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Réquisitoire pour la permanence de notre indignation

Sachez qu'ils comptent sur notre indignation éphémère, qu'ils savent que le gaz de schiste ou le pétrole sur l'île d'Anticosti, que la fermeture d'Aveos, malgré la loi, que les coupes à l'ACDI, la fermeture de 37 des 40 agences environnementales, les coupes à Radio-Canada ou à Téléfilm, que les grèves étudiantes, la violence dans nos rues, ils savent que le peuple passera à autre chose, ils comptent là-dessus.
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Ouf... Le climat social est étouffant. De toute part, les indignités se bousculent et, coincée dans l'embouteillage des causes à défendre, la voix des justes indignations est enterrée. Nous étions des centaines de milliers au son des cloches des églises à marcher au fond, pourquoi, sinon que pour la justice, que pour l'avenir, sinon que pour faire de notre société une meilleure société, pour faire de nous de meilleurs humains.

Ceux qui criaient dans la rue des slogans de détermination ou de solidarité, ceux-là qui utilisaient la foule pour devenir plus grands, pour se sentir moins petits, n'étaient pas présents pour différentes raisons malgré ce qu'on nous aura dit. Les syndiqués d'Aveos, les étudiants, les environnementalistes, tous marchaient pour l'avenir, tous proclamaient la société dont ils rêvent et tous dénonçaient les errements de la société actuelle. L'exploitation des richesses sans le développement des richesses, sans le partage des richesses, voilà contre quoi nous avons marché. Une chance pour tous, des conditions de vie les meilleures possible dans un environnement sain sans frein à l'éducation, l'humain avant le profit, voilà pour quoi nous avons marché. Et notre voix était belle et forte. Et les enfants un peu partout dans la foule souriaient et les gens rassemblés voulaient faire la différence, voulaient que commence quelque chose de mieux. Une marche qui se terminerait par un signal de départ.

Mais les gouvernements ne voulaient pas nous entendre. D'ailleurs, ils n'ont même pas fait semblant de nous entendre, ils nous ont tourné le dos. Les représentants élus du peuple l'ont ignoré sans gêne et sans conséquence. De toute façon, ils n'avaient besoin que d'une journée. Une journée, à peine 24 heures, à être obligé d'éviter les questions sur les demandes des manifestants. Et puis, on peut passer à autre chose. À la corruption, à la discussion entre Serge Savard et Patrick Roy, aux faits divers, au Gala Artis, aux négociations entre les étudiants et Line Beauchamp. Et tranquillement, le 22 avril s'estompe sans suite.

Sachez qu'ils comptent sur notre indignation éphémère, qu'ils savent que le gaz de schiste ou le pétrole sur l'île d'Anticosti, que la fermeture d'Aveos, malgré la loi, que les coupes à l'ACDI, la fermeture de 37 des 40 agences environnementales, les coupes à Radio-Canada ou à Téléfilm, que les grèves étudiantes, la violence dans nos rues, ils savent que le peuple passera à autre chose, ils comptent là-dessus.

Nous avons maintenant grâce aux réseaux de nouvelles en continu, aux réseaux sociaux et à Internet en général, accès aux informations instantanément. Faut-il que nos rêves, nos colères, nos aspirations et nos indignations soient eux aussi instantanés?

Au moment où j'écris ces lignes, une foule est rassemblée devant la Chambre des communes pour dénoncer la motion M-312 qui, une fois votée, créerait un comité parlementaire majoritairement conservateur chargé de trouver des façons de contourner les arguments médicaux, légaux et constitutionnels permettant l'accès à l'avortement. Un comité pro-vie. Anti-choix. Le député Woodworth -étrange comme c'est toujours des hommes qui s'en prennent aux droits des femmes chez les conservateurs- prétend que sa motion vise à moderniser la loi canadienne de 400 ans... Canada's 400 year old definition of human being, précise son site Internet unilingue. Une motion nauséabonde basée sur des prémisses absurdes et qui risque de passer au grand plaisir des groupes pro-vie, grands amis du gouvernement fédéral. Que l'Assemblée nationale ait voté unanimement contre tout retour en arrière en matière de libre-choix, le gouvernement fédéral s'en fout, comme il se fout de la position du Québec sur le registre des armes à feu, sur la loi sur les jeunes contrevenants ou la Commission des valeurs mobilières.

Nous avons la responsabilité de prendre ces indignités, de prendre ces insultes et d'en tirer une indignation que nous devrons préserver. En cette ère de l'instantané, nous devons défendre la permanence de nos valeurs, de nos convictions et de nos idéaux. Pour que ceux qui ont marché hier, la semaine dernière, il y a dix ans, ceux qui marchent aujourd'hui et ceux qui marcheront demain, nous poussent à avancer. Plus que jamais, il faut appliquer notre devise et particulièrement quand viendra le temps de voter...

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