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Soigner excessivement nos aînés, est-ce possible?

Inspirés par leurs lectures sur Internet, les patients et familles s'attendent à des batteries de tests et des traitements intensifs, bien que ce ne soit pas toujours optimal d'agir ainsi.
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Cessons de croire que «plus» vaut mieux en ce qui a trait aux interventions médicales chez les personnes âgées.
Elena Eliachevitch via Getty Images
Cessons de croire que «plus» vaut mieux en ce qui a trait aux interventions médicales chez les personnes âgées.

Selon la sagesse populaire, «plus» vaut mieux que «moins». Et ainsi en est-il de la lourdeur et du nombre des traitements médicaux dont nous croyons avoir besoin. Car, inspirés par leurs lectures sur Internet, patients et familles s'attendent désormais à des batteries de tests et des traitements intensifs, à toutes les phases de la vie.

Cependant, l'excès des traitements peut causer plus de tort que de bien. Cela est vrai à tous les âges de la vie, mais en particulier chez les personnes âgées fragilisées. La probabilité est beaucoup plus grande pour eux de subir des traitements présentant des risques importants.

Alors qu'elles sont pourtant beaucoup moins susceptibles de bénéficier des traitements de maintien de leurs fonctions vitales, les personnes âgées fragiles sont beaucoup plus susceptibles d'en recevoir.

Ainsi, des chercheurs ont pu récemment démontrer que l'acte médical fréquent dans les hôpitaux qui consiste à ventiler artificiellement les personnes âgées très malades, loin d'améliorer leurs chances de survie, les diminuait au contraire.

Selon une autre étude, 31% des patients âgés de 65 à 74 ans ayant subi une ventilation artificielle d'urgence recevaient leurs autorisations de sortie d'hôpital, comparativement à 19% pour les personnes de 80 à 84 ans. Et, pour les patients de plus de 90 ans, ce pourcentage s'abaissait à 14%. Cependant, ces chiffres atterrants ne disent pas tout.

Seul un faible pourcentage des personnes âgées qui survivent après une ventilation artificielle recouvrent le niveau de leurs fonctions vitales antérieur à leur maladie.

En revanche, le recours à des formes moins invasives de maintien des fonctions vitales, telle l'utilisation d'un masque respiratoire facial pour les patients qui refusent l'insertion d'un tube raccord dans leurs poumons, peut donner de bons résultats. Pourquoi? Le patient n'aura peut-être pas besoin d'être admis au service de soins intensifs — alors que cela serait nécessaire dans l'hypothèse de l'utilisation d'un tube raccord — il ne requerra peut-être pas une sédation importante, il pourra peut-être boire et parler avec les membres de sa famille et ses amis, améliorant ainsi sa qualité de vie.

En dépit de cela, bien que les traitements de maintien des fonctions vitales n'accroissent guère les chances d'un mieux-être dans la dernière phase de la vie, on les administre couramment, ce qui cause des souffrances inutiles et l'abaissement de la qualité de vie.

Également préoccupant est notamment le surtraitement des personnes âgées fragilisées atteintes de diabète. Un taux sanguin de sucre insuffisant peut provoquer évanouissements et chutes causant des blessures, l'immobilisation et, parfois, le placement en établissement. Quoique le contrôle du diabète chez les personnes plus jeunes est nécessaire pour prévenir les complications, les personnes âgées sont moins susceptibles de bénéficier d'un tel contrôle, car leur durée de vie restante pourrait être trop courte pour que des complications surviennent.

Le nombre croissant des médicaments pris par les personnes âgées constitue un autre motif d'inquiétude. On estime que près des deux tiers des personnes de plus de 65 ans reçoivent des ordonnances d'au moins cinq médicaments et, plus d'un quart, des ordonnances de dix médicaments, qui doivent souvent être pris plusieurs fois par jour. Les risques d'effets nocifs, d'interactions médicamenteuses, d'hospitalisation et de résultats d'ensemble médiocres augmentent avec le nombre des médicaments.

Selon certaines études, la réduction du nombre des médicaments qui ne sont plus appropriés pour la phase de la vie du patient ne provoque pas d'effets indésirables et, dans certains cas, donne de meilleurs résultats.

Que peut-on faire contre le surtraitement des aînés fragilisés?

Premièrement, il faut bien planifier les soins et discuter franchement de la fin de la vie avec nos êtres aimés fragiles. Il est crucial de connaître à l'avance leurs préférences, car de telles discussions peuvent devenir impossibles en état de crise.

La liste des médicaments devrait aussi être revue régulièrement.

Les besoins de médicaments peuvent se modifier avec le temps et il faut donc les revoir pour déterminer s'ils conviennent encore, au regard de l'état de santé actuel.

En ce qui a trait aux politiques, il convient de prendre conscience que les interventions médicales ont leurs limites et que nos gouvernements doivent investir pour améliorer la qualité de la vie en bonifiant les soins à domicile, les soutiens sociaux et les options de soins palliatifs pour les Canadiens plus âgés souffrant d'affections chroniques et de fragilité.

Comme notre population vieillit et que de nombreuses personnes vivent plus longtemps que jamais auparavant, faisons en sorte que les années qui nous sont données en plus soient de qualité. Et cessons de croire que «plus» vaut mieux en ce qui a trait aux interventions médicales chez les personnes âgées.

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