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C’est quoi le problème avec les zoos? Ce sont des cages pour vous divertir

Les zoos sont hautement problématiques pour tous ceux et celles qui prennent sérieusement les intérêts et sensibilités des animaux en considération.
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Nils Fieseler via Pixabay

Les zoos sont des institutions controversées pour ceux et celles qui prennent sérieusement en considération les intérêts et sensibilités des animaux non humains. Pourtant, la question des zoos ne semble pas occuper une place centrale dans la réflexion militante du mouvement de libération animale (dite antispéciste) et par extension, chez la population en général.

Je propose ici un point de départ qui pourrait servir à une éventuelle réflexion plus exhaustive chez ceux et celles qui me liront.

Une institution de divertissement

Ce point de départ, c'est la prise de conscience que cette institution appartient avant tout au monde du divertissement. Dans ce contexte, il pourrait être légitime de penser que la priorité des zoos n'est pas l'intérêt des animaux non humains, comme seraient la conservation des espèces, ou l'éducation à la population.

Cet argument s'appuie sur le fait que d'une part, les zoos eux-mêmes le reconnaissent (de manière plus ou moins explicite, toutefois), et d'autre part, l'observation de leurs dépenses (argument économique). Les zoos eux-mêmes reconnaissent l'orientation principale de leur institution:

«Les zoos et aquariums reconnaissent qu'ils compétitionnent avec les autres institutions et entreprises de divertissement, et croient qu'ils doivent satisfaire les attentes et demandes pour le marché de masse du divertissement s'ils veulent continuer d'attirer une clientèle (traduction libre).Par David Nibert. «ZooBiz: The Conservation of Buisiness?», dans «Animal oppression and capitalism», volume 2 (2017).

L'esprit de ce discours est aussi présent chez nous au Québec, avec le Zoo de Granby:

«Une fois que la planification stratégique sera complétée, dans une dizaine d'années, le zoo de Granby envisage d'ajouter des dimensions culturelles et géographiques des pays d'où viennent les 1000 animaux provenant de 180 espèces abrités sur son territoire de 405 000 mètres carrés. Objectif: enrichir l'expérience des visiteurs», indique Mme Lalumière.

Des animaux comme appâts?

Il faut comprendre dans cette citation que l'expression «expérience des visiteurs» relève très certainement d'une attention particulière liée à sa clientèle: le zoo doit être attrayant, divertissant et doit être considéré penser en fonction de ses visiteurs. Du même coup, les animaux sont considérés simplement de manière périphérique, ou de manière instrumentale, pour l'attrait de la clientèle.

Si on s'attarde un peu sur l'argument économique par les dépenses des zoos, on se rend compte que c'est un peu difficile de croire qu'ils aient réellement à cœur (ou comme priorité) «de jouer un rôle majeur dans la préservation de la biodiversité», tel qu'affirmé par l'Association mondiale des zoos et aquariums dont fait partie le Zoo de Granby.

En effet, selon un article de The New York Times:

«[...] L'Association des Zoos et Aquariums (AZA) estime que ses membres ont donné moins de 2% de leur budget d'exploitation pour les activités de terrains liées à la conservation pour les animaux sauvages en 2010 - environ 134 millions de dollars US.»

Si par «préservation de la biodiversité» l'AZA sous-entend la «conservation pour les animaux sauvages», le moins de 2% est assez évocateur en termes de priorité de dépense et, par le fait même, nous dévoile l'orientation que les zoos donnent à leur institution.

Ceci dit, par souci de rigueur, il leur faudrait clarifier la signification de ces deux expressions: «préservation de la biodiversité» et «conservation pour les animaux sauvages» pour connaître leur niveau de correspondance, car elles peuvent susciter un questionnement légitime sur les prétentions des zoos et sur l'impact réel qu'ils ont sur la préservation des espèces et/ou de la biodiversité.

Nigel Swales

Qu'est-ce qu'on enseigne exactement?

D'autres questions peuvent aussi être soulevées quant à la prétention des zoos à l'éducation, et plus particulièrement celle des enfants. Que veut-on réellement enseigner aux enfants sur les animaux quand on expose ces derniers dans des cages et qu'on les observe tout en prenant une bouchée dans un hot-dog, dans des environnements qu'ils ne leurs sont pas naturels et qui, dans plusieurs cas, provoquent stress et dysfonctions psychologiques? Quelle perception voulons-nous que les enfants développent des animaux et quels types de rapports devrions-nous avoir avec ceux-ci?

Et bien, si nous voulons offrir aux enfants (et aussi aux adultes) une éducation qui favorise le respect des autres animaux dans toutes leurs complexités, nous avons de bonnes raisons de croire que non seulement les zoos n'incarnent pas une telle démarche, mais en plus, ces derniers y sont antinomiques.

Les philosophes canadiens Sue Donaldson et Will Kymlicka (auteurs de Zoopolis: Une théorie des droits des animaux) mentionnent entre autres - en se référant aux travaux du psychologue Gail Melson - que les jeunes enfants reconnaissent naturellement les autres animaux comme étant des êtres pleinement conscients et possédant l'autonomie de mener leur propre existence. Ils les conçoivent aussi de manière plus égalitaire et entretiennent avec ceux-ci une plus grande proximité.

Inversement, les zoos contribueraient à accentuer chez les enfants (voire chez adulte) l'idée d'une importante séparation entre l'humanité et les autres animaux. Au lieu de percevoir ces derniers dans ce qu'ils ont en commun avec nous dans le spectre animal, on enseigne tacitement à les percevoir davantage dans leurs différences. On agrandit ainsi à l'écart entre l'animal humain et non humain...

Avec les éléments qui vous ont été présentés dans ce texte, il est possible de comprendre plus en profondeur un point de vue plus critique sur le concept de zoo et la relation critiquable qu'il entretient d'une part avec les individus animaux via leur «conservation» et d'autre part, avec la population en général par le biais de l'«éducation». J'ai bien dit «individus animaux» au lieu d'«espèces», car ce dernier occulte à mon sens le fait de considérer les animaux en tant qu'êtres sensibles et conscients, ayant des préférences, comme des sujets ayant droit à la liberté et à la vie.

Pour les militant.es animalistes qui saisissent en profondeur l'antispécisme, ces propos sont suffisants pour comprendre que les zoos n'ont plus leur place dans notre société, tels qu'ils sont imaginés à l'heure actuelle. Pour les autres, la critique du zoo peut constituer une porte d'entrée permettant la révision de ses aprioris envers l'autre, c'est-à-dire l'animal non humain.

Ce texte a été écrit dans la foulée de l'organisation d'une vigile antispéciste par les groupes d'activistes Mouvement de Libération et Actions Antispécistes Sherbrooke, le 29 juillet prochain, près du Zoo de Granby, de 11h à 14h.

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