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L’arrivée des médicaments «biologiques»

Lorsque les méthodes conventionnelles ne suffisent plus, il est possible de fabriquer sur mesure un médicament biologique pour continuer le combat contre une maladie.
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Il ne faut jamais baisser les bras face aux maladies et continuer à investir en recherche et développement de nouveaux outils thérapeutiques.
D-Keine via Getty Images
Il ne faut jamais baisser les bras face aux maladies et continuer à investir en recherche et développement de nouveaux outils thérapeutiques.

De tout temps, la nature, du fait de sa variété, a été une source immense de médicaments pour les humains. En premier, on utilisait les plantes qu'on préparait sous forme d'infusion, de décoctions ou d'emplâtres pour traiter diverses affections. On a qu'à se rappeler les tisanes calmantes à base de camomille, ou encore les effets purgatifs de l'ellébore ou enfin les mouches de moutarde: des emplâtres que l'on appliquait sur la cage thoracique et qui étaient censés guérir la pneumonie, tuberculose ou autres maladies pulmonaires.

Puis, l'arrivée de la chimie allait permettre de produire des médicaments mieux dosés, plus spécifiques et surtout efficaces contre une foule de maladies. Les biomédicaments, aussi appelés médicaments biologiques, forment la plus récente innovation en ce qui concerne l'histoire des médicaments. Il ne s'agit plus de broyer ou de bouillir des plantes, d'en extraire les principes actifs ou de combiner diverses molécules pour en obtenir des médicaments.

Il s'agit ici de faire fabriquer par des micro-organismes vivants, des médicaments pour diverses maladies très précises. L'histoire des médicaments comprend ainsi ces trois étapes: la nature, la chimie et la biologie. Commençons par un exemple type: l'insuline.

L'histoire d'une découverte canadienne: l'insuline

Le 11 janvier 1922, un jeune patient âgé de 14 ans repose dans un état semi-comateux à l'Hôpital Général de Toronto. Sa vie ne tient plus qu'à un fil. Les médecins de Leonard Thomson, le jeune diabétique mourant, lui administrent la préparation fournie par Banting et Best: l'insuline. Le taux de glycémie du patient baisse de 24,5 à 17,8 nmole/l, mais il reste encore beaucoup de sucre dans son sang et son urine, si bien que l'expérience n'est qu'un demi-succès.

Macleod et Collip, leurs collègues de l'université de Toronto qui avaient aussi contribué à la découverte, avaient été tenus dans l'ignorance quant à cette première injection sur un patient et ils étaient furieux. Collip qui, entretemps, avait réussi à obtenir une préparation plus pure menaçait de breveter seul ses résultats. Ce ne fut qu'au prix de longues négociations que les quatre chercheurs, Frederik Banting, Charles Best, John Macleod et James Bertram Collip finirent par s'entendre.

Le 23 janvier 1922, soit 12 jours à peine après le premier essai, une injection de la préparation de Collip, une version purifiée de celle administrée précédemment, fut donnée au jeune Thomson. Le succès fut total. L'état de santé du patient s'améliora en un rien de temps. Sa glycémie passa de 28,9 à 6,7 nmole/l. Le jour suivant, la glycémie remonte et une nouvelle injection est administrée avec les mêmes résultats. Leonard Thomson qui attendait la mort en ce mois de janvier 1922, vivra jusqu'en 1935 et mourut d'une pneumonie.

Avant la découverte de l'insuline, les personnes diabétiques étaient condamnées à mourir et ne pouvaient survivre, en suivant une diète sévère, que trois à quatre ans au maximum. L'insuline fut d'abord préparée en broyant des pancréas de porc et en purifiant cette préparation pour isoler le mieux possible son insuline. Néanmoins, il restait souvent des protéines de porc dans la préparation. Certains diabétiques en développaient des allergies et ne pouvaient donc plus recevoir d'insuline et le diabète progressait inexorablement.

Une percée majeure

Il fallait donc mettre au point une insuline plus pure, plus proche de l'être humain que du porc. La solution est alors venue d'un biochimiste américain, le docteur Herbert Boyer. Il a réussi à isoler la partie du code génétique du pancréas humain responsable de la fabrication de l'insuline et à l'implanter dans une bactérie, dans le but de lui faire fabriquer de l'insuline «humaine». Et comme les bactéries ont cette tendance à se multiplier rapidement, il pourrait ainsi créer un laboratoire unique de fabrication d'insuline.

Lorsque les médicaments conventionnels ne suffisent plus, il devient possible, grâce au génie génétique, de fabriquer sur mesure un médicament biologique pour continuer le combat contre une maladie.

Telle fut l'histoire de Genentech, le premier laboratoire de médicaments biologiques, qui vit le jour en Californie en 1976. Cette découverte majeure allait ouvrir une nouvelle ère dans l'histoire des médicaments. Lorsque les médicaments conventionnels ne suffisent plus, il devient possible, grâce au génie génétique, de fabriquer sur mesure un médicament biologique pour continuer le combat contre une maladie.

Le cas de l'arthrite rhumatoïde

Souvent, les problèmes d'arthrite commenceront par une douleur plus ou moins forte près d'une articulation. Un léger antidouleur et anti-inflammatoire comme l'acétaminophène pourra alors corriger la situation. Mais le problème revient parfois et s'intensifie par des douleurs plus fortes et une difficulté à faire bouger l'articulation. On ira alors en augmentant les doses des médicaments et en accompagnant le tout d'une physiothérapie appropriée à la situation.

Si le problème continue d'augmenter, on prescrira de la cortisone et on pourra même injecter ce médicament directement à l'endroit où le problème se manifeste. Malgré tout cet arsenal, pour plusieurs, le problème continuera d'évoluer en amenant une perte de mobilité qui pourra se traduire par une obligation de quitter son travail. À ce stade, le patient ressent des douleurs beaucoup plus fortes et doit souvent avoir recours à des médicaments de type opiacé (ex.: morphine). Moins actif, puisqu'il a dû laisser son emploi, il risque de prendre du poids et ainsi augmenter la pression sur les articulations.

Face à ses douleurs difficilement contrôlables et aux changements non voulus à sa vie, la dépression devient une menace réelle. Nous avons donc ici l'exemple d'une vie complètement changée par une maladie difficile à traiter avec toute l'efficacité nécessaire.

Plusieurs autres maladies, comme l'arthrite rhumatoïde, peuvent ainsi changer radicalement la vie des personnes qui en sont atteintes. On peut penser à la colite ulcéreuse ou à la maladie de Crohn. Ces trois maladies ont ceci en commun qu'elles sont le résultat d'un problème inflammatoire. Lorsque les médicaments anti-inflammatoires ne suffisent plus, il faut trouver une solution novatrice.

Quand le médicament biologique prend la relève

Et c'est ici que le médicament biologique réussit à prendre la relève. Grâce au génie génétique, tout comme dans le cas de l'insuline, il devient possible de fabriquer des protéines — ici un anticorps monoclonal — qui pourront être utilisées par le patient pour stopper les dérives de son système immunitaire permettant aux maladies de s'installer.

En effet, l'inflammation causant les diverses formes d'arthrite ou encore les colites ulcéreuses est attribuable à un mauvais fonctionnement du système immunitaire. Normalement, ce dernier doit s'attaquer aux virus et autres microorganismes menaçant la santé, mais il prend cette fois-ci comme cible les protéines des articulations (dans les cas d'arthrites). L'anticorps monoclonal se liera et bloquera l'activité de certaines protéines responsables de l'inflammation et réduira ainsi les dommages aux articulations.

Lorsque la nature et la chimie ne suffisent plus, le biologique peut nous permettre de continuer la lutte contre les maladies. Il ne faut jamais baisser les bras face aux maladies et continuer à investir en recherche et développement de nouveaux outils thérapeutiques.

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