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Élections américaines: l'urgence de débattre des inégalités sociales

Avant de se préoccuper des peurs des autres, ceux qui ont payé le prix des traités de libre-échange ont voté pour le seul candidat qui reflétait leurs préoccupations quant au manque de travail.
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Quelle semaine! Jusqu'à mercredi dernier, j'avais en tête de faire mon billet hebdomadaire sur l'état de désarroi du personnel du réseau de la santé et des services sociaux. La situation au CHU Sainte-Justine, que Radio-Canada a mise au grand jour le lundi matin n'est qu'une autre indication de ce qui se passe dans le réseau et que le ministre Barrette ne veut absolument pas voir.

Mercredi soir et jeudi derniers, je me suis dit qu'avec tout ce qui se passe ici comme dans le reste du monde, il faudrait élargir les horizons.

Donc, sur la situation des travailleuses et travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux, je vais me limiter aux commentaires que j'ai faits sur ma page Facebook lundi soir. J'aurais beaucoup plus à dire évidemment, mais je reviendrai sur ces questions incontournables dans un prochain billet.

Les élections américaines

Je suis assez impressionné des réactions des proches, des connaissances, voire des Américains aux résultats des élections présidentielles de mardi soir. Avant de me coucher mardi, j'avais rassuré ma douce moitié qu'elle pouvait avoir confiance avec l'état du vote à ce moment-là (le Wisconsin, le Michigan et la Caroline du Nord penchaient pour Clinton et l'ouest restait à venir), que Trump ne gagnerait pas. Vers 3 heures mercredi matin, je me suis levé pour me pointer à la salle de bain. Quelle fut ma surprise de voir une faible lumière à côté de moi. Lumière d'un téléphone qui allume un tout petit peu le visage de ma blonde.

«Que fais-tu, chérie?»

«Il a gagné! Ça ne se peut pas, il a gagné! Comment....?»

Je me suis dit, «bon, on a beaucoup de travail à faire encore, mieux vaut ne pas manquer trop de sommeil.»

Par contre, à haute voix j'ai plutôt dit: «tu as raison, c'est incroyable». J'ai surement ajouté quelques absurdités avant de m'endormir à nouveau.

Le nombre d'amis et de connaissances qui, comme ma blonde, n'ont pas ou peu dormi mardi et mercredi est incroyable.

Les résultats de cette élection démontrent l'urgence de tenir un débat de fond sur les politiques qui accroissent les inégalités sociales.

Il est encore tôt pour faire l'analyse complète des résultats de cette élection. Mais voici quelques constats rapides sur le vote de mardi soir. D'abord, les gens ne se déplacent jamais en aussi grand nombre pour voter contre quelque chose ou quelqu'un que pour voter pour quelque chose. Les deux partis à la fin de la campagne invitaient le monde à se rendre aux urnes pour éviter le pire, une victoire de l'autre candidat.

Comme les deux vieux partis, les médias ont aussi mal calculé la profondeur de la colère de l'électorat américain. Le New York Times l'a bien dit:

«Nous n'avons pas su capter la colère bouillante d'une partie de l'électorat trahie par une reprise économique très sélective, par des ententes commerciales qui menacent des emplois, en plus de se sentir dépréciée par Washington, Wall Street et les médias.»

Si je suis issu d'une minorité aux États-Unis (particulièrement mexicaine ou arabe), j'ai sûrement assez peur. Si je suis une femme aux États-Unis, j'ai toutes les raisons du monde pour être très préoccupée (en plus d'être en colère et d'avoir peur) par les commentaires misogynes du président élu.

Une remise en cause profonde

Nous assistons à une remise en question générale de la politique traditionnelle. Lors des primaires, les républicains se sont «débarrassés» de 16 candidats, dont les préférés de l'establishment qui ont vite disparu. Le parti démocrate, de son côté, a réussi à maintenir dans la course finale leur candidate de l'establishment, malgré une campagne extraordinaire de Bernie Sanders.

Qu'est-ce qui a fait la différence dans cette élection? C'est une question très compliquée. Je ne prétends pas être un expert. Mais une observation, si je peux me permettre. Un premier coup d'œil sur la carte électorale permet de constater que les États qui étaient la base manufacturière des États-Unis pendant le 20e siècle (Pennsylvanie, Wisconsin, Ohio, Michigan) ont voté en faveur de Donald Trump, lui qui a promis de déchirer deux traités de libre-échange (celui entre les États-Unis, le Mexique et le Canada; ainsi que le Partenariat transpacifique).

Les élites politiques et économiques tentent de mettre de l'avant les bienfaits de ces traités depuis le passage à la Maison-Blanche de l'autre Clinton. Les travailleuses et travailleurs moyens qui ont payé le prix de ces traités depuis maintenant 20 ans ont voté pour le seul candidat présidentiel qui reflétait leurs préoccupations quant au manque de travail! Il pouvait être en désaccord avec plusieurs de ses positions qui font peur aux autres groupes. Mais c'était le seul candidat dans ce système bien tranché de deux partis qui parlait de mettre un «X» sur ces traités.

Avant de se préoccuper des peurs des autres, une partie importante des électeurs de ces États a décidé de s'occuper de leurs conditions d'existence d'abord (ce que la plupart du monde fait, d'ailleurs, une fois rendu dans l'isoloir).

On peut bien penser que Trump ne fera pas ce qu'il a dit quant aux traités de libre-échange. Cependant, pour une tranche importante de la population américaine, il n'y avait pas d'autres offres sur la table (eh oui, je sais que le Parti vert avait des propositions dans ce sens, mais encore une fois, jusqu'à maintenant, le système américain est un système à deux partis).

Bien sûr qu'il faut être préoccupé par la condition des femmes, des minorités et des travailleurs. Mais pour ça, il faut enfin tenir un vrai débat sur les intérêts de Monsieur et Madame Tout-le-monde. Les résultats de cette élection démontrent l'urgence de tenir un débat de fond sur les politiques qui accroissent les inégalités sociales.

En terminant, ce qui me frappe aussi, ce sont les similitudes entre Donald Trump et Gaétan Barrette. Soyons clairs, je ne parle pas ici du racisme et de la misogynie de M. Trump. Je parle plutôt du fait que les deux hommes sont suffisants et mégalomanes. Il semblerait qu'on aime nos hommes politiques de même ces temps-ci. Une autre raison d'être préoccupés!

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