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Pourquoi un déficit?

Vous ne trouvez pas curieux, vous, que personne ne parle jamais d'équilibrer les finances publiques en utilisant le seul moyen connu, légal et, surtout, moral: que chacun paie sa juste part d'impôt?
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Depuis le retour des Fêtes, les médias et chroniqueurs de la scène économique et politique ne cessent de parler du prochain budget fédéral, qui sera le premier du nouveau ministre des Finances, Bill Morneau.

Curieusement, personne n'en parle autrement qu'en tentant d'estimer le déficit que pourrait atteindre ce premier budget: 10, 20, 25 milliards de dollars? Plus encore?

Certains ont même consulté Bay Street, le cœur financier du Canada, pour savoir à combien il devrait se chiffrer, quel serait le montant acceptable par les gens d'affaires. Ceux-ci, semble-t-il, pourraient s'accommoder d'un déficit de 25 milliards, sous prétexte que «tant qu'à en faire un, allons-y et faisons-en un bon!»

Pendant tout ce temps, je me demandais... Pourquoi un déficit?

Loin de moi les idées et valeurs des conservateurs: je suis trop content qu'ils ne soient plus au pouvoir. Mais pourquoi le gouvernement fédéral devrait-il faire un déficit? Pour relancer l'économie? Pour qu'elle roule en grand? Pour cela, il n'y a pas trente-six solutions: l'économie va rouler si ceux qui ont l'argent la réinjectent, la réinvestissent.

«C'est exactement ce que veut faire Trudeau avec son déficit: remettre de l'argent en circulation!», disait le commentateur à la radio.

C'est vrai, mais il ne prend pas le bon moyen: il va l'emprunter, alors qu'il pourrait aller le chercher par l'impôt.

Vous ne trouvez pas curieux, vous, que personne ne parle jamais d'équilibrer les finances publiques en utilisant le seul moyen connu, légal et, surtout, moral: que chacun paie sa juste part d'impôt?

J'entends déjà des voix s'égosillant: «On paie déjà trop d'impôt!» Mais répéter qu'on en paie trop sans s'arrêter à qui paie combien par rapport à ses avoirs, ça ressemble plutôt à un discours servant à cacher la réalité de ceux qui en profitent!

Je suis d'accord pour dire que certains en paient trop, mais d'autres, définitivement pas assez. C'est pourquoi je dis que tout le monde ne paie pas sa juste part d'impôt.

Mais comment peut-on déterminer cette juste part? Un principe simple: en fonction de la capacité de payer. Tu as plus de revenus, tu en paies plus; tu en as moins, tu en paies moins.

Trop simpliste? Pour qui? Pour ceux qui en ont beaucoup et qui ne paient pas leur juste part?

Attardons-nous seulement à ce que les médias rapportent. Par exemple, Forbes, un magazine économique américain, publie chaque année une liste qui peut donner le vertige (ou la nausée, c'est selon) des personnes les plus riches sur la planète. Pendant qu'un milliard de personnes dans le monde vivent avec moins de 1,90 $ par jour, sa liste 2015 des milliardaires nous permet de faire connaissance avec chacune des personnes possédant des milliards de dollars. On peut même trier la liste selon certains paramètres, dont le pays. C'est ainsi que l'on apprend qui sont les 39 milliardaires canadiens et que leur fortune est évaluée à 134,7 milliards de dollars US (196,6 milliards de dollars canadiens, selon le taux de change actuel).

Si on ajoutait à cette liste les 1,14 million de millionnaires canadiens qui, vu leur grand nombre, doivent bien avoir un pécule total non négligeable, on arriverait sans doute à un assez joli montant qui pourrait être sensiblement plus imposé.

Doit-on rappeler, au passage, que ce sont nos gouvernements qui ont réduit pendant des décennies le nombre d'échelons et les taux d'imposition des revenus des particuliers, et qui ont créé les fiducies familiales, les CELI, des abris fiscaux permettant à tous ces riches individus de ne pas payer leur juste part d'impôt sur leurs revenus et d'accumuler leur richesse?

Quant aux sociétés, Statistique Canada révélait que les entreprises canadiennes sont assises sur plus de 600 milliards de dollars qu'elles n'investissent pas. Doit-on encore rappeler que nos gouvernements, qui ont baissé leurs impôts au cours des dernières décennies, ont prétexté qu'ainsi, les entreprises allaient réinvestir? Elles ne l'ont pourtant jamais fait, et surtout pas à la hauteur des baisses d'impôts qui leur ont été consenties. Et c'est sans compter les lois fiscales qui leur permettent de reporter indéfiniment le paiement de leurs impôts.

Enfin, les paradis fiscaux. En 2014, les transferts canadiens dans des paradis fiscaux étaient évalués à 184,4 milliards de dollars. Ne cherchons pas les déficits de nos gouvernements: ils sont là! Beaucoup d'argent réalisé ici, en utilisant nos infrastructures, qui fuit sans verser un sou d'impôt pour payer ces mêmes infrastructures!

Il est temps de mettre fin à toutes ces arnaques!

Nous devons récupérer la juste part d'impôt de tous ces riches et de leurs sociétés, pour remettre cet argent dans l'économie.

C'est à cette condition que les investissements du prochain budget Morneau pourront se faire sans aucun déficit.

Mais parions que Bay Street sera moins téméraire si on les consulte pour savoir de quelle hausse ils s'accommoderaient pour leur taux d'imposition...

Moi, je leur dirais: tant qu'à en faire une, allons-y et faisons-en une bonne!

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