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Richard Bain: La peur de l'autre, une tumeur fatale

Que le tueur terroriste soit déclaré sain d'esprit ou pas, une chose nous explose dans la tronche: cet homme carburait à la haine. De plus en plus, des gens carburent à la haine et à la peur d'autre. Et cela peut difficilement conduire à des attitudes d'ouverture, d'inclusion et de respect réciproques. Allophobie, sexisme, racisme, misogynie, homophobie, toutes les attitudes haineuses sont les métastases d'une tumeur principale: la peur de l'autre, de la différence. Trop facile de dire « C'est un fou ! ». Cela donne bonne conscience. On se lave les mains, on tourne la page et on ne change rien.
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Le 4 septembre 2012, un événement de première (c'est le cas de le dire) : une femme, Pauline Marois, est élue première ministre du Québec.

En soirée, alors qu'elle est au milieu de ses supporters à célébrer ce moment historique, un homme, Richard Bain, tente de l'assassiner. Un autre homme, Denis Blanchette, que vous voyez sur la photo ci-bas, s'interpose et est atteint. À mort.

Depuis, fusent aux quatre vents des commentaires sur le « moment de folie » ou sur « le geste politique et misogyne » du tireur (j'en suis). Selon des sources du Journal de Montréal, aux policiers qui l'interceptent, Bain baragouine que sa cible était Pauline Marois. Il n'acceptait pas « l'élection d'une femme indépendantiste. » Ses motivations sont pour le moins limpides et conscientes.

Une autre personne est gravement blessée. Et huit millions de Québécois sont écorchés. Blessés à vif. Blessés à vie. Le Québec ne sera plus jamais le même. Impression flottante et persistante de régression moyenâgeuse, de vivre dans un pays de brutes, humainement sous-développé.

Que le tueur terroriste soit déclaré sain d'esprit ou pas, une chose nous explose dans la tronche: cet homme carburait à la haine. De plus en plus, des gens carburent à la haine et à la peur d'autre. Et cela peut difficilement conduire à des attitudes d'ouverture, d'inclusion et de respect réciproques.

Allophobie, sexisme, racisme, misogynie, homophobie, toutes les attitudes haineuses sont les métastases d'une tumeur principale : la peur de l'autre, de la différence. Trop facile de dire « C'est un fou ! ». Cela donne bonne conscience. On se lave les mains, on tourne la page et on ne change rien. Et au prochain drame, on dit "Tiens... encore un fou". J'ai même entendu des commentaires sur l'emprise de la testostérone! De là à remettre au goût du jour l'hormone virile comme ingrédient justificatif de la violence et des viols, il n'y a qu'un pas. Extrêmement dangereux. À ne pas franchir.

Je ne nie pas que la folie existe. Je connais des fous et des folles. Des vrais. Qui se soignent. Je dis juste que la « folie soudaine » est devenue un fourre-tout pernicieux. Une échappatoire qui sclérose les démarches qu'une société et que nos décideurs doivent initier pour éduquer au respect, à l'ouverture, à l'accueil des différences ; qui empêche la mise en place de structures et de services d'aide aux personnes haineuses ; qui sous-estime la nécessité de programmes structurés d'éducation à l'amour.

La tristesse m'envahit. Je pense à Denis Blanchette, à sa fille, à ses proches, à ses amis et compagnons de travail.

Je pense aussi à Pauline Marois, non pas la première ministre, mais à l'être humain, à la femme . Il est certes plus facile de se remettre d'une élection minoritaire que de savoir qu'on doit peut-être sa vie à la mort d'un autre.

Je serai aux funérailles civiques de Denis Blanchette. Avec tous ceux et celles qui veulent un Québec libre de haine et de peur.

Pauline Marois prononce son premier discours en tant que première ministre

Attentat contre Pauline Marois

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