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Sommes-nous tous des imbéciles?

Il semble être plus important d'accorder des bonis aux médecins que de s'occuper de la surcharge de travail, du manque de personnel et du fait que nos vieux sont maltraités par le système.
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J'ai été parmi les premiers a féliciter Gaétan Barrette sur les médias sociaux pour l'entente négociée avec la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) . Finalement, je me rends compte que c'était bien trop beau pour être vrai.

L'entente prévoit que l'application de la future loi 20 est suspendue pour les membres de la FMOQ s'ils réussissent a donner les services d'un médecin de famille à un minimum de 85% de la population du Québec tout en observant un taux d'assiduité de 80%. Ils ont jusqu'au 31 décembre pour ce faire, sans quoi la loi 20 leur sera imposée. Jusque là, tout va bien. Les omnipraticiens semblent être en mesure de faire ce pourquoi vous et moi défrayons leur salaire, c'est-à-dire prendre soin de nous. Salaire qui, soit dit en passant, est raisonnable.

J'ai entendu le ministre Barrette dire à plusieurs occasions que sa préoccupation première est le patient. Or, force est d'admettre que l'entente conclue avec les omnis semble en tous points respecter cette affirmation. C'est là mal connaître le fin politicien qu'est en peu de temps devenu Gaétan Barrette. Son passage à la Fédération des médecins spécialistes du Québec a fait de lui un bon négociateur. Le négociateur et le politicien partagent certaines habilités, et il semble que le Dr Barrette excelle dans ces deux rôles. En fouillant un peu plus, on apprend que cette entente inclut une somme non négligeable de 25 millions de dollars.

Bizarrement, ce montant est égal à celui qui était dédié à ce que nous appelons maintenant la «prime Bolduc». Cette prime était versée pour la prise en charge de nouveaux patients. Malgré le fait que la fameuse prime semble toujours exister, le ministre de la Santé affirme, en précisant ne pas jouer avec les mots, que ce n'est pas une prime mais plutôt, et je le cite, «une valorisation pour la prise en charge d'un patient». Soit que nous sommes tous imbéciles et ne comprenons pas la différence entre une prime et une «valorisation», ou que c'est lui qui nous prend tous pour des imbéciles.

Cette «valorisation» sera remise au médecin pour l'inscription du nouveau patient. Cela implique que l'omni devra rencontrer le patient, poser des questions, faire un bilan de santé et expliquer comment la clinique fonctionne», a-t-il dit. Cela pour un tarif de «valorisation» qui varie de 100 $ à 200 $.

Cet aspect sera précisé dans une entente à venir avec la FMOQ. Le directeur des communications de la Fédération aurait même dit que cela ressemble à la fameuse prime Bolduc, tout en ajoutant que les médecins y ont droit car cet argent leur appartient. Tout de même audacieux comme déclaration.

Mais le mépris envers les contribuables ne s'arrête pas là: il ajoute que ce ne sont pas de gros montants. Je vous rappelle que ces petits montants totalisent un tout petit 25 millions ! Et, tant qu'à être prétentieux, celui qui est payé pour communiquer la position des médecins affirme que 100 $ ou 200 $ par patient ne change rien en ce qui concerne la situation financière d'un médecin qui gagne 260 000 $ par année. Si tel est le cas, pourquoi les médecins de famille tiennent-ils tant à cette prime?

Pendant que des dizaines de milliers de personnes œuvrant pour le réseau de la santé se préparent à un refus du gouvernement envers leurs demandes salariales, sommes toutes raisonnables, la FMOQ et le ministre de la Santé se réjouissent de cette entente qui augmente une fois de plus notre cynisme et notre méfiance face à la classe politique.

Imaginez un peu combien d'infirmières, infirmières auxiliaires et de préposées aux bénéficiaires le gouvernement aurait été en mesure d'embaucher avec ce petit extra versé aux médecins. Même les «vieux» auraient peut-être été en mesure de recevoir plus d'un bain par semaine. Comment puis-je même imaginer cela? Il semble être plus important d'accorder des bonis aux médecins que de s'occuper des «vraies affaires» comme la surcharge de travail, le manque de personnel, le fait qu'il y a de plus en plus de postes à temps partiel, que nos vieux sont maltraités par le système lui-même, et que les employés du réseau tombent comme des mouches.

Pourquoi est-ce ainsi? Le fait qu'un ministre est aussi médecin peut-il influencer certaines décisions? Bientôt cette présomption trouvera sans doute plus de sens et de crédibilité, car je prévois que la Fédération des médecins spécialistes du Québec en arrivera aussi à une entente avec monsieur le ministre. Ne restera ensuite à ce gouvernement qu'a fermer la porte au visage des dizaines de milliers de pères et mères de famille qui tiennent le réseau à bout de bras, d'une réforme et d'un ministre à l'autre. Martin Coiteux viendra en aide à Gaétan Barrette en soulignant la capacité de payer des contribuables. Philippe Couillard, dans un élan de solidarité, nous demandera encore une fois de faire notre part afin d'assainir des finances publiques que lui et d'autres ont contribué à rendre déficitaires.

Je commence a croire que certains de nos politiciens nous prennent pour des imbéciles.

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