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Imam Hamza Chaoui: Denis Coderre à la rescousse d'un gouvernement impuissant

L'épisode entourant l'imam Chaoui a été extrêmement intéressant et on y a appris beaucoup. Notamment que le gouvernement du Québec s'est vu impuissant pour régler la question: soit autoriser ou interdire à un imam radical de prêcher à des enfants son idéologie extrémiste.
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Expérience intéressante sur ma page Facebook jeudi dernier alors que j'y posais une question, réservée à mes amis Facebook.

Devrait-il être permis à un imam radical islamiste de prêcher et d'endoctriner des jeunes au Québec dans un quelconque lieu (mosquée, centre communautaire, école)? Oui ou Non.

La question était très précise et faisait référence au cas de l'imam radical Chaoui qui veut enseigner à des jeunes à Montréal dans ce qu'il a désigné être un Centre communautaire (mais qui a plutôt des allures de lieu de prière). De plus, j'exigeais des gens, de limiter leur réponse à un Oui ou à un Non.

« Je ne peux pas répondre simplement par un Oui ou un Non », ont répondu quelques-uns d'entre eux. Pourtant, n'est-ce pas ce qu'on demande à nos gouvernements? Pas facile, hein? Bien habiles, les Québécois, pour placoter, mais lorsqu'il s'agit d'agir, de prendre une décision sur un cas bien précis, serions-nous plus exigeants envers nos gouvernements que nous ne le sommes envers nous-mêmes? Je comprends qu'on baigne dans une culture de sommets, de consultations, de compromissions et de « consensus social », mais à un moment donné, il faut agir, non? Il faut décider. Dans un sens ou dans l'autre. Allez. Un petit effort.

Autre critique reçue sur mon courriel sur la question: « Trop précis. On fait quoi avec les synagogues ou les églises "cathos" où on y prêche que l'homosexualité est un péché, par exemple? » Justement. La question ne porte pas sur des religions (ni catho, ni juive). Elle porte sur un gars qui veut se doter d'un lieu physique pour endoctriner les jeunes en répandant son idéologie islamiste radicale. Rien à voir avec les musulmans non plus. Il commence à être temps qu'on fasse la différence, là. Ça devient lassant d'avoir toujours à répéter que « musulman » n'égale pas « islamiste radical extrémiste ». On le sait. Et puis, aux dernières nouvelles, il n'y a pas de cathos, ni de juifs, ni de témoins de Jéhovah qui ont comme mission de terroriser les démocraties occidentales à coups de décapitations, d'actes barbares et de tueries injustifiables.

Enfin, la question n'était soumise qu'à mes amis Facebook, des gens qui normalement, ne sont pas des fans finis de la Charte de Bernard Drainville (plusieurs m'ont d'ailleurs quittée lors de ce merveilleux et édifiant épisode du mandat péquiste). « Une gang de colons libéraux », selon un abonné qui m'a donné cette semaine l'opportunité de le flusher. Cela dit, les gens qui s'intéressent à mes publications sur Facebook ont certainement une sensibilité aux libertés individuelles, à la notion que l'État est trop présent dans nos vies. Certains s'affichent comme libertariens, allergiques et méfiants de toute intervention de l'État en quoi que ce soit.

Et pourtant.

Le résultat

90% des répondants ont répondu « Non » à la question.

Pour cet échantillon de Québécois (355 répondants), une très forte majorité croit qu'il ne devrait pas être permis à un imam radical islamiste de prêcher et d'endoctriner des jeunes au Québec dans un quelconque lieu (mosquée, centre communautaire, école).

Surpris? Honnêtement, un peu. Mais agréablement surprise, en ce qui me concerne. Je me serais attendue à un 40-60. Il semble bien qu'en cette instance précise, l'on sache faire la différence entre la défense de la liberté d'expression et le besoin d'agir préventivement contre l'établissement d'un foyer d'endoctrinement et de radicalisation islamiste. Entre brimer la liberté d'expression d'un imam radical et celle de lui interdire d'enseigner à des jeunes.

N'y a-t-il pas, en effet, une différence entre dire « il a le droit d'exprimer dans l'espace public sa pensée sans subir de représailles » et « il a le droit de créer des lieux de radicalisation auprès des jeunes, faisant ainsi la promotion de la destruction de nos démocraties »? On interdirait des bonbons dans nos écoles, mais on permettrait que ce profil de personnage enseigne à nos jeunes? Dans des quartiers défavorisés en plus?

Le gars ne subira pas de représailles. Il ne sera pas poursuivi en justice, il n'ira pas en prison. On lui refuse tout simplement le droit d'occuper un local pour créer un foyer de contamination. Ces 90% de répondants jugent que les administrations publiques ont le droit de faire ça. La question de savoir comment demeurait un mystère... jusqu'à samedi matin.

C'est la Ville de Montréal qui a finalement tranché. Un maire d'arrondissement appuyé par le maire de Montréal Denis Coderre ont mis fin au débat samedi matin. La solution? Un règlement de zonage qui interdit l'établissement d'un nouveau lieu de culte à cet endroit.

À LIRE AUSSILettre à l'imam Hamza Chaoui- Savignac

Un gouvernement impuissant; un maire décisionnel

L'épisode entourant l'imam Chaoui a été extrêmement intéressant et on y a appris beaucoup.

  • Que le gouvernement du Québec s'est vu impuissant pour régler la question: soit autoriser ou interdire à un imam radical de prêcher à des enfants son idéologie extrémiste.
  • « Les seuls outils qu'on a, c'est de l'empêcher de faire la prière dans un lieu qui n'est pas destiné à faire la prière. [...] On ne peut pas se servir d'un centre communautaire pour transformer ça en mosquée », a expliqué franchement la ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault. En ce sens, la ministre Kathleen Weil avait bien raison; elle n'y pouvait rien.
  • Que ni la Charte des valeurs de Bernard Drainville ni les mesures déposées vendredi par le premier ministre canadien Stephen Harper n'auraient pu servir à « régler » le cas Chaoui.
  • Que selon ce qu'on a appris, l'imam en question a tenté de faire passer un lieu de culte pour un centre communautaire (brillante idée, me direz-vous).

Finalement, que le gouvernement travaille toujours à élaborer un projet de loi portant sur la neutralité de l'État et sur un Plan pour lutter contre la radicalisation, mais nous sommes en droit de nous demander dans quelle mesure ces initiatives en resteront au niveau des grands concepts (plutôt que de proposer des moyens d'intervenir concrètement lorsque le cas l'exige).

À propos de la liberté d'expression

Et puis, il y a cette précieuse liberté d'expression. Ils s'en trouveront pour dire que la décision du maire Denis Coderre est populiste, liberticide, contre les droits et libertés de la personne. Qu'arrivera-t-il au droit de critiquer l'État-providence? Les profs d'université de l'UQAM ne sont-ils pas eux-mêmes des agents de radicalisation? Pourquoi tolérer alors les marxistes communistes qui enseignent dans nos cégeps?

Cette propension à mettre toutes les expressions d'idéologies dans le même paquet exprime une certaine ignorance - du moins d'une incapacité à juger - en fonction d'un nouveau contexte mondial que doit confronter le monde occidental. Pas d'inquiétude, les amis. Ce gars-là a le droit d'exprimer son point de vue, bien sûr. Il ne sera jamais bâillonné ni jeté en prison pour avoir exposé sur Internet ou dans une université qu'il est contre la démocratie, contre l'égalité entre les femmes et des hommes, etc. J'ai même défendu dans le temps que des imams radicaux puissent venir d'ailleurs donner leurs conférences sur des lieux d'une université... et retourner chez-eux par la suite.

Ce que Chaoui demande toutefois, c'est un permis d'endoctriner des jeunes dans un lieu de prière (qu'il fait passer pour un centre communautaire). Tout est là.

Si on croit qu'une partie de la solution au radicalisme (qui résulte parfois dans des actes de violence et de terrorisme contre notre civilisation) réside dans la prévention, la détection et une lutte à la radicalisation, alors il faut plus que de la lexique, des voeux pieux et des théories du « bien vivre ensemble ».

Il faut des gestes. Et un de ces gestes, c'est certainement d'interdire qu'un imam que l'on reconnaît comme radical ne puisse obtenir un permis d'occuper un lieu de radicalisation et d'enseigner à nos jeunes le poison qui leur fera détester tout ce qui les entoure, en plus de miner leur chance de s'épanouir dans une société libre et démocratique.

Denis Coderre a jugé que cet individu était un «agent de radicalisation», «un fomenteur de tension sociale». Il a parlé d'un «cas de sécurité publique et d'ordre public» En lui interdisant d'endoctriner de jeunes esprits, c'est peut-être lui qui défend le plus nos valeurs, nos libertés et notre civilisation occidentale.

P.S. Les musulmans du Québec devraient se réjouir de la décision du maire.

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Avril 2018

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