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Pétrole: un large appui pour les positions écologistes

Se pourrait-il que le chroniqueur deAlain Dubuc ait inversé l'équation? Alors qu'il déplore l'influence disproportionnée des écologistes sur les citoyens, il devrait peut-être se questionner sur l'influence que les citoyens donnent à ces mêmes groupes écologistes.
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Dans une chronique publiée le 10 janvier dans La Presse, Alain Dubuc affirme que « l'influence du discours environnementaliste dans le débat public [est] sans rapport avec son poids réel dans la société». Cette affirmation est bien commode puisqu'elle lui permet de discréditer d'un trait l'ensemble des positions présentées par le mouvement écologiste dans le dossier du pétrole. L'argument est simple et il va comme suit: puisque ce point de vue est surreprésenté, il est sans valeur.

On pourrait passer longtemps à débattre de la validité de ce sophisme. Il fut un temps ou l'égalité des blancs et de noirs, la nocivité de la cigarette, la dangerosité de l'alcool au volant ou le port de la ceinture de sécurité étaient des idées qui ne ralliaient pas une majorité. Étaient-elles moins valides pour autant? Bien sur que non. Est-ce que les idées d'un chroniqueur sont représentatives d'un poids réel dans la société? Parfois oui, souvent non. Passons.

Qu'en est-il vraiment ? Les écologistes occupent-ils vraiment une place disproportionnée dans le débat public ? Plusieurs données permettent d'en douter. D'abord, dans un sondage publié l'été dernier, 61% des Canadiens et 74% des Québécois considéraient que la réduction de notre dépendance aux combustibles fossiles était une grande priorité. 73% des Canadiens et 79% des Québécois considéraient que la création d'emploi dans le domaine des énergies propres était prioritaire. 67% des Canadiens et 84% des Québécois faisaient de la réduction des émissions de GES une grande priorité. Mais seulement 31% des Canadiens considéraient que l'exportation de pétrole et de gaz canadiens était prioritaire. Se pourrait-il alors que les écologistes soient en phase avec l'opinion publique?

Regardons plus loin. Un sondage publié cet automne démontre un appui global de 84% au travail des groupes écologistes au Québec. Le sondage léger demandait aux répondants d'affirmer s'ils étaient en accord ou non avec les affirmations suivantes :

  • Les environnementalistes sont trop moralisateurs
  • Les environnementalistes sont trop alarmistes
  • Les environnementalistes sont trop rêveurs
  • Les environnementalistes n'apportent aucune solution
  • Les environnementalistes sont trop revendicateurs
  • Je suis fatigué d'entendre parler d'environnement
  • Je m'intéresse moins qu'avant à l'environnement

En moyenne, 84% des personnes interrogées ont affirmé être en désaccord avec ces affirmations, 89% ont affirmé ne pas être fatiguées d'entendre parler d'environnement et 93% ne sont pas moins intéressées qu'avant par l'environnement. Les opinions les plus favorables à l'endroit des environnementalistes se retrouvaient chez les 18-24 ans (88%), les femmes (88%) et les gens de la grande région de Montréal et ses couronnes (86%).

Ces données sont corroborées par la croissance des communautés de partisans des groupes écologistes qui ont littéralement explosé au cours des cinq dernières années pour dépasser le quart de millions de personnes au Québec seulement. Et que dire de la marche pour la Terre de 2012 qui a réuni une marée humaine de 250 000 personnes à Montréal ? On s'est empressé de dire que le printemps érable en avait été la bougie d'allumage. Mais en 2013, en l'absence totale de mouvement social, 50 000 personnes étaient à nouveau au rendez-vous pour s'opposer au pétrole albertain et réclamer une action dans la lutte aux changements climatiques. Quel autre mouvement réussit à mobiliser autant au Québec?

Se pourrait-il qu'Alain Dubuc ait inversé l'équation? Alors qu'il déplore l'influence disproportionnée des écologistes sur les citoyens, il devrait peut-être se questionner sur l'influence que les citoyens donnent à ces mêmes groupes écologistes. Pourquoi? Parce qu'ils se reconnaissent dans les valeurs défendues par le mouvement écologiste, par leur défense des citoyens, du bien commun, de la biosphère, des prochaines générations.

Je laisserai en terminant le dernier mot à Josée Legault qui a pris le contrepied de cette nouvelle mouvance qui vise à isoler et discréditer un mouvement qui dérange justement parce qu'il a le vent dans les voiles et qu'il ose se dresser devant le rouleau compresseur de l'industrie pétrolière:

«Par les temps qui courent, il est de bon ton dans certains cercles de se moquer des environnementalistes - incluant certaines organisations plus connues comme Greenpeace, Équiterre ou la Fondation David Suzuki. Or, aux côtés de citoyens de plus en plus nombreux à s'inquiéter de l'appétit vorace de cette industrie et de ses entrées privilégiées dans les coulisses du pouvoir, elles offrent ce contrepoids - une voix nécessaire à un débat de société qui, avec elles, peut se dérouler à forces minimalement moins inégales. D'autant plus lorsqu'on constate également l'extrême facilité avec laquelle les lobbys de l'industrie pétrolière et gazière recrutent depuis quelques années, en claquant des doigts et du porte-monnaie, une flopée d'ex-politiciens, d'ex-chefs de cabinet et d'ex-attachés politiques. Encore une fois, tous partis et paliers de gouvernement confondus....»

Dans ce pays où il faut rassembler 250 000 personnes pour faire contrepoids à une quarantaine de lobbyistes, je garderais une petite gêne lorsque vient le temps de déplorer l'influence disproportionnée d'un mouvement citoyen.

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