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«Passe-Partout», un mois plus tard...

Il y a plusieurs leçons à retenir de ce grand retour au petit écran...
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Télé-Québec

Voilà maintenant un mois qu'une nouvelle génération de poussinots et de poussinettes a été introduite à l'univers de Passe-Partout. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que Télé-Québec a frappé un grand coup avec cette nouvelle mouture qui, depuis, fait le bonheur des enfants comme des parents.

Après les inévitables aprioris d'une génération surprotectrice de ses souvenirs d'enfance, le deuil qu'ont dû faire les puristes de la queue de cheval de Cannelle, la voix d'Alakazou qui sonne un peu trop comme Paul Piché aux prises avec le rhume des foins, et certaines réactions (très hâtives) concernant les questions d'inclusion et de diversité culturelle au coeur de l'émission, force est d'admettre qu'il y a plusieurs leçons à retenir de ce grand retour au petit écran.

Au rythme de l'enfance

Passe-Partout est venue changer la donne dans le paysage télévisuel québécois en démontrant, dans un premier temps, que ce qui est souvent proposé ces jours-ci aux enfants en matière d'émissions jeunesse — surtout sur le plan des dessins animés — se colle davantage à la cadence et à la vision que les adultes cherchent à imposer à la prochaine génération.

L'excellent documentaire Won't You Be My Neighbor? (2018), portant sur la vie des plus inspirantes de l'Américain Fred Rogers et de la mythique émission Mister Rogers' Neighborhood, abondait également dans ce sens.

Dans sa quête infinie de bonté, d'amour et d'empathie, Fred Rogers était convaincu qu'il était possible d'entretenir un dialogue avec un enfant par l'entremise de la télévision sans avoir à le surstimuler, qu'il n'avait qu'à traiter celui-ci comme son égal pour qu'il s'intéresse aux messages et aux leçons qui lui étaient présentés.

Et Fred Rogers n'était pas du genre à passer par quatre chemins, lui qui osait parler de sujets assez durs comme la Guerre du Vietnam, l'intimidation, les assassinats politiques et le racisme avec son très jeune auditoire.

Évidemment, Passe-Partout est loin d'être aussi radicale dans sa proposition que Fred Rogers — et n'a aucunement besoin de l'être —, mais se rapproche néanmoins de cette idée importante voulant que ce soit l'adulte qui, par l'entremise de la télévision, ait à s'adapter au rythme de l'enfant, à s'adresser à lui dans ses mots, à se mettre à sa hauteur, et non l'inverse.

Un détail que plusieurs créateurs de contenu oeuvrant sur YouTube ont aussi assimilé depuis un certain temps, usant d'images simples et de répétitions pour accumuler les visionnements auprès des plus jeunes internautes.

Lorsque Télé-Québec a annoncé le retour de Passe-Partout, la question se posait à savoir comment le public d'aujourd'hui réagirait face à une émission au style aussi singulier, proposée dans une grille-horaire où plusieurs dessins animés ne dépassent désormais plus la barre des 15 minutes.

En comparaison avec les Pat'Patrouille et Robocar Poli, pour ne nommer que ceux-là, le ton posé et le rythme patient de Passe-Partout peut carrément passer pour de la Slow TV.

Et pourtant, la magie opère toujours.

La formule n'a aucunement changé, l'émission alterne entre les leçons, les histoires et les chansons de Passe-Partout, Passe-Montagne, Passe-Carreau et leurs amis, le récit familial et les amitiés de Cannelle et Pruneau, des images d'animaux, mais aussi d'enfants se développant dans un monde dans lequel le jeune téléspectateur peut se reconnaître automatiquement.

Au coeur d'une réalité où tout va de plus en plus vite, il y a toute une leçon à tirer de la vue d'un enfant interpellé et captivé au plus haut point par une scène montrant une fillette de son âge bricolant avec des feuilles mortes — et non seulement divertie, voire distraite, par les images défilant sous ses yeux.

Un équilibre enfin retrouvé

Les décors et les marionnettes ont beau avoir changé, les interprètes aussi, Passe-Partout demeure quelque chose de très spécial. Les producteurs l'ont bien compris en traitant le matériel original comme une troupe de théâtre rejouerait aujourd'hui un texte de Shakespeare: avec plus de moyens techniques, mais en respectant l'essence du texte d'origine.

Nos enfants pourraient très bien parler de cette nouvelle mouture dans une vingtaine d'années avec la même étincelle dans les yeux que celle qu'ont pu avoir leurs parents en contribuant eux-mêmes à l'habile campagne promotionnelle ayant précédé l'arrivée en ondes de l'émission.

Mais le plus grand défi en cette ère d'hyper accessibilité à tout, partout et en tout temps, était de ne pas dénaturer cette proposition unique, invitant petits et grands à évoluer au même rythme deux fois par jour, pendant un peu moins de 30 minutes.

D'ailleurs, malgré les différentes plateformes de diffusion, Passe-Partout semble inviter les téléspectateurs à faire un saut dans le temps et à privilégier l'écoute en direct — et à se questionner quant à l'usage du temps d'écran alloué aux enfants. Peut-être afin de conserver l'aura mythique et le sens profond de ce rendez-vous que l'enfant et le parent peuvent attendre tous les jours avec impatience.

Cela peut aussi expliquer pourquoi certaines images se répètent au fil des émissions, annonçant certains thèmes à venir tout en amenant l'enfant à travailler sa mémoire et à faire les liens adéquats. Bref, comme une leçon enseignée à la maison, à la garderie ou à l'école.

L'idée n'est évidemment pas de dire ici qu'il faudrait privilégier une émission plus pédagogique, infiniment plus participative, comme Passe-Partout au détriment d'un divertissement comme Pat'Patrouille et autres émissions de sauvetages, par exemple. Les deux ont un rôle à jouer, des notions à inculquer, et se complètent d'une certaine façon.

Car Passe-Partout a comblé un vide en revenant à des méthodes qu'il aurait été facile d'appréhender et de juger vétustes avant la diffusion du premier épisode, le 25 février dernier, et en présentant un univers réaliste aux jeunes téléspectateurs d'aujourd'hui.

Et le simple fait qu'un diffuseur a eu la volonté de nous rappeler, avec les meilleures intentions, ce que nous avions pu oublier ou tenir pour acquis, mérite d'être souligné.

Passe-Partout est diffusée quotidiennement à 7h30, et du lundi au mercredi à 18h, sur les ondes de Télé-Québec.

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