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Redresser les salaires dans le secteur public

Nous avons raison de réclamer un redressement et de remettre en question les choix politiques effectués ces dernières années qui ont eu pour conséquence d'affaiblir le réseau public tout en gonflant un marché privé en parallèle. La population tient à son réseau public, accessible et universel.
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J'ai présidé, la semaine dernière, le conseil fédéral de négociation de la FSSS-CSN où les quelque 300 syndicats du réseau public de santé et de services sociaux étaient représentés. Nos syndicats y ont adopté une proposition qui sera soumise aux assemblées locales et qui servira de squelette aux prochaines négociations, en 2015. J'en sors plus convaincu que jamais que nous avons raison de réclamer un redressement et de remettre en question les choix politiques effectués ces dernières années qui ont eu pour conséquence d'affaiblir le réseau public tout en gonflant un marché privé en parallèle. La population tient à son réseau public, accessible et universel. Comme syndicat, nous avons une responsabilité de défendre ce joyau, qui fait l'envie du monde entier, malgré des ratés que nous avons collectivement le devoir de corriger.

Contrer le discours d'austérité

Les membres de nos syndicats sont d'abord et avant tout des citoyennes et des citoyens. Qu'elles soient infirmières, préposées, secrétaires, travailleuses sociales, etc., elles sont aussi des contribuables, des parents, des proches aidantes, des utilisatrices de services publics. Elles entendent ce qu'on dit à la radio ; elles lisent les chroniques dans le Journal de Montréal; elles voient nos politiciens à la télévision marteler la prétendue nécessité de poursuivre sur la voie de l'austérité budgétaire. Je ne suis donc pas étonné qu'elles soient nombreuses à questionner notre capacité à changer le cours des choses, à questionner la capacité du Front commun à négocier un rattrapage salarial après des décennies d'appauvrissement que nous subissons, car nos salaires dans le secteur public augmentent beaucoup moins rapidement que l'inflation.

Il me semble que, dans des discussions rationnelles, la plupart des gens acceptent l'idée que demander une hausse de 4, 5 % par année, ce que demande le Front commun, est légitime. La population en général reconnaît l'importance de notre travail et sait que nous ne sommes pas reconnus à notre juste valeur. Ce qu'on nous oppose toujours, c'est un argument extérieur, soit la situation des finances publiques. Bref, nos demandes seraient légitimes... mais pas raisonnables ! Ce ne serait pas le bon moment pour formuler de telles demandes...

Le bon moment

Sauf que, si nous attendons le jour où le gouvernement nous dira spontanément : « ça y'est, on a des marges de manœuvre pour vous reconnaître à votre juste valeur, nous sommes prêts à vous entendre », bien il n'arrivera jamais, ce jour-là. C'est que sur nous-mêmes que nous devons compter. Ce discours d'austérité qu'on entend partout ces jours-ci, les gouvernements qui se succèdent nous le servent depuis plus de 30 ans. Je me souviens des libéraux dans les années 90, l'heure était à l'État Provigo, il fallait «dégraisser»... Et le gras c'était nous, les salarié-es, évidemment. Puis vinrent les péquistes et Lucien Bouchard. Là, c'était la priorité au déficit zéro. C'était encore une fois aux salarié-es de l'État qu'il fallait en faire porter le fardeau. Nous avions protégé notre pouvoir d'achat en 1999, mais le retard avec les autres secteurs, qui obtenaient plus que l'inflation, continuait de grandir. Puis, ce fut le tour de Jean Charest, sa réingénierie, son penchant pour la privatisation ainsi que Monique Jérôme-Forget et sa sacoche qu'elle brandissait en conférence de presse pour balayer à la blague nos demandes légitimes. Ces libéraux-là allaient aggraver le problème décrétant d'un coup de baguette deux ans de gel salarial total et nous imposant des reculs dans les conventions collectives, et ce, en période d'importante croissance économique !

En 2010, nous avons renoué avec la négociation et conclu une entente, au sortir d'une crise économique. Le Québec s'en est mieux sorti que d'autres, rappelons-nous, justement à cause d'un filet social tissé plus serré et d'un meilleur partage de la richesse ici, qu'aux États-Unis, notamment. Cette entente qui viendra à échéance dans neuf mois, encore une fois, ne nous aura pas permis de retrouver notre pouvoir d'achat.

En 2010, comme en 2005, en 1999 et avant, l'État martelait n'avoir aucune marge de manœuvre. Pourtant, ce même gouvernement posait des choix politiques quelques mois plus tard qui montrèrent qu'il avait bel et bien une importante marge de manœuvre. En font foi, notamment, les augmentations substantielles consenties aux médecins, en 2011, ainsi que les revenus dont il a choisi de se priver, par exemple la diminution de la taxe sur les gains en capital. Cette seule mesure prive l'État de centaines de millions en revenu depuis ce jour, alors que 50 % de tous les gains en capital au Canada ont été accaparés par des personnes déclarant des revenus annuels de plus de 250 000 $. Bref, pour moi, pour la FSSS-CSN, il s'agit d'abord et avant tout d'une question de choix politiques. Il en va de même de la façon dont on administre les ressources disponibles qui n'est pas toujours optimale. Pensons seulement à nos politiques du médicament.

Mobilisation tous azimuts

Les prochaines négociations du secteur public ne seront pas faciles. Elles ne le sont jamais. Quant au contexte qui l'entoure, la conjoncture, la situation des finances publiques, ne perdons jamais de vue qu'il s'agit d'une construction idéologique. C'est un portrait qu'on nous brosse à partir d'une petite partie de l'équation. Il y aurait beaucoup d'autres moyens d'équilibrer les finances publiques que de sabrer dans les services à la population. Le Front commun travaille d'ailleurs actuellement à identifier certaines de ces autres voies possibles.

Ce que les libéraux souhaitent vraiment, au-delà de l'équilibre des finances publiques, c'est de nous limiter, les syndicats, dans notre capacité d'action en tentant de convaincre nos membres que ce qui est légitime n'est pas raisonnable. Ils voudraient nous domestiquer, nous rendre dociles afin d'imposer leurs choix politiques. Cela n'arrivera pas. L'heure du redressement a véritablement sonné. C'est maintenant que ça se passe ! Tous nos choix de négociation ont été faits en tenant compte de notre priorité absolue, soit le redressement salarial et nous nous mettrons en marche rapidement afin de contrer ce discours de morosité dans la population et mettre en avant une autre vision de nos services publics. Une vision de solidarité, une vision de pérennité, une vision de modernité.

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