif? Il s'agit de compétence provinciale et territoriale. Qu'est-ce que sont les thérapies de conversion? Qu'est-ce qu'une compétence? Pouvait-on répondre autrement?

Une thérapie de conversion est généralement pratiquée par des communautés religieuses ou, dans certains cas, des personnes professionnelles de la santé, et vise à convertir l'identité de genre ou l'orientation sexuelle d'une personne.

La prémisse de ces thérapies est donc la suivante: il est possible de changer ce qui, on le sait maintenant, est intrinsèque à une personne. Le chemin hétérosexuel et cisgenre est donc la voie à suivre et est le résultat de la guérison de l'homosexualité, notamment.

Les thérapies de conversion ont des effets dévastateurs

De nombreux rapports, dont celui de l'Ordre professionnel des sexologues du Québec, dénoncent les effets psychologiques nuisibles de cette pratique. Une étude chez les personnes ayant été victimes des thérapies de conversion révèle que de la détresse, de l'anxiété, un passage dépressif, de la difficulté à maintenir des relations ou un dysfonctionnement sexuel pourront être ressentis par ces personnes.

Dans tous les cas, il est évident que tenter de réorienter la sexualité ou l'identité d'une personne ne peut qu'être négatif.

La pétition, ayant recueilli plus de 18 000 signatures, demandait une action claire du gouvernement. La réponse fut basée sur l'argument du partage des compétences. En effet, la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit, à ses articles 91 et 92, que chaque palier de gouvernement, soit le provincial et le fédéral, possède certaines compétences exclusives. Un palier ne peut donc s'ingérer dans le champ de l'autre sans risquer de voir son acte déclaré inconstitutionnel.

Sont de compétences exclusives fédérales, notamment, la loi criminelle ainsi que tout autre sujet n'étant pas accordés expressément à une province. Les provinces, quant à elle, ont, entre autres, la compétence exclusive sur l'établissement, l'entretien et l'administration des hôpitaux ainsi que sur les droits civils dans la province.

Techniquement, il est donc vrai de dire que le gouvernement fédéral ne pourrait légiférer en matière civile ou tout ce qui touche les hôpitaux. Ceci étant dit, le gouvernement possède une compétence exclusive en matière criminelle et une compétence concurrente en matière de santé.

À ce jour, aucun article ne vise directement les thérapies de conversion. Les dispositions en place prohibant la séquestration, les agressions ou l'enlèvement s'appliquent néanmoins. C'est trop peu pour contrer un phénomène si dévastateur.

Le Code criminel permet l'imposition de la sanction la plus lourde dans notre ordre juridique: l'emprisonnement. Il est évident que l'ajout de dispositions prohibant clairement le fait de forcer une personne à suivre une thérapie de conversion, d'en administrer une ou encore d'en accueillir dans son établissement sont nécessaires afin d'éradiquer ces traumatismes.

Le gouvernement fédéral, via la Loi canadienne sur la santé, use de son pouvoir de dépenser afin de réguler certaines orientations en matière de santé. Cette loi prévoit les orientations à respecter par les provinces afin d'obtenir des crédits fédéraux. La conséquence du non-respect de ces orientations? La diminution ou l'absence de subventions fédérales.

Il serait plus qu'envisageable d'inclure une prohibition des thérapies de conversion dans ces orientations, afin que toute province permettant ce genre de traitement sur son territoire voie ses subventions diminuées.

En ce qui concerne les provinces, il est urgent qu'elles se mobilisent. De nombreux gouvernements les ont déjà interdites, mais le Québec n'est pas l'un d'eux.

Les provinces doivent se mobiliser!

Certains professionnels de la santé, étant même membres d'un ordre professionnel, continuent de réorienter, sous forme de psychothérapie, certaines personnes issues de la diversité sexuelle et de genre (DSG). Les mesures pouvant, et devant, être adoptées sont, notamment:

  • La prohibition complète de l'administration de traitement de santé visant à changer l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne mineure et, pour une personne majeure, en l'absence de son consentement;
  • L'imposition de lourdes peines, allant de l'amende jusqu'à la perte du droit de pratique lorsqu'une personne est membre d'un ordre professionnel, lorsque de tels traitements sont administrés;
  • La prise de position claire de la part de tous les ordres professionnels oeuvrant dans le milieu de la santé quant aux effets nocifs des thérapies de conversion;
  • La non-reconnaissance des thérapies comme étant un traitement de santé ou une psychothérapie;
  • L'arrêt d'octroi de subventions aux organismes pratiquant de tel traitement.

Est-il juste d'affirmer que le gouvernement fédéral n'avait pas la compétence pour légiférer en la matière? Techniquement non. Rejeter, à l'arrivée des élections, sur le dos des provinces, l'adoption de mesures individuelles afin de répondre à problème global ne fait que repousser le problème.

Il est temps que l'on s'indigne. Il est surtout temps que l'on cesse d'invoquer «la compétence de l'autre» pour éviter de poser des actions concrètes face à des problèmes urgents.

Pendant ce temps, des centaines, voire des milliers, de personnes subissent des traumatismes aux mains de supposées personnes professionnelles de la santé. Est-il possible d'estimer le nombre de personnes qui en sont victimes? Non, puisque le problème ne semble pas avoir été assez important pour que l'on s'interroge sur son étendue.

La section des blogues propose des textes personnels qui reflètent l'opinion de leurs auteurs et pas nécessairement celle du HuffPost Québec.

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.