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Gentilly-2: Le dernier bal du nucléaire

Le Carnaval de Québec, ce rendez-vous annuel de la neige et de l'hiver s'amorce ce vendredi à Québec. Mais avant l'ouverture du carnaval, nous aurons droit cette semaine à Québec au dernier bal du nucléaire québécois: une commission parlementaire où viendront défiler une pléthore d'acteurs favorables à la réfection de la centrale. Bien que la Commission parlementaire soit sensée porter sur les impacts économiques du déclassement, la table est mise pour un procès en règle d'Hydro-Québec et du gouvernement Marois.
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Le Carnaval de Québec, ce rendez-vous annuel de la neige et de l'hiver s'amorce ce vendredi à Québec. Mais avant l'ouverture du carnaval, nous aurons droit cette semaine à Québec au dernier bal du nucléaire québécois : une commission parlementaire où viendront défiler une pléthore d'acteurs favorables à la réfection de la centrale. Bien que la Commission parlementaire soit censée porter sur les impacts économiques du déclassement, la table est mise pour un procès en règle d'Hydro-Québec et du gouvernement Marois.

Cette commission parlementaire, imposée par l'opposition au gouvernement, est un exercice fortement biaisé en faveur des tenants de la réfection. Trois chambres de commerce, deux maires, plusieurs autres intervenants économiques, quelques syndicats d'employés et d'autres intervenants défileront devant les élus pour contester la décision du gouvernement. Un seul groupe favorable à la décision de déclasser Gentilly-2 a été invité contre une douzaine de groupes qui y sont opposés. Équiterre et la Fondation David Suzuki se sont vus refuser de participer pour y présenter un mémoire favorable au déclassement. L'équilibre des points de vue a été sacrifié pour favoriser des intérêts partisans et financiers. L'ombre d'Énergie atomique du Canada et de SNC/Lavalin plane sur cet exercice.

Le ton de la Commission parlementaire a été donné la semaine dernière par la Chambre de commerce et d'industrie du Cœur du Québec qui a produit un mémoire virulent qui reproche à Hydro-Québec d'avoir conduit « un exercice comptable très douteux» pour « camoufler une idéologie du Parti québécois », en plus « d'avoir opté pour une victoire dégradante et stupide de certains mouvements écologistes ». Le maire de Trois-Rivières réclame quant à lui la démission de Thierry Vandal, après avoir appelé au renversement du gouvernement. À force de déchirer leurs chemises en insultes et accusations, on se demande bien de quels vêtements seront vêtus ces intervenants à leur arrivée au bal...

Il est de bon ton depuis quelques mois dans certains milieux de qualifier les écologistes de radicaux, d'idéologues et d'ennemis du développement économique. Cette parade permet d'éviter d'avoir à contrer leurs arguments de fond en se contentant de les discréditer. Le truc est vieux comme le monde. Mais en proférant ainsi des insultes envers le mouvement écologiste et le gouvernement, le lobby pronucléaire se discrédite lui-même. Pire encore, en utilisant à ses fins les institutions parlementaires, il contribue aussi à discréditer un exercice démocratique qui devrait être équilibré et transparent.

Quels sont donc les arguments en faveur du démantèlement de Gentilly-2 que cette commission parlementaire ne saurait entendre? Premièrement, Hydro-Québec n'a pas besoin de cette énergie puisqu'elle dispose de surplus d'électricité qui lui coûteront déjà 23 milliards $ d'ici 2020. Si nous reconstruisons Gentilly-2, l'électricité produite, peu importe son coût de production (12 cents le kWh selon Hydro-Québec), sera destinée à l'exportation sur le marché américain au tarif courant de 4 cents le kWh. Les Québécois devraient-ils payer pour produire une électricité dont ils n'ont pas besoin et qui sera exportée à perte aux États-Unis ? Selon Hydro-Québec, dès 2017, la fermeture de Gentilly-2 fera augmenter son bénéfice de 217 millions $ par année par rapport au scénario de réfection.

Il ne reste aucun analyste indépendant du lobby nucléaire pour prétendre que la réfection de Gentilly-2 serait rentable économiquement. Tous les gens informés du dossier savent qu'Hydro-Québec dispose depuis plus d'un an de données qui montrent que ce projet ne tient pas debout au plan financier, données qui ont été gardées secrètes par le gouvernement précédent. Aussi, si l'exercice n'est pas rentable financièrement, peut-on le justifier uniquement dans le but de soutenir l'économie régionale ? Les 800 emplois maintenus par la réfection coûteraient au bas mot plus de 5 millions de fonds publics chacun. N'y a-t-il pas une autre stratégie qui permettrait de créer autant d'emplois à moindre coût pour les contribuables ?

C'est à cette question que devrait répondre la Commission parlementaire si ceux qui l'ont mise au monde avaient vraiment à cœur les intérêts de l'ensemble des Québécois et non seulement leurs propres intérêts financiers. On ne peut que s'étonner que les chambres de commerce et les intervenants économiques, habituellement partisans de la rigueur budgétaire, acceptent si facilement que l'État s'endette lorsqu'ils sont les principaux bénéficiaires d'investissements publics.

Mais les dégâts potentiels de cette commission parlementaire ne s'arrêtent pas là, malheureusement. Les Québécois doivent déjà vivre avec un coûteux héritage de contamination radioactive. Le démantèlement de Gentilly-2 et la sécurisation des déchets nucléaires, dont certains demeureront hautement radioactifs pendant plus de 10,000 ans, et pour lesquels nous ne disposons toujours pas de solution d'entreposage permanent, nous coûteront une fortune. À cet égard, la proposition des tenants de la réfection est proprement irresponsable : poursuivre dans la même direction, ajouter des milliers de tonnes de déchets radioactifs à notre dette nucléaire et passer la facture à la prochaine génération.

Engloutir des fonds publics dans une infrastructure énergétique déficitaire et inutile tout en léguant à nos enfants une dette écologique et financière digne d'un nouveau stade olympique, voilà à quoi se résume la proposition économique du lobby nucléaire québécois. Comme citoyen et contribuable québécois, je ne vois pas en quoi cette décision est dans mon intérêt et celui de mes enfants.

Le Canada a déjà englouti 20 milliards $ dans Énergie atomique du Canada avant de vendre la société d'État pour 15 millions $ à SNC/Lavalin. Il est temps de mettre un terme au corporate welfare nucléaire.

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