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Cerveaux de gauche, cerveaux de droite (1/3)

Nos préférences politiques sont-elles le produit de notre biologie, de notre cerveau ou simplement de l'environnement dans lequel on est éduqué? Dans cette série d'articles, j'explore ces questions en discutant des résultats d'études qui se sont penchées sur le sujet au cours des dernières années.
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Nos préférences politiques sont-elles le produit de notre biologie, de notre cerveau ou simplement de l'environnement dans lequel on est éduqué? Dans cette série d'articles, j'explore ces questions en discutant des résultats d'études qui se sont penchées sur le sujet au cours des dernières années.

Les questions entourant l'étude scientifique des préférences politiques sont complexes. L'une des nombreuses difficultés réside dans la définition des termes gauche et droite. Beaucoup d'études sur le sujet proviennent des États-Unis, un pays où l'axe politique droite/gauche est très différent de celui qui a cours au Québec. Au Québec, la droite nous parle surtout de liberté et d'économie. Aux États-Unis, la droite est morale: elle s'intéresse aux questions d'avortement, de mariage homosexuel et aux questions militaires, entre autres. Il faut donc être prudent lorsque l'on interprète une étude qui identifie des différences entre ces groupes. Les études considèrent rarement les contextes nationaux dans lesquels ces préférences politiques s'expriment. Mais les résultats demeurent tout de même intéressants.

Les chercheurs en psychologie utilisent généralement des questionnaires qui sont envoyés à de larges portions de la population leur posant des questions sur leur style de vie et leur orientation politique. Ils cherchent ensuite les liens qui peuvent exister entre les variables colligées et les préférences politiques.

L'une des variables les plus intéressantes ayant été reliée aux préférences politiques est la sensibilité pour le dégoût. Dans une étude de 2011, Yoel Inbar et ses collègues ont analysé les réponses de plus de 30 000 répondants à 25 questions reliées au dégoût (1). Par exemple: «Vous buvez à un verre et réalisez qu'il avait été utilisé par quelqu'un d'autre. Évaluez votre niveau de dégoût face à cette situation sur une échelle de 0 (Pas dégoûtant) à 4 (Extrêmement dégoûtant) ». Le résultat de cette étude et d'autres similaires est que les gens à tendance politique plus conservatrice montrent une sensibilité plus grande pour le dégoût, même sur des questions qui ne sont pas reliées à la politique (2). Ces études sont intéressantes puisqu'elles établissent un lien entre les choix politiques et une émotion dont on connait un peu plus les fondements neurobiologiques.

Il y a un peu plus d'un an, un groupe de chercheur s'est intéressé aux régions du cerveau connues pour leurs liens avec le dégoût et ont tenté d'établir si des différences dans la structure de ces régions pouvaient être associées aux préférences politiques (3). Typiquement dans ces études, on mesure pour chaque région du cerveau la « quantité de matière grise », littéralement. Cette mesure peut être obtenue par un scan d'imagerie magnétique. Le volume de la matière grise indique l'épaisseur et la densité de la couche de neurones dans une région donnée. On interprète généralement qu'une plus grande quantité de matière grise est reliée à une utilisation plus importante de la région, bien que cela soit en fait très difficile à vérifier pour chacune des études.

L'étude a établi que certaines différences existaient entre les cerveaux des gens à tendance conservatrice par rapport à d'autres à tendance plutôt à gauche. L'une des observations intéressante est le fait que le volume de matière grise dans l'amygdale semble légèrement plus grand chez les conservateurs. Tel qu'illustré dans la photo ci-dessous (4), l'amygdale est une région profonde du cerveau. Cette région est connue pour être activée par la peur et le dégoût.

La corrélation qui a été trouvée entre le volume de matière grise dans cette région et le conservatisme est faible. Par exemple on ne pourrait pas simplement regarder le cerveau d'une personne et deviner avec énormément de précision son orientation politique. Cependant l'étude suggère que des différences subtiles au niveau de l'anatomie du cerveau pourraient être reliées aux préférences politiques.

Ces études soulèvent plusieurs questions. D'abord, quel est le lien de causalité? Est-on plus conservateur parce que l'on a, a priori, une tendance au dégoût ou l'inverse? Les différences au niveau des régions du cerveau étaient-elles présentes avant le développement des préférences politiques, dans l'enfance, ou sont-elles le résultat de l'adoption de ces choix politiques?

Ces questions n'ont toujours pas encore été étudiées. Entre temps les chercheurs bénéficient d'un éventail d'autres méthodes pour évaluer les liens entre la biologie, la psychologie et l'orientation politique. L'une de ces méthodes permet d'établir si certains traits, comme l'orientation politique, peuvent être hérités génétiquement. J'aborderai ce sujet dans mon prochain article.

Bibliographie

1. Inbar Y., Pizarro D.A., Lyer R., Haidt J. (2012) Disgust sensitivity, political conservatism, and voting. Social Psychological and Personality Science 3:537-544.

2. Inbar Y., Pizarro D.A., Bloom P. (2009) Conservatives are more easily disgusted than liberals.Cognition and Emotion 23:714-725.

3. Kanai R., Feilden T., Firth C., Rees G. (2011) Political Orientations Are Correlated with Brain Structure in Young Adults. Current Biology 21:677-680.

4. Image provenant de Amber Rieder, Jenna Traynor et Geoffrey B Hall, publiée sur Wikipedia.

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