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La division du vote: une bien belle excuse

Il est évident qu'une convergence pourrait aider à battre le PLQ, mais nous pensons que son effet potentiel est grandement exagéré dans un but purement politique et que les causes de la réélection quasi-perpétuelle des libéraux sont plus profondes.
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La division du vote est une notion qui est souvent évoquée dans l'espace public. Une division du vote indépendantiste serait en grande partie responsable du report au pouvoir quasi-continu des libéraux provinciaux depuis 2003. Le remède serait que les partis indépendantistes et/ou progressistes se rallient tous derrière le Parti québécois ou une convergence de partis indépendantistes dans le but d'additionner leurs votes pour battre en nombre les libéraux. Il est évident qu'une convergence pourrait aider à battre le PLQ, mais nous pensons que son effet potentiel est grandement exagéré dans un but purement politique et que les causes de la réélection quasi-perpétuelle des libéraux sont plus profondes.

En théorie, arithmétiquement parlant, il est possible de battre les libéraux par le moyen d'un ralliement de tous les électeurs du PQ, de QS et d'ON derrière un candidat commun. En effet, si lors de l'élection de 2012 tous les électeurs solidaires et onistes s'étaient ralliés au PQ ou qu'une forme de convergence avait eu lieu, il semble possible que 10 à 12 députés indépendantistes supplémentaires auraient été élus et que le PQ aurait pu former (en coalition ou non) un gouvernement majoritaire.

Il y a deux gros problèmes avec cette approche: l'impact réel de la division du vote ainsi que la prémisse qu'il est impossible pour un parti de se sortir par lui-même, sans aide d'autres partis, d'un problème de division de son électorat.

D'abord, l'effet réel d'une convergence ou d'un ralliement ne serait pas une simple addition de tous les votes des électeurs des partis impliqués. C'est plus complexe que cela. Bon nombre de gens qui appuient Québec Solidaire et Option nationale n'ont jamais voté pour le Parti Québécois et ne le feraient pas nécessairement dans le cas d'un candidat unique. C'est la même chose pour les électeurs péquistes. Un certain nombre de voies seraient donc en quelque sorte «perdues» dans un vote pour un autre parti ou dans l'abstention. Mais surtout, comme le montrait Bryan Breguet dans un billet de blogue intitulé «La division du vote: risques et potentiels d'un candidat unique», un certain nombre d'électeurs de droite et/ou fédéraliste (lire caquistes) pourraient décider pour contrer une coalition indépendantiste de se ranger derrière... le candidat libéral dans leur circonscription, annulant ainsi au moins en partie l'effet d'une convergence.

On utilise la convergence comme un moyen de culpabiliser les électeurs des partis indépendantistes hors du PQ

Dans ce même billet, Breguet en arrive à la conclusion (avec les chiffres de 2013) que le PLQ verrait ses chances de remporter l'élection passer de 97% à... 77%. Une coalition PQ-QS-ON verrait sa possibilité de gagner passer de 3% à 23%. Ce n'est pas inintéressant, mais ce n'est certainement pas la victoire assurée que l'on nous vend. De toute façon, le vote stratégique n'est pas un comportement que beaucoup d'électeurs adoptent. Selon une étude publiée dans la revue de science politique Politique et Sociétés, seuls 8,4% de l'électorat adopte un telle attitude. Il faudra donc aller plus loin qu'une convergence pour gagner.

D'autre part, prétendre qu'une convergence des forces est absolument nécessaire, c'est ignorer un phénomène politique qui s'est produit l'an passé: l'élection des libéraux de Trudeau. Quel est le rapport? Jusqu'à la montée du PLC à partir de la mi-campagne environ, beaucoup d'observateurs ont déclaré qu'une coalition PLC-NPD (et peut-être même PVC) était nécessaire pour battre le gouvernement Harper. La suite nous a démontré le contraire. La volatilité croissante de l'électorat (60% des Canadiens au début de la campagne fédérale de 2015 ont déclaré pouvoir changer d'avis concernant leur intention de vote, par exemple) montre qu'un parti peut s'élever au-dessus d'une division de son électorat sans l'aide d'une ou de plusieurs autres formations politiques.

Comprenez-nous bien: nous ne sommes pas contre l'idée d'une convergence. Nous sommes cependant contre l'utilisation que l'on fait de cette idée. Dans le cas qui nous occupe, on utilise la convergence comme un moyen de culpabiliser les électeurs des partis indépendantistes hors du PQ ainsi que pour cacher une série de facteurs qui ont plus d'influence sur les mauvaises performances électorales péquistes que la division du vote.

Il est temps de mettre cette question de la division du vote en perspective et également pour tous les partis indépendantistes de faire une vraie remise en question devant leurs résultats mitigés. Nous devrions passer plus de temps à faire de nouveaux indépendantistes qu'à se «chicaner» sur l'opportunité ou non de choisir un candidat unique dans une élection partielle qui n'aura aucune influence réelle sur la composition de l'Assemblée nationale. De notre côté, c'est ce que nous comptons faire.

Julien Bousquet, directeur de campagne de Fabien Villemaire, candidat d'Option nationale dans Marie-Victorin.

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