Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Le Breturn ou la mort de l'Europe politique

Certaines personnalités politiques britanniques, françaises ou d'autres États membres pensent utile, au débat actuel sur l'avenir de l'Union, de laisser penser que le référendum britannique du 23 juin dernier serait un «référendum pour rire» qui pourrait soit être «corrigé» par un nouveau vote , soit être «discrètement» ignoré par les autorités politiques britanniques.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Le "Breturn" (mot-valise composé de Britain et de Return), autrement dit le "retour" du Royaume-Uni dans l'UE au cas où il reviendrait d'une manière ou d'une autre sur son vote en faveur du Brexit. Ce serait la fin de l'Europe politique. Certaines personnalités politiques britanniques, françaises ou d'autres États membres (comme les autorités polonaises) pensent utile, au débat actuel sur l'avenir de l'Union, de laisser penser que le référendum britannique du 23 juin dernier serait un "référendum pour rire" qui pourrait soit être "corrigé" par un nouveau vote , soit être "discrètement" ignoré par les autorités politiques britanniques.

Certes, d'après le droit britannique, il n'est pas juridiquement contraignant, et le parlement britannique pourrait ne pas en tenir compte. Mais politiquement il est impossible de ne pas prendre en compte le vote de plus de 17 millions de Britanniques en faveur du Brexit.

Il n'est pas sûr du tout que les conséquences économiques du Brexit soient catastrophiques pour l'Union européenne, voire pour le monde entier, comme la crise financière de 2008. Du fait de tout le travail de consolidation et de réformes bancaire et financière opérées en Europe depuis la crise de Lehman Brothers, cet alarmisme ne paraît pas justifié.

Demander un nouveau vote, c'est revenir sur la nature même de la démocratie.

Cette attitude ne tire pas les conséquences du référendum français de 2005 et du contournement réalisé alors par les chefs d'État et de gouvernement au travers du traité de Lisbonne en 2007.

Le résultat du vote sur le Brexit renforce la possibilité de victoires du populisme en Europe que ce soit lors du nouveau vote pour l'élection présidentielle autrichienne de septembre 2016, du référendum institutionnel en Italie d'octobre 2016, de l'élection législative de mars 2017 aux Pays-Bas ou de la présidentielle française de mai 2017. Méconnaître la volonté du peuple britannique, aux motifs qu'il serait mal informé ou insuffisamment éduqué, conduirait à une vague populiste qui pourrait amener ses représentants au pouvoir en Europe. En effet, tout retard pris sur la sortie effective du Royaume-Uni de l'Union européenne ne pourra que renforcer les forces politiques, qui, en France, mènent campagne pour une sortie, qu'elles prétendent indolore, de l'Union européenne et de l'euro.

Demander un nouveau vote. C'est revenir sur la nature même de la démocratie: la minorité respecte le choix opéré par la majorité sans pouvoir le remettre en cause. La mobilisation doit être réalisée avant l'élection ou le vote.

Des leçons peuvent être tirées du Brexit

Quant au déroulement des consultations démocratiques. Comment soumettre au référendum une question aussi difficile que celle de l'appartenance d'un État à un ensemble de traités comme les traités européens, question qui pose des difficultés multiples avec des réponses très diversifiées, voire contradictoires? Les partisans de la procédure référendaire sont des adeptes de la démocratie émotionnelle "à l'arrache", proposant des solutions simples à des questions compliquées.

Quant aux relations entre l'Union européenne et ses États membres. Les chercheurs britanniques s'inquiètent du tarissement du financement de leurs recherches. Les ressortissants britanniques en Irlande du Nord s'inquiètent de leur prospérité économique à venir, articulée sur un processus de pacification largement financé par l'Union européenne. Plus que la mondialisation qui serait imposée par Bruxelles, c'est le gouvernement britannique conservateur qui a choisi de désindustrialiser le Royaume-Uni au profit d'une économie de services et de ne plus investir dans les services publics. Finalement, le Brexit est l'occasion de constater que l'Union européenne est instrumentalisée par certains gouvernements pour compenser les coûts sociaux d'une politique libérale qu'ils mènent tout en externalisant le financement de compensations versées aux perdants de leur politique sur une Europe, à la fois bouc émissaire et subventionnaire.

Le Royaume-Uni doit maintenant jouer le jeu et se donner les moyens de sortir de l'Union européenne avant le prochain renouvellement des députés européens et de la Commission européenne en mai 2019. Tout retard excessif (c'est-à-dire au-delà de la désignation en septembre prochain du futur Premier ministre britannique) conduira à une perte de confiance totale de nos partenaires économiques mondiaux (États-Unis, Chine, Japon, Russie, etc.) dans la capacité de l'Europe à jouer un rôle d'acteur prédominant des relations internationales. Comment négocier avec une entité politique et commerciale qui n'arrive pas à définir qui sont ses membres?

God bless Europa!

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

BRITAIN-EU/PROTESTS-LONDON

Manifestation anti-Brexit à Londres

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.