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Les ultimes rêves d'un père qui affronte la mort

À moins que les docteurs et les chercheurs ne trouvent un traitement miracle aussi vite que possible, on dirait bien que je n'aurai bientôt plus de temps pour tout faire. Je suis atteint de sclérose latérale amyotrophique (SLA).
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Il y a quelques années, si vous m'aviez demandé quels étaient mes rêves, j'aurais dit : traverser l'Atlantique en solitaire, faire du wakeboard dans la mer de Salton, ou bien faire le tour du monde dans un hélicoptère plaqué or, vêtu d'un manteau de vison blanc. Si vous me reposiez la question aujourd'hui, cette liste serait bien différente (à part pour le manteau en vison). Et il ne s'agit plus d'une simple liste, mais du temps qu'il me reste. À moins que les docteurs et les chercheurs ne trouvent un traitement miracle aussi vite que possible, on dirait bien que je n'aurai bientôt plus de temps pour tout faire. Je suis atteint de sclérose latérale amyotrophique (SLA).

Il y a deux ans, à l'âge de 35 ans, j'étais chef d'entreprise et je voyageais dans le monde entier. Ma famille, deux adorables filles et ma ravissante et merveilleuse épouse, était à la fois ravie et épuisée. Et maintenant? Je ne peux plus remuer que quelques doigts, je suis incapable de faire un pas tout seul, et je passe mes journées dans un fauteuil roulant, pendant que ma femme et mes enfants me nourrissent comme un bébé (ou un roi, tout dépend de la façon dont on voit les choses). D'ici quelques semaines à peine, les choses iront encore un peu plus mal. Je ne sentirai même plus le goût des aliments, parce que je serai nourri par voie intraveineuse. Je ne veux déprimer personne. Après tout, j'ai été très heureux, en dépit de mes problèmes. Mais je veux vraiment peindre un tableau réaliste de la vitesse à laquelle la vie peut changer, même lorsque tout va pour le mieux.

Vous vous demandez peut-être quel est le rêve le plus fou d'un homme qui doit regarder la mort en face dans la fleur de l'âge. La réponse est simple, et c'est sans doute un cliché : aimer et être aimé. Et puisqu'il est presque impossible de définir l'amour, laissez-moi vous expliquer les trois moyens, simples, que j'ai trouvés.

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1. M'accepter tel que je suis

Même les gens les plus équilibrés ont envie de s'améliorer. Alors si vous ressemblez ne serait-ce qu'un peu à la personne que j'étais, vous n'avez sans doute pas encore atteint tous les buts que vous vous fixiez. Certains de vos amis ont plus de succès que vous, vos frères et sœurs sont plus attirants... Mais quand on fait face à la mort, on apprend vite à être plus indulgent. Il n'y a rien de tel qu'une maladie en phase terminale pour vous donner envie de revivre vos expériences, les plus fabuleuses comme les plus décevantes, de pouvoir à nouveau ressentir de la douleur, de la culpabilité, de l'amour et de la joie. Vous délecter de tout cela, de la vie, avec ses hauts et ses bas. J'aime tout cela, et j'aime l'homme que je suis devenu. Y compris dans les moments les plus gênants, et il y en a eu beaucoup.

2. Donner de l'amour

Nous aimons tous plein de gens. Plus ou moins. Nous avons tous un voisin complètement dingue, un ami de longue date qui nous tape parfois sur les nerfs, une tante trop bavarde. Et quand nous sommes avec eux, nous oublions souvent de les aimer. Nous nous laissons piéger par les adjectifs que nous leurs collons, et notre amour s'en trouve dilué. Quand vous arrêtez de le diluer, il devient plus chaleureux et lumineux. Tout comme les gens autour de vous.

3. Regarder autour de soi

Depuis le diagnostic, ma vision du monde ressemble parfois à celle d'un étudiant défoncé. Je vois la beauté et l'amour tout autour de moi, depuis les pleurs de mes filles jusqu'au sourire de mon épouse, en passant par les longues et chaudes journées de la saison estivale au Texas. Je vis chaque moment au ralenti, je vois chaque détail, et je leur fais de la place pour me créer des souvenirs. Rien qu'aujourd'hui, une libellule est venue se poser sur mon bras, et puisque je ne peux plus la chasser, j'en ai profité pour la regarder, posée là, avec ses grands yeux noirs qui me fixaient. Quelle étrange et magnifique créature.

Oui, j'ai bien une liste de choses que j'aimerais accomplir, mais j'ai du mal à les qualifier de rêves. J'aimerais pouvoir assister aux mariages de mes filles, me précipiter à l'hôpital en pleine nuit pour la naissance de mes petits-enfants, ouvrir la bouteille de vin que nous gardons pour notre vingtième anniversaire de mariage, et prendre soin de mon épouse lorsqu'elle sera vieille. Je place tous mes espoirs dans un traitement miracle pour faire toutes ces choses que l'on appelle la vie.

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Ce blogue initialement publié sur le Huffington Post États-Unis a été traduit de l'anglais.

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