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Cocaïne: les problèmes reliés aux traitements

Une société qui ne s'attaque pas de front aux problèmes de misère humaine qui la grugent assiste impuissante à une augmentation de la toxicomanie et de la criminalité.
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Ce n'est pas parce que j'ai suivi une thérapie que mes comportements ont nécessairement changé au point où je me fais des tonnes d'amis. C'est plus compliqué que ça.
Göktug Atilla Harun / EyeEm via Getty Images
Ce n'est pas parce que j'ai suivi une thérapie que mes comportements ont nécessairement changé au point où je me fais des tonnes d'amis. C'est plus compliqué que ça.

Plusieurs livres ont déjà été écrits sur les approches de traitement de la cocaïnomanie sans avoir été en mesure d'apporter de solutions définitives à la question. En fait les problèmes sont nombreux et complexes.

Le cocaïnomane

L'une des premières difficultés, et non la moindre, est qu'il n'existe pas un profil défini de l'individu cocaïnomane. En d'autres mots, il n'existe pas une un profil type de personnes éprouvant des problèmes avec leur consommation de cocaïne. La réalité est plutôt qu'il existe des milliers de personnes, toutes différentes les unes des autres, qui voient leur vie plus ou moins hypothéquée par leur dépendance.

En théorie, il faudrait donc des milliers d'approches personnalisées pour répondre parfaitement à chaque usager. Pour complexifier encore plus le portrait, rares sont les toxicomanes qui n'ont de problèmes qu'avec la cocaïne. La cocaïne fait bon ménage avec l'alcool.

D'une part la cocaïne augmente la soif, donc l'utilisateur aura tendance à vouloir apaiser son désir de boire et d'autre part, l'alcool calme l'agitation provoquée par la cocaïne, qui peut devenir difficile à supporter à certains moments. De plus, certains utilisateurs de cocaïne par injections vont mélanger de l'héroïne à la cocaïne (speedball).

La plupart du temps, les individus deviennent dépendants à plusieurs drogues dont l'alcool, la cocaïne, l'héroïne, etc. Nous rencontrons bien plus de polytoxicomanes que de cocaïnomanes.

Certaines de ces drogues créent des dépendances physiques très fortes, d'autres des dépendances psychologiques très difficiles à combattre et d'autres enfin, comme la cocaïne peuvent provoquer des dépendances physiques et psychologiques.

Les problèmes reliés à la consommation et ceux de l'individu

Le toxicomane avait fort probablement des problèmes avant de se mettre à recourir aux drogues et/ou à l'alcool. Dans la majorité des cas, il a commencé à consommer pour tenter de régler ses problèmes.

Le timide maladif qui sent sa gêne naturelle s'estomper après une ou deux consommations d'alcool, risque fort d'avoir recours à ce moyen chaque fois qu'il devra assister à des rencontres sociales. La jeune adolescente déprimée qui vit une situation familiale aberrante découvrira, avec sa première prise de cocaïne, des sensations de plaisir comme elle n'en avait jamais éprouvé avant. Le risque de recommencer est alors très grand.

À ces problèmes, s'ajouteront ceux qui proviendront de la consommation. Il y aura un mode de vie complet qui sera orienté vers l'assouvissement de sa dépendance. Il faut trouver l'argent pour acheter sa drogue. Et comme on en consomme de plus en plus, bien vite on se retrouve à chercher des moyens rapides d'en acquérir: prostitution, vol, fraude, font partie de l'arsenal pour trouver les argents nécessaires pour pouvoir consommer.

C'est ainsi que l'individu se marginalise. Ses mensonges répétitifs lui font bientôt perdre parents et amis et il se retrouve dans le milieu marginal des gens pris comme lui.

L'escalade peut l'amener si loin que ce milieu devient pour lui, la norme. Il sera très difficile de réapprendre à choisir ses valeurs et à les respecter. Pour une personne qui vit dans la marginalité depuis deux, cinq ou dix ans et parfois plus (quand par exemple, cette personne est née et a grandi dans un milieu marginal), payer son loyer ne revêt pas la même importance que pour la majorité des individus d'une société.

Bien sûr, l'idéal serait une thérapie parfaite à la suite de laquelle le toxicomane ressort complètement guéri et est prêt à occuper une position enviable dans la société. Mais ici comme ailleurs, la perfection n'existe pas.

Bien des maux, dont certains carrément physiques ne se guérissent pas dans l'état actuel de nos connaissances et de nos aptitudes.

Par exemple, on ne guérit pas une maladie comme le diabète, le mieux qu'on peut faire est d'apprendre à la personne à le contrôler. Diabétique un jour, diabétique toujours. Les comparaisons sont toujours un peu boiteuses, il ne faut jamais les utiliser au pied de la lettre. Mais la tendance en toxicomanie est de dire: toxicomane un jour, toxicomane toujours. Les risques de rechute sont malheureusement très grands.

Il faut alors prévenir et conseiller d'éviter de sombrer dans le découragement et de reprendre la thérapie, même si c'est difficile. De plus, il faut bien réaliser que même si l'individu ne consomme plus de drogue, il aura d'autres problèmes à régler et souvent il sera mal outillé pour le faire.

Se trouver un emploi est plus difficile pour une personne qui a un casier judiciaire datant de la période où elle se droguait. Les problèmes de relations interpersonnelles qu'il rencontrait avant la thérapie risquent aussi de se reproduire. Ce n'est pas parce que j'ai suivi une thérapie que mes comportements ont nécessairement changé au point où je me fais des tonnes d'amis.

Si l'ex-toxicomane se décourage parce qu'il éprouve des problèmes pour se refaire une vie, le risque de rechute augmentera.

Il serait difficile de terminer cet article sur les thérapies sans parler des proches du toxicomane, ses parents, conjoint et amis. Les personnes les plus proches du toxicomane vont souffrir énormément de cette situation. Ils doivent, quand c'est encore possible et s'ils le désirent, prendre part au programme de désintoxication. Bien des centres offrent leur aide en ce sens.

Conclusion sur les thérapies

Sans pour autant que cela soit interprété comme une démission face aux objectifs forts louables de venir au secours des toxicomanes, il faut admettre que la plupart des thérapies ne sont qu'un petit pansement face aux problèmes sociaux, familiaux, économiques et sanitaires que vivent les toxicomanes.

Une société qui ne s'attaque pas de front aux problèmes de misère humaine qui la grugent assiste impuissante à une augmentation de la toxicomanie et de la criminalité.

Il faudra un jour aborder et résoudre les problèmes reliés aux iniquités sociales. Personne ne peut être condamné à vivre dans la plus grande misère sans vouloir, un jour ou l'autre, se donner ne serait-ce que l'illusion du bonheur.

Ce texte fait partie d'un livre que j'ai eu l'honneur de signer et qui parut en 2006 aux éditions Publistar. Le livre était intitulé : Cocaïne, la poudre de l'ennui et s'était inspiré de la série documentaire: Vices cachés.

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