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Les identités à fleur de peau

La diversité culturelle est une richesse qu'il faut protéger. Les rapprochements interculturels ne nécessitent-ils pas de laisser tomber ces identités à fleur de peau?
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On parle souvent de repli identitaire dans les pays occidentaux, du retour d'une vision conservatrice de l'identité nationale. Plusieurs évoquent avec raison la montée récente du populisme, de l'extrême droite, et de tout autre mouvement politique axé sur la préservation d'une culture homogène, peu ouverte à la diversité.

Il ne serait pas exagéré de dire que la dénonciation de cette vaste tendance fait actuellement partie du discours dominant.

Deux sujets de préoccupation font désormais consensus parmi l'élite : la xénophobie ambiante et les changements climatiques.

On observe pourtant que les replis identitaires sont exactement à l'image de la grande diversité qui prévaut désormais dans les sociétés modernes : ils sont pluriels.

Loin de se limiter aux peuples occidentaux, cette grande parade fait défiler les cultures des quatre coins du monde dans les rues des métropoles. Chaque communauté fait un peu l'étalage de son identité : souvent dans l'indifférence, parfois aussi dans une sorte d'hostilité silencieuse. La préservation d'un «vivre-ensemble» équilibré est l'un des grands défis que devront relever les démocraties au XXIe siècle.

Loin de se limiter aux peuples européens, tous les peuples du monde participent donc à cette véritable surenchère identitaire qui fait désormais partie du quotidien. Les identités sont à la mode : les symboles religieux sont d'ailleurs les accessoires tendance de cette recherche d'authenticité. Le bois rond des vieilles cabanes d'antan est subitement devenu le décor de restaurants branchés, tandis que les gens se réfèrent de plus en plus à leurs racines culturelles et même généalogiques. Nostalgie et désir d'enracinement : ce sont des mots qui traduisent cet engouement.

Le discours de certains représentants des communautés autochtones du Québec est d'ailleurs assez représentatif de ce grand retour sur soi. Récemment, les signataires d'un texte paru ici dans Le Huffington Post exprimaient grosso modo leur désir de voir les communautés autochtones renouer avec leur culture traditionnelle. Il ne faudrait pas abolir les réserves : il faudrait plutôt que les jeunes se réapproprient les codes culturels de leurs ancêtres. Les signataires de cette lettre proposent aussi de reconnaître l'attachement particulier qu'ont les Autochtones à leurs terres ancestrales.

Ce sont des propositions louables, mais qui ne sont pas sans conséquences. Si un groupe de jeunes Québécois proposait publiquement de faire renaître le catholicisme de leurs arrière-grands-parents pour se réapproprier leur mode de vie, quelle serait notre réaction?

Car partout dans cette lettre on fait subtilement l'éloge de traditions qui souvent n'existent plus : on les présente naïvement comme les meilleures garantes d'un avenir radieux.

Bien évidemment, les signataires en question ne sont pas les seuls à penser que la préservation d'une culture autochtone privée de l'influence occidentale représente la planche de salut de leurs communautés. Mais pourquoi ne pas plutôt parler de rapprochement lorsqu'il s'agit pour les Premières Nations de retrouver un sentiment d'appartenance envers le Canada? Le métissage implique le mélange, et non l'isolement.

La diversité culturelle est une richesse qu'il faut protéger. Il ne fait aucun doute que les contacts entre civilisations sont bénéfiques pour chacun de leurs représentants.

Dans cette perspective, on peut se demander si cette façon de penser ne contribuerait pas à éloigner les communautés les unes des autres. En Orient comme en Occident, chez les Autochtones comme chez les non-Autochtones, de nourrir le désir de retrouver une identité mythique ne contribue-t-il pas à créer un climat de tensions pouvant déboucher sur de réels conflits? Bien au contraire, les rapprochements interculturels ne nécessitent-ils pas de laisser tomber ces identités à fleur de peau?

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