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Sans volonté politique, pas d'indépendance possible

J'ai pris connaissance des conditions émises par Paul Saint-Pierre Plamondon pour le déclenchement d'un référendum sur l'indépendance. Je respecte sa volonté, mais sa proposition d'asseoir ce déclenchement sur une volonté populaire conséquente mène à tout sauf à l'indépendance.
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J'ai pris connaissance des conditions émises par Paul Saint-Pierre Plamondon pour le déclenchement d'un référendum sur l'indépendance. Il faudrait selon lui que 20 % des électeurs du Québec signent un registre réclamant la tenue de ce référendum, soit 1,2 million de personnes, et qu'un sondage gouvernemental à large échantillon démontre qu'au moins 45 % des répondants souhaitent voter Oui.

Je respecte la volonté de notre collègue candidat d'asseoir le déclenchement d'un référendum sur une volonté populaire conséquente, mais il me semble que sa proposition mène à tout sauf à l'indépendance.

Il lui manque deux ingrédients indispensables : le leadership et la volonté politique.

Il ne faut pas se conter d'histoire, si l'indépendance du Québec pouvait surgir d'une volonté populaire réelle et déterminée - un peu comme celle des peuples des États baltes n'attendant que le départ des tanks russes pour se libérer -, alors notre indépendance serait faite depuis au moins un demi-siècle.

Nous sommes plutôt en présence d'un peuple coincé dans une impasse politique néfaste, mais qui, comme le disait René Lévesque, n'est pas le goulag. Sortir le Québec de cette impasse, lui faire franchir l'étape de l'indépendance, demande un acte de volonté politique fort et déterminé, de la part des indépendantistes eux-mêmes.

Dans un dialogue avec une citoyenneté dont, en ce moment, un quart seulement est fermement indépendantiste, puis un autre quart est nationaliste, le mouvement souverainiste doit fixer un objectif ferme, mais raisonnable, travailler méthodiquement pour l'atteindre, mobiliser, engager des cohortes toujours plus grandes dans le mouvement, puis inviter la population à franchir le pas.

Nous avons failli être indépendants en octobre 1995. Peut-être, d'ailleurs, avons-nous gagné ce référendum.

J'y étais, aux côtés de Jacques Parizeau, comme conseiller à la stratégie référendaire. Il aurait été impossible, à l'époque, de réunir un million de signatures dans un registre. À plusieurs reprises, dans l'année entre l'élection de septembre 1994 et le référendum d'octobre 1995, les sondages montraient la souveraineté sous la barre proposée des 45 %. Les conditions proposées par Paul n'auraient pas été réunies.

«Il n'est pas interdit d'être habile », disait Jacques Parizeau. Oui, mais il est interdit, si on veut réaliser l'indépendance, d'être immobile.

Jacques Parizeau avait préparé minutieusement le terrain pendant les six années précédentes. Puis il avait fixé l'objectif et, contre vents et marées, s'y était tenu. Et il y avait des vents. Et il y avait des marées. Un jour de mars 1995 alors que nous étions dans un creux de vague, que les sondages étaient pourris, que plusieurs de nos alliés suppliaient le premier ministre d'annoncer qu'il était possible qu'il n'y ait pas de référendum, il nous demanda, à quelques conseillers réunis dans son bureau : « Y a-t-il encore quelqu'un au Québec qui veut un référendum en 1995? »

Je lui répondis : « Je crois qu'ils sont tous dans cette pièce, M. le premier ministre. »

Il savait qu'une fois les préparations faites, il faudrait, certes, s'adapter à la conjoncture, négocier, transiger. Mais, disait-il souvent avec son rire communicateur : « Pour la souveraineté, la maison est prête à tous les sacrifices. »

À tous, sauf à celui de fléchir dans la volonté politique d'atteindre l'objectif. Car il savait que sa détermination à tenir un référendum était la clé de la totalité de la mobilisation. Hésiter sur l'objectif, une fois fixé, c'était s'assurer d'échouer.

Une grande leçon que j'entends appliquer à la lettre.

Ma proposition de prendre les six années qui nous séparent de 2022 pour se préparer, diffuser nos arguments, convaincre la jeunesse, rassurer les aînés, faire d'importantes percées chez les non-francophones, est animée par un objectif clair : demander aux électeurs en octobre 2022 le mandat de réaliser l'indépendance, puis le faire dans le mandat qui s'ouvrira à ce moment-là.

Sans cette échéance, rien ne se fera. Sans volonté politique, le statu quo peut dormir tranquille.

« Il n'est pas interdit d'être habile », disait encore M. Parizeau. Oui, mais il est interdit, si on veut réaliser l'indépendance, d'être immobile.

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