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Sylvie Paquette chante Anne Hébert

Avec son album «Terre originelle», c'est le retour aux grands courants bibliques qui ont nourri la culture et l'imaginaire de l'auteure des.
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Cet article est d'abord paru sur le site de Jacques Gauthier.

Je me souviens de Sylvie Paquette, elle devait avoir 18 ans. C'était au début des années 80. J'étais animateur au Café Chrétien à Sainte-Thérèse-de-Blainville. Un soir, Sylvie était venue avec sa guitare, et sa mère, je crois, pour nous partager sa quête de joie. La passion était au rendez-vous, la voix aussi. Que de chemin parcouru depuis!

De Jésus à Anne Hébert, pourquoi pas? Avec son album Terre originelle, c'est le retour aux grands courants bibliques qui ont nourri la culture et l'imaginaire de l'auteure des Songes en équilibre. Le poème Amour, qui n'est pas sans rappeler le souffle mystique du Cantique des Cantiques, ouvre magnifiquement l'album. La chanteuse, avec juste ce qu'il faut de fragilité et de maturité dans la voix, s'approprie les mots d'Anne Hébert pour en faire sa substance, comme s'ils coulaient dans ses veines. «Toi, la vigne et le fruit; toi, le vin et l'eau; toi, le pain et la table, communion et connaissance aux portes de la mort».

Ces deux-là étaient faits pour se rencontrer. Et il y a eu connexion, contact du dedans. Femmes discrètes et libres, les images oniriques de l'une épousent parfaitement les atmosphères musicales de l'autre. Elles habitent la «terre originelle» de leurs rêves, endormies au «cœur de la parole» pour mieux nous faire entendre le silence du mystère de la «commune blessure». «Tous les beaux visages du monde / En leur innocence première / Furent baignés de larmes».

Avec la collaboration d'Yves Desrosiers et de Philippe Brault, la chanteuse a créé des atmosphères qui respectent l'univers intimiste du poète. Elle ne se met pas de l'avant, mais laisse parler les mots de l'intérieur, comme s'ils étaient sa maison: «Mon cœur est rompu / L'instant ne le porte plus». La vibration de son grain de voix imprime dans l'âme une trace qui vient d'ailleurs. Car cette «terre originelle» n'est pas tant le territoire natal que cet état vierge en nous, qui nous habite en permanence, telle l'enfance retrouvée.

Après les Douze Hommes rapaillés de Gaston Miron, après les albums de Chloé Sainte-Marie sur d'autres poètes d'ici, j'ai reçu les chansons de Terre originelle comme «des bouquets de joie» intemporels. Tout est soigné, sensible, vrai. Un travail de longue haleine qui effleure ma peau à chaque écoute pour mieux toucher le cœur.

En ce centième anniversaire de la naissance du poète à Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier le 1er août 1916, voici donc la rencontre de deux artistes où la vie de l'une s'écoule en celle de l'autre pour croiser la nôtre, au-delà des genres et des modes, où «le jour n'a d'égal que la nuit». À écouter surtout le soir, lorsqu'on se sent dans «les ravins de fatigue». Et l'absence devient alors présence.

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