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Élections 2014: pourquoi je suis progressiste

Je ne crois pas que le monde est un. Je crois que je m'enrichis quand je partage, je sais que la solidarité me rapporte. Je suis fier de vivre au Québec pour cette raison.
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C'était à l'entrée de mes enfants en maternelle. L'éducatrice soumet un problème à résoudre aux enfants: nous sommes 10 et il n'y a que 9 collations. Que devrions-nous faire ? Le petit Émile lève la main: « Nous pouvons tous partager ensemble les neuf collations ». Et tous les autres enfants d'appuyer l'idée. C'est pour cette raison que je suis progressiste. Parce que je pense qu'il est normal de partager entre nous comme nous l'apprenons à nos enfants. C'est le gros bon sens.

On a beaucoup entendu parler de la gauche et de la droite depuis l'entrée en scène de Pierre-Karl Péladeau dans la campagne. Depuis une décennie, être progressiste est pratiquement devenu une maladie honteuse au Québec. Être progressiste, c'est vouloir s'endetter, s'opposer au développement économique, protéger les intérêts de « groupes de pression » et promouvoir l'appauvrissement de tous. Être néolibéral, c'est vouloir le succès, l'enrichissement, la réussite, baisser les impôts, être plus libres et plus puissants. On crée de la richesse d'abord, et on verra ensuite à la redistribuer.

Revenons à l'école : 10 enfants, 9 collations. Mais cette fois-ci, un enfant possède à lui seul 6 collations. Les trois suivants s'en partagent deux. Les six derniers doivent se partager une seule collation. Le premier enfant n'a aucune intention de partager puisqu'il considère que ses revenus correspondent à des rendements normaux. Les trois suivants n'ont que deux collations pour trois et considèrent qu'ils ne peuvent partager. Les six derniers survivent. Voici le monde dans lequel nous vivons : Oxfam révélait au début de 2014 que les 85 individus les plus riches de la planète possédaient à eux seuls une richesse équivalente à la moitié de l'humanité.

Le concept néo-libéral de la répartition de la richesse est ce qu'on appelle l'économie du ruissellement, c'est-à-dire que la richesse qui est produite au haut de la pyramide devrait ruisseler vers le bas et enrichir une majorité d'entre nous. Le Pape François a soulevé l'ire de la droite américaine à la fin de 2013 lorsqu'il a affirmé que cette théorie était sans fondement scientifique et que cette méthode de répartition de la richesse n'avait jamais fait ses preuves. En fait, si l'on regarde la progression des inégalités au cours des vingt dernières années aux États-Unis, au Canada et en Europe, on constate un largage complet des couches défavorisées de la société au profit des plus riches. Le supposé ruissellement vers le bas de la richesse s'est transformé en un pompage vers le haut.

La quasi-totalité de la croissance économique anémique qui a suivi la crise de 2008 est allée dans les poches des tranches les plus riches de la société, tout cela alors que le revenu réel d'une majorité de citoyens stagne et que l'endettement des ménages canadiens dépasse les 160% de leur revenu annuel. Dans mon dernier billet de blogue, je rapporte que les revenus de la classe moyenne n'ont progressé que de 1,7% en 15 ans, de 1993 à 2007.

On nous assène que de telles inégalités sont un dommage collatéral nécessaire pour assurer une croissance soutenue, et qu'à terme, nous serons tous plus riches. Mais plusieurs, dont l'économiste Joseph Stiglitz, affirment que les inégalités économiques sont mauvaises pour l'économie, qu'une mauvaise répartition de la richesse mène à moins de création de richesse, et donc à un appauvrissement généralisé.

C'est pourquoi le nouveau maire de New York, Bill De Blasio, s'est fait élire sur une plateforme de répartition de la richesse. Le nouveau maire, qui succède au milliardaire Michael Bloomberg, considère la relance de New York passe par un meilleur partage de la richesse. Sa première action : adopter une nouvelle taxe sur les revenus supérieurs à 500,000 $ pour financer la maternelle gratuite pour tous les enfants de la ville. La taxe représente un café latté par jour pour les personnes gagnant entre 500,000$ et un million $. Évidemment, plusieurs menacent de quitter la ville pour fuir cette taxe inacceptable.

Un latté par jour. Un enfant à la maternelle.

Je fais le choix en une nanoseconde.

C'est pour cela que je suis progressiste. Je crois que la concentration de la richesse est nuisible à la croissance et constitue à sa face même une mauvaise allocation des ressources, un gaspillage qui doit être atténué par des mesures fiscales appropriées. Poussées à l'extrême, les inégalités de richesse érodent la démocratie, comme le démontre l'expérience américaine.

C'est pour cela que je suis progressiste. Je ne crois pas que le monde est un zero sum game. Je crois que je m'enrichis quand je partage, je sais que la solidarité me rapporte.

Je suis fier de vivre au Québec pour cette raison.

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