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Médicaments d’ordonnance: quand plus n’est pas toujours mieux

Près de 1,6 million de personnes âgées au Canada risquent de subir un préjudice important causé par des médicaments censés les aider.
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Les Canadiens vivent de plus en plus vieux et ils prennent plus de médicaments que jamais. Or, cela nous rend peut-être plus malades au lieu d'améliorer notre état de santé.

Selon un rapport rendu public la semaine dernière par l'Institut canadien d'information sur la santé, une personne âgée sur quatre au Canada prend 10 médicaments ou plus. Ce sont donc 1,6 million de personnes âgées au Canada qui risquent de subir un préjudice important causé par des médicaments censés les aider.

Trois exemples

Prenons l'exemple des benzodiazépines, ces hypnotiques souvent administrés aux personnes âgées qui éprouvent des troubles du sommeil ou qui font de l'anxiété. Ce sont des médicaments puissants, conçus pour un usage de courte durée. Malheureusement, beaucoup de personnes âgées développent une dépendance à leur endroit et continuent de les prendre à long terme, parfois indéfiniment. Or, les benzodiazépines peuvent causer de la somnolence, des chutes et parfois des fractures, voire des accidents de la route.

Les antipsychotiques forment une autre classe de médicaments puissants destinés à une utilisation brève chez les personnes âgées. Toutefois, ils sont prescrits aux Canadiens de plus de 65 ans pour des périodes plus longues que nécessaire. Les antipsychotiques sont parfois prescrits lors de situations difficiles, comme une hospitalisation ou un placement en CHSLD. Leur utilisation prolongée peut modifier le comportement et la personnalité des patients âgés et les exposer à un risque accru d'interactions médicamenteuses et d'effets secondaires.

Individuellement, ces médicaments exposent les personnes âgées à un risque, surtout s'ils sont pris pendant une période prolongée. Et le danger est proportionnel au nombre de médicaments administrés simultanément, car le risque d'interactions médicamenteuses et d'effets secondaires se trouve multiplié.

Prendre des médicaments superflus n'est pas nuisible seulement pour les personnes âgées, mais aussi pour l'ensemble des Canadiens.

La crise des opioïdes est un exemple éloquent du tort que peut causer aux individus et aux collectivités la prise de médicaments inutiles. Un article publié récemment par des chercheurs ontariens a révélé que de puissants opioïdes sont prescrits aux Ontariens pour des durées indues et à de fortes doses, alors que ce sont des médicaments qui causent la dépendance et sont nocifs s'ils sont utilisés à mauvais escient ou inutilement.

Les données sur le nombre d'ordonnances superflues utilisées par les Canadiens et sur les problèmes qui en découlent sont alarmantes. Mais il existe des solutions à ce problème complexe.

Quelques pistes de solution

Plusieurs de ces solutions se trouvent entre les mains du corps médical lui-même. Après tout, ce sont surtout les médecins qui prescrivent les médicaments et leurs collègues des milieux cliniques, le personnel infirmier et les pharmaciens ou pharmaciennes, qui les servent et surveillent leur utilisation. Les médecins canadiens reconnaissent de plus en plus qu'on peut faire mieux. Ils amorcent le dialogue avec les patients et les clients en leur enseignant qu'ils ne seront pas nécessairement en meilleure santé s'ils prennent plus de médicaments et que les médicaments inutiles peuvent se révéler nuisibles.

La campagne Choisir avec soin travaille de concert avec les sociétés médicales pour dresser des listes fondées sur des données probantes au sujet des médicaments et interventions sur lesquels il y a lieu de se poser des questions.

En y repensant à deux fois avant de prescrire et en expliquant aux patients les dangers des médicaments, les médecins s'attaquent à la surutilisation des médicaments d'ordonnance.

Choisir avec soin travaille aussi avec les professionnels de la santé et les sociétés médicales en région pour faire connaître les stratégies fondées sur des données probantes et aider ainsi les médecins à bien réfléchir, à proposer des solutions de rechange et à discuter des situations où le médicament pourrait causer plus de tort que de bien. La campagne offre aussi des outils aux patients pour poser des questions et engager le dialogue avec leur médecin autour de la notion que «plus» n'est pas toujours mieux.

Il reste beaucoup à faire

Les médecins doivent avoir la possibilité de travailler dans le cadre de systèmes de santé qui leur offrent un tableau plus complet des médicaments administrés aux patients. Mais l'accès à une telle information peut être compliqué, car les réseaux sont fragmentés et mal conçus. De plus, des modèles de rémunération qui incitent à abréger les consultations cliniques font en sorte que les médecins ont moins de temps pour établir un historique pharmacothérapeutique, pour interroger leurs patients âgés sur le nombre de médicaments qu'ils prennent et leur fréquence et pour bien leur expliquer les risques et avantages.

Sensibiliser les médecins, les patients et le public aux problèmes de la surmédicamentation n'est que le début.

Ce texte a été coécrit avecDre Wendy Levinson, présidente de la campagne «Choisir avec soin», conseillère experte auprès du réseau EvidenceNetwork.ca et professeure de médecine à l'Université de Toronto.

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