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«Dirty Harry» à la Maison-Blanche

Quel est le parallèle entre Donald Trump et Harry Callahan, l'inspecteur imaginé par Clint Eastwood? Les deux ont une attitude ambivalente à l'égard de la Loi, plus précisément envers l'État.
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« Les gens ont tous une opinion, comme ils ont tous un trou-de-cul. » - Clint Eastwood

Je reviens cette semaine sur le cas de Donald Trump. Beaucoup ont déchiré leur chemise en lisant trop rapidement mon dernier billet où j'aurais associé Trump à Jésus Christ. Relisez bien mon texte : en aucune manière, je ne dis que Donald Trump serait une sorte de Jésus réincarné ! Je soutenais seulement que Trump bouscule l'ordre établi, l'establishment, et que, de la sorte, on le démonise. Il devient une sorte de bouc émissaire, une victime de la meute, tout comme cela s'est produit avec Jésus, et comme c'est également arrivé à Socrate. Comme disait l'autre, «cause toujours, je ne t'écoute plus...» Si j'ai évoqué Jésus et Trump, au grand désarroi de plusieurs, c'est que, dans sa théorie du bouc émissaire, René Girard fait de Jésus un cas exemplaire marquant un tournant dans la violence mimétique.

Qui est donc Donald Trump? Les médias et les bien-pensants, c'est-à-dire les fameux «experts» qui pullulent dans les médias, n'ont rien compris aux électeurs américains qui ont porté au pouvoir Donald Trump. Ce qui a joué en faveur de l'élection de ce dernier, c'est justement ce que l'électeur type de Trump déteste au plus haut point, à savoir l'hypercompétente qu'est Hillary Clinton. La candidate défaite symbolise la quintessence de ces agents fédéraux qui veulent, selon l'électeur type trumpien, embrigader la sacro-sainte LIBERTÉ des citoyens américains. Pour ces derniers, selon la jolie formule du regretté Pierre Falardeau, la liberté n'est pas une marque de yogourt.

Tant qu'on n'aura pas compris cette réalité fondamentale culturelle américaine, on n'aura rien compris au ras de marée qu'a constituée l'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis.

Pour fixer les idées, j'irai du côté du cinéma américain. J'épinglerai un célèbre réalisateur qui fut aussi un acteur remarquable: Clint Eastwood. Je songe en tout particulier à la série-culte Dirty Harry (Harry le charognard), dans laquelle Eastwood joue le rôle de l'inspecteur Harry Callahan. Qui est ce Harry Callahan? Un être taciturne, solitaire, rebelle, doué d'un sens aigu de la justice, obstiné, parfois obtus, toujours en rébellion contre ses supérieurs, eux qui représentent l'ordre, la norme, le «manuel d'instruction»; bref, la Loi.

L'inspecteur Callahan a un rapport ambigu avec Loi, et tous les autres petits règlements miteux et pitoyables. Il entre toujours en conflit avec ses supérieurs sur des questions légales. Il doit se plier aux techniques policières, lesquelles s'adossent aux chartes de la personne. L'inspecteur Callahan est un représentant de la loi, certes, mais c'est surtout est un adepte de l'«auto-justice». Callahan ne fait pas confiance au système de judiciaire. Ses supérieurs lui répètent ad nauseam: «Harry on en a assez de vos méthodes... Vous ne pouvez pas aller quelque part sans déclencher un massacre. Essayez de vous tenir tranquille et sachez que vous n'avez qu'une chose à faire : obéir aux ordres!» Mais l'intéressé, c'est immanquable, se rebiffe toujours.

Trump est Callahan devant les chefs symbolisés par Hillary Clinton et Washington. Tout comme Callahan, Trump enfreint les ordres des représentants de l'État fédéral. L'inspecteur a un sens instinctif du danger, inexplicable et infaillible. Ses supérieurs lui reprochent d'ailleurs de ne tenir compte que de son instinct au détriment des preuves et des faits (evidence, facts). D'où, pour l'administration de Trump, les «faits alternatifs» tant décriés par ses opposants.

Tout ce qui vaut pour l'inspecteur Harry Callahan, vaut pour Donald Trump. Lui aussi a une attitude ambivalente à l'égard de la Loi, plus précisément envers l'État. Il va au-delà de l'État. Comme disait Louis XIV, L'État, c'est moi. En fait, l'État - les «supérieurs» de Trump-Callahan - brime Trump dans sa liberté. Non pas qu'il soit injuste, ou qu'il souhaite être injuste, mais il veut lui-même faire justice. Ce point est d'une importance capitale si l'on peut saisir quoi que ce soit la posture du 45e président.

L'homme d'État libertarien est d'abord et avant tout un homme vertueux, principalement dans l'exercice de la liberté. Cet homme est si libre, qu'il peut se permettre des gestes ou des attitudes moralement répréhensibles en regard des bonnes mœurs.

Le président a horreur de se soumettre à la Loi ou à l'État, de sorte qu'il a tendance à être lui-même la Loi ou l'État. La sacro-sainte LIBERTÉ, d'un libertarien comme Trump, est à ce prix.

Pour ce dernier , la liberté n'est plus comme telle un droit, mais une vertu éminente. On ne naît pas libre, on le devient. Le législateur n'est plus un simple fonctionnaire aussi compétent qu'on le voudra, tel Hillary Clinton ou Obama. Ce n'est surtout pas un simple exécutant. L'homme d'État est d'abord et avant tout un homme vertueux, principalement dans l'exercice de la liberté. Cet homme est si libre, qu'il peut se permettre des gestes ou des attitudes moralement répréhensibles en regard des bonnes mœurs.

Les anti-trumpistes rappellent avec virulence, voire avec hargne, au l'«inspecteur» Trump: «Donald on en a assez de vos méthodes... Vous ne pouvez pas aller quelque part sans déclencher un scandale. Essayez de vous tenir tranquille et sachez que vous n'avez qu'une chose à faire : obéir aux ordres! », Mais Donald «Callahan» Trump leur répond en leur montrant un joli doigt d'honneur ! Assurément, la liberté n'est pas une marque de yogourt en Amérique.

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