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Assistons-nous au début de la fin de l'impunité pour les agresseurs?

Derrière chacune de ces dénonciations, se trouve évidemment une survivante, mais aussi un agresseur.
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Radio-Canada

L'image était forte : onze personnalités du domaine de l'humour rassemblées sur le plateau de Tout le monde en parle afin de présenter leur nouvelle initiative, se dissociant fermement du Festival Juste pour rire et de Gilbert Rozon, dont les agissements ont été dénoncés dans la foulée du mot-clic #MoiAussi. Nous pourrions bien évidemment soulever certaines questions et émettre différentes hypothèses concernant les motivations de Martin Petit et de ses collègues. Cependant, nous tenons ici à souligner l'audace de leur démarche et du message sous-jacent, qui viennent ébranler l'impunité communément accordée aux agresseurs.

Cette impunité dont bénéficient les agresseurs constitue l'une des barrières les plus significatives dans la lutte contre les violences sexuelles. Lorsque les féministes ont commencé à dénoncer l'ampleur et les conséquences du viol (élargie par la suite aux violences sexuelles) au cours des années 1970, une de leurs principales préoccupations fut la nécessité de s'attaquer aux mécanismes sociaux qui justifient les comportements des hommes. Cette bataille est encore d'actualité. Suivant cette logique, non seulement faut-il s'attaquer aux violences sexuelles, il faut également voir comment il est possible de changer les attitudes et les croyances qui contribuent à sa minimisation et à sa banalisation.

Derrière chacune de ces dénonciations, se trouve évidemment une survivante, mais aussi un agresseur.

Or, ce type de changement ne s'opère pas du jour au lendemain. L'avènement des réseaux sociaux a sans doute contribué à rendre plus visible le problème des violences sexuelles. En 2014, des millions de femmes à travers le monde ont dénoncé des agressions avec le mot-clic #AgressionNonDénoncée et, plus récemment, plusieurs autres femmes l'ont fait avec le mot-clic #MoiAussi. Ces initiatives ont non seulement permis de rendre compte de l'ampleur des violences sexuelles, elles ont également mis des visages sur les statistiques. Derrière chacune de ces dénonciations, se trouve évidemment une survivante, mais aussi un agresseur. Dès lors, il semble difficile de détourner le regard et de minimiser, banaliser ou justifier un nombre si important d'agressions commises par des hommes à l'endroit des femmes.

C'est dans ce contexte que nous assistons depuis quelque temps à ce que nous croyons constituer un point tournant dans la lutte contre les violences sexuelles. Au moment où leurs comportements sont exposés au grand jour, des personnalités au Québec et ailleurs ont vu leur carrière et leur réputation s'écrouler. Alors que ces hommes pouvaient auparavant bénéficier du soutien de la population, l'indifférence et la complaisance semblent de plus en plus remplacées par l'indignation générale. Ces réactions suggèrent un changement de cap, au bénéfice des survivantes.

Alors que ces hommes pouvaient auparavant bénéficier du soutien de la population, l'indifférence et la complaisance semblent de plus en plus remplacées par l'indignation générale.

Ceci dit, si ce constat constitue un pas dans la bonne direction, d'autres changements s'imposent si nous souhaitons réellement assister à la fin de l'impunité pour les agresseurs. Il faudrait notamment s'assurer que ce traitement n'est pas réservé aux personnalités publiques et que l'indignation contre les violences sexuelles vécues par les femmes se manifestent aussi dans différents milieux, que ce soit au sein des familles, dans les milieux de travail, sur la rue, etc. Notons aussi les changements importants qui s'imposent dans le système de justice.

Malgré tout ces défis, la désapprobation sociale et les sanctions qui en découlent envoient un message clair aux agresseurs et soutiennent du même coup les survivantes. À cet effet, observer un groupe de personnalités connues se regrouper et dénoncer « un des leurs » sur l'une des tribunes les plus populaires du monde artistique québécois offre une importante lueur d'espoir. Le Québec deviendra-t-il chef de file en matière de lutte contre les violences sexuelles? Seul le temps le dira. Entre temps, saluons l'initiative de ces humoristes qui, à leur manière, contribuent aux efforts nécessaires pour mettre fin aux violences masculines.

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