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La communication en santé, une denrée trop rare

Il fut un temps où le médecin gardait pour lui une grande partie de l'information sur la santé de son patient.
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Il fut un temps où le médecin gardait pour lui une grande partie de l'information sur la santé de son patient. On pouvait alors entendre: «Inutile de lui dévoiler l'ampleur de sa maladie, cela l'inquiéterait pour rien!» ou encore: «On n'en parlera pas à votre épouse, de toute façon son cancer est incurable, elle le saura bien assez vite.»

Il n'y a qu'à peine un demi-siècle de cette époque à aujourd'hui où d'un clic de souris on peut obtenir quelques millions de références sur une maladie en quelques secondes. Pourtant sommes-nous passés de trop peu d'informations à trop d'informations? Permettez-moi de présenter mes doutes.

Quantité versus qualité

Dans ce «melting pot» de milliards d'informations que transporte le Web, il y a de tout, des vérités, des demi-vérités, des mensonges, des fraudes, des inepties, etc. Et il est souvent difficile pour le non-initié de séparer le bon grain de l'ivraie. Les nouvelles, lorsqu'elles sont vraies, font les gros titres. Il est très facile de lancer une accusation envers une grosse compagnie pharmaceutique ou autre. La une défraie alors les manchettes de tous les grands médias. Mais s'il s'avère, après enquête minutieuse de plusieurs mois que les accusations aient été sans fondement, l'information qui nous en fera part se trouvera résumée en un ou deux paragraphes en page 92 des grands médias et ne fera jamais la une d'aucun média. La quantité d'information n'est donc pas un gage de qualité, loin de là. Et il appartient aux professionnels de la santé, aux ministères concernés et aux compagnies impliquées de divulguer encore et toujours une information complète et de qualité. En ne répétant pas les bonnes informations, on laisse la place aux inepties qui, elles, seront répétées ad nauseam et s'ancreront dans les croyances populaires.

Communication médecin-patient

L'information est une partie de la communication, nous avons tendance à l'oublier. Dans son dialogue avec un patient, un médecin peut fort bien fournir toute l'information juste et scientifique sur l'état de santé de celui-ci, avec une totale absence de bonne communication. Ainsi, pour annoncer une maladie grave, le médecin doit, de plus, faire preuve d'empathie et de jugement, s'il veut s'assurer que les informations qu'il livre soient bien comprises du patient et bien acceptées par celui-ci. Une information sèche et condensée peut s'avérer non seulement totalement incomprise, mais de plus génératrice de stress et de craintes qui vont influencer le patient et faire en sorte que ce dernier va mal accepter le traitement. Récalcitrant au traitement qu'il a mal compris, le patient devient moins coopératif, ne prend pas sa médication avec assiduité ou ne met pas en pratique les conseils émis par son médecin. Dans ce type de communication, anciennement le médecin ne donnait pas d'information et on l'en a blâmé avec raison. Aujourd'hui, il doit se montrer prudent dans la façon dont il donne ces informations. Et dans ce type d'informations, le patient a aussi son rôle à jouer. Il se doit de s'informer et d'établir un dialogue constructif non seulement avec son médecin, mais aussi avec tout le personnel soignant avec qui il est en contact. Meilleurs seront ses liens avec son médecin, son infirmière, sa nutritionniste, son ergothérapeute, etc., le plus facile et le plus efficace seront les traitements. Le mieux il sera informé, meilleur sera son dialogue avec son personnel soignant.

Communication système de santé-patient

Ici, la communication ressemble à celle qui existait au début des années 1900 entre le médecin et le patient. Le docteur ne divulguait que le minimum d'information et le patient suivait les prescriptions du médecin. Cette communication à sens unique est ce que l'on retrouve de nos jours entre le système de santé et le grand public. Nous avons assisté au cours des dernières années à une réforme majeure de notre système de santé. Je dis bien « notre » système de santé puisque ce sont nous qui le payons. Pourtant, avons-nous été bien informés de tous les tenants et aboutissants? Avons-nous eu notre mot à dire dans cette révolution? Savons-nous bien où s'en va notre ministre avec cette réforme. Il semble que l'on ait oublié au ministère que dans le terme communication, il y a cette petite particule latine «com» (ou cum en latin) qui signifie: avec. Et lorsque l'on communique avec quelqu'un, une des parties de l'action consiste à écouter ce quelqu'un. Autrement, il y a un monologue et c'est ce à quoi semble nous condamner notre ministre. C'est pour quand le bureau des usagers qui permettrait justement un dialogue?

C'est pour quand le bureau des usagers qui permettrait justement un dialogue?

Communication autres acteurs de la santé-patient

Étant d'emblée jugées trop complexes pour être divulguées au grand public, les sciences médicales semblent trop souvent uniquement dédiées à des groupes d'initiés. On croit que le monde ordinaire ne saurait jamais se souvenir du sens d'un mot comme ostéodensitométrie, mais on oublie que ce même public peut nommer tous les joueurs d'une équipe de hockey ou encore utiliser des ordinateurs et des programmes informatiques complexes. Si on demandait à n'importe qui le nom des cinq plus grands chercheurs au Québec, je suis assez certain que bien peu de gens ne seraient en mesure ne serait-ce de n'en nommer qu'un seul. Si nous ne connaissons pas nos chercheurs, comment pouvons susciter chez nos jeunes le désir d'entreprendre des études en science ? Si nous ne connaissons pas nos compagnies pharmaceutiques, comment éviter les méfiances face à celles-ci ? Il est plus que temps que nos grands initiés en santé établissent une communication franche et adulte avec le grand public. Car il ne s'agit pas d'infantiliser le grand public en lui présentant une information diluée ou racoleuse. Le monde médical, pharmaceutique et scientifique doit établir un vrai dialogue d'adultes à adultes afin de renforcer le lien de confiance qui se doit d'exister pour le plus grand bien de tous. On dit que la nature a horreur du vide. Les médias, encore plus, ne supportent pas le vide. Si on ne parle pas de sciences, les grands médias parleront d'autres sujets ou, pire, de pseudosciences.

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Mai 2017

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