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Ma critique paléontologique de Jurassic World

Les «dinosaures» desont des monstres dans tous les sens du terme! Ils n'ont pas été reconstitués d'après les données paléontologiques actuelles, c'est bien dommage...
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Les «dinosaures» de Jurassic World sont des monstres dans tous les sens du terme! Ils n'ont pas été reconstitués d'après les données paléontologiques actuelles, c'est bien dommage... En tant que paléontologue, je suis donc très déçu, car je m'attendais à des dinosaures scientifiquement valides. Or, c'est loin d'être le cas.

jurassic world critique

Les vélociraptors

Certes, Jurassic World n'est pas un documentaire sur les dinosaures, c'est une fiction, mais les producteurs auraient pu au moins montrer des dinosaures tels que nous, paléontologues, les concevons aujourd'hui.

À la place, nous voyons des sauropodes avec des cous en S, des raptors sans plumes, des stégosaures avec la queue qui traîne au sol, bref des reconstitutions has been qui ont des décennies de retard.

C'est d'autant plus surprenant que les producteurs ont embauché un paléontologue comme conseiller scientifique: il s'agit de Jack Horner, que je connais bien... Je ne comprends pas. Cette négligence est-elle volontaire de la part des producteurs? Est-ce un moyen de capter l'attention des nouvelles générations en montrant alors des images archaïques de dinosaures? Il me semble que oui, car Jurassic World prend bien soin d'enterrer Jurassic Park, qui n'est d'ailleurs plus qu'une ruine, un vestige dans le film. Même le personnage qui joue le jeu d'un ancien fan passe pour un has been! On dirait que les producteurs massacrent le premier cycle pour mieux imposer un nouveau. Or, faire table rase du passé ne mène à rien, surtout pour un paléontologue. En fait, c'est plutôt un retour en arrière!

jurassic world

Les ornithomimidés

Les exemples sont malheureusement nombreux dans le film et je ne suis pas le seul paléontologue ou féru de dinosaures à pointer du doigt ces erreurs: les ornithomimidés, ces «dinosaures-autruches» qui courent dans la plaine, possèdent des dents, ce qui est absurde.

Ils ont aussi des bras plaqués au corps alors que nous savons qu'ils étaient plutôt détachés du corps. Les raptors - encore eux - ont une pupille verticale alors que nous les reconstituons depuis des années avec une pupille ronde, comme les oiseaux, pour justement rappeler leur étroite parenté.

Même le T-Rex est une déception. Je le trouve moins bien que ses versions précédentes. Plus pataud. Sa tête est beaucoup trop large à l'arrière.

En fait, la liste est longue! Mais parlons aussi des côtés positifs du film, car il y en a tout de même! Je trouve que la CGI (imagerie assistée par ordinateur) donne de très beaux rendus. Les textures au niveau dermique sont particulièrement réussies. Certes, c'est une prouesse technique plus qu'un respect scrupuleux des données scientifiques, mais elle est notable. Les mouvements des dinosaures et autres reptiles sont bien faits. Même s'il a une taille démesurée, le Mosasaure, cette sorte de varan réadapté au milieu aquatique, nage avec des mouvements fluides et coordonnés.

jurassic world video

Le Mosasaure

J'ai aussi trouvé très intelligente la première scène du film, où deux grosses pattes griffues et écailleuses se posent sur le sol. La caméra recule et on s'aperçoit alors qu'il s'agit d'un corbeau! Voilà une scène astucieuse qui nous rappelle que les oiseaux sont des dinosaures à plumes!

Paradoxalement, c'est le dinosaure imaginaire, le vrai monstre, qui me semble le plus bluffant. L'Indominus rex est plutôt bien profilé. Il a une démarche assez rapide de bipède, une texture intéressante avec des ostéodermes (structure d'écailles) au niveau de l'échine et sur le dos. Sa peau apparaît même un peu visqueuse et évoque bien les céphalopodes avec lesquels il est censé partager quelques gènes dans l'histoire. Bien sûr, ce mutant ne tient pas la route scientifiquement parlant, mais je crois que c'est celui que je préfère... peut-être justement parce qu'il est «vendu» comme un monstre et non pas un dinosaure!

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L'Indominus Rex

J'ai bien aimé aussi les équipements du parc. C'est intéressant de constater qu'au-delà des engins épurés genre gyrosphère dont on se demande parfois comment ils fonctionnent, le parc dispose de reconstitutions holographiques et de réalité augmentée, des outils également utilisés dans la vraie vie! L'année dernière par exemple, le zoo de Bordeaux-Pessac a réalisé une première mondiale en présentant des raptors en 3D et en réalité augmentée dans un enclos, comme s'ils étaient vivants! Plus vrais que nature, ces raptors reconstitués par le talentueux Marc Boulay interagissaient avec les visiteurs grâce à une intelligence artificielle et une arborescence de comportements. J'ai moi-même validé ces comportements et les reconstitutions de ces Utahraptors avec mon collègue américain, James Kirkland.

Pour finir avec Jurassic World, il ne s'agit donc pas d'une suite mais d'un nouveau cycle, avec des dinosaures ratés. Vu les recettes, déjà les producteurs annoncent un numéro 2 en clamant cette fois qu'ils seront plus respectueux des données paléontologiques... Espérons qu'ils tiennent leur promesse!

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