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Que pensent les hyperconnectés du droit à la déconnexion?

On peut voir dans ce droit la déconnexion une véritable amélioration pour beaucoup de collaborateurs qui subissent, à leur corps défendant ces contacts virtuels répétés et incessants. Mais qu'en pensent les autres? Les hyperconnectés par choix et par plaisir?
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Le droit à la déconnexion vient d'entrer en vigueur ces derniers jours en France. Je rappelle qu'il impose à toutes les entreprises de plus de 50 salariés de réfléchir à leur relation avec le numérique. La loi leur demande expressément de mettre en place des règles et des moyens pour respecter ce droit à la déconnexion pour leurs collaborateurs.

Depuis quelques années, on constate que l'hyperconnexion se développe et qu'elle est à l'origine de nombreux problèmes pour les salariés qui y sont soumis. En effet, ne pas avoir droit à la coupure psychologique entre vie professionnelle et vie privée, être toujours en connexion avec son entreprise, soit par les courriels soit par téléphone, occasionne chez beaucoup de collaborateurs de la souffrance: un sentiment d'urgence, un sentiment de pression, un sentiment d'être suivi, voire tracé par son entreprise sans jamais pouvoir souffler. Ces personnes développent des symptômes classiques de dépression, de phobie, d'angoisse... La loi pose un cadre, mais reste souple dans l'application et propose plutôt de construire des conduites adaptées, discutées par les représentants des salariés avec la direction, car chaque entreprise a ses propres impératifs.

On peut donc voir dans ce droit la déconnexion une véritable amélioration pour beaucoup de collaborateurs qui subissent, à leur corps défendant ces contacts virtuels répétés et incessants.

Mais qu'en pensent les autres? Les hyperconnectés par choix et par plaisir?

Les dispositifs peuvent aller jusqu'à interdire les échanges en dehors d'horaires strictement définis, ce qui ne sera pas du goût de tout le monde.

C'est pour ces hyperconnectés, l'occasion de faire le point sur leurs habitudes et, peut-être de les remettre en cause, avec à la clé, plusieurs bienfaits:

  • Sortir de ce qui est devenu une addiction, et éviter que la connexion qui est, par définition, la «mise en lien», ne devienne un enchainement,
  • Éviter le harcèlement numérique à l'endroit de collègues ou collaborateurs qui ne goûtent pas ce fonctionnement,
  • Être prêt, si l'entreprise met en place des dispositifs contraignants qui couperont ce lien entretenu avec ferveur depuis des mois ou des années.

Tout d'abord: souffrez-vous d'hyperconnexion?

OUI si le dernier geste avant de vous endormir est de regarder vos courriels ou des réseaux sociaux,

Oui si le premier geste que vous faites en vous éveillant est de regarder vos courriels ou vos réseaux,

OUI si, en déjeunant en famille, en prenant l'apéritif avec des amis, en étant au cinéma, vous ne pouvez vous empêcher de jeter un œil à votre téléphone intelligent et de répondre ou d'envoyer textos, courriels ou autres messages...

C'est grave? Je ne sais pas, mais c'est intéressant de réfléchir au pourquoi de cette habitude maintenant bien enracinée.

Il y a 4 moteurs à l'hyperconnexion: MOI, LES AUTRES, LE TEMPS, L'ESPACE.

Il en découle 4 profils:

  • Le profil «MOI»

C'est celui (ou celle) qui s'estime indispensable, non substituable, il veut être partout, montrer son activisme, car il est certain que l'entreprise ne peut se passer de lui!

Son gros problème, c'est qu'il n'a pas confiance dans les autres et qu'il est incapable de déléguer, ce qui l'amène à être omniprésent, sans cesse dans le contrôle et dans le harcèlement de ses collaborateurs ou de ses collègues. Ce profil produit un volume très important d'informations car si jamais on ne l'avait pas entendu, si jamais on ne l'avait pas lu, l'entreprise ne pourrait plus tourner ! Le gros problème du «MOI» c'est l'incapacité à faire confiance.

C'est important de réfléchir à cette difficulté, il faut apprendre à cultiver la confiance et à se dire que dans le silence des réseaux et des courriels, les choses se font, et se font bien car d'autres personnes sont capables de prendre le relais.

  • Le profil «LES AUTRES»

C'est l'hyperconnecté qui ne peut pas exister sans «les autres» Ce sont les likes, les réponses à ses courriels, les réponses à ses textos, tous ces messages donc il est copie qui lui donnent le sentiment de véritablement exister. Le profil «LES AUTRES» manque de confiance en soi. Il n'a pas suffisamment confiance en lui pour penser qu'il est quelqu'un de valeur sans le regard des autres. La question qui se pose à lui est: «Comment me faire plus confiance?», «Comment cultiver la confiance en moi-même et donc avoir le sentiment d'être quelqu'un de valeur sans passer par ma valeur ajoutée à mon entreprise?».

  • Le moteur du troisième profil, c'est «LE TEMPS»

Beaucoup d'hyperconnectés «TEMPORELS» ont besoin du sentiment d'hyperurgence, et de la poussée d'adrénaline qu'elle procure. Cette façon de travailler dans l'urgence leur donne le sentiment de vivre avec plus d'intensité ! C'est un problème, car ces profils ont tendance à toujours pousser les autres et à leur imposer un rythme qui ne leur convient pas.

La meilleure façon de travailler ce type d'hyperconnexion est de réfléchir à la pseudo-efficacité de ce travail en continu. Bien souvent, il est source de stress et il n'a pas beaucoup de sens. C'est comme l'information en continu, on se rend compte qu'avoir les informations toutes les cinq minutes sur un drame n'apporte pas grand-chose. Travailler sur le temps un peu plus long, faire des points réguliers est une autre façon toute aussi efficace et moins stressante d'avoir des résultats.

  • Le quatrième profil est fondé sur «L'ESPACE»

Le monde professionnel dans lequel évoluent «LE SPATIAL» exige une présence physique qui le coupe complètement de sa vie personnelle ou, a contrario, sa vie personnelle peut exiger sa présence physique, loin des locaux de son entreprise. Ainsi, jouer avec ses enfants ne se fait pas virtuellement, être à l'hôpital auprès d'un être cher malade ne se fait pas virtuellement, aller à un enterrement, à un mariage, à une fête de famille exige une présence physique. L'hyperconnecté «SPATIAL» a l'impression d'échapper à cette exigence physique en restant en ligne avec son entreprise.

Cela part d'un bon sentiment comme pour les autres profils. L'objectif est de bien faire, de mieux faire, toujours mieux faire, mais il faut se poser la question du sens et de l'efficacité. Est-ce que cela a du sens d'être au chevet d'une personne malade en passant son temps à pianoter sur son téléphone intelligent? Est-ce que cela a du sens d'être auprès de ses enfants en rédigeant des courriels? Cette «présence absente» peut donner le sentiment d'une grande indifférence, voire d'un mépris pour ses proches.

Et, a contrario, est-ce efficace de travailler en restant au téléphone avec un enfant? Au contraire, c'est souvent interprété comme le signal d'un moindre engagement dans le travail.

Le droit à la déconnexion: une punition ou une chance?

Nous avons donc 4 profils d'hyperconnectés, avec 4 moteurs distincts mais qui se rejoignent souvent. Ainsi, on s'estime indispensable (MOI) mais on a aussi besoin des autres (LES AUTRES). On aime que ça avance et que le travail soit efficace (TEMPOREL), mais on ne peut pas rester toujours enfermé dans son bureau dans son usine (SPATIAL).

Pour les hyperconnectés, c'est avec cette réflexion sur soi qu'il faut aborder le droit à la déconnexion qu'on nous propose. Cette rupture sera difficile pour beaucoup d'entre eux, et pas du tout naturelle quoi qu'on en dise. Je propose de se poser la question du «pourquoi nous aimons rester connectés» avec notre vie professionnelle pour que la déconnexion ne soit pas une punition.

L'idée est de préserver le lien avec son travail si c'est une source de satisfaction et d'efficacité, mais sans que ça devienne une chaîne, ou une addiction. Et surtout en respectant tous ceux, collaborateurs ou collègues qui vivent l'hyperconnexion comme une ingérence insupportable. A ces conditions, la déconnexion peut être une chance pour les hyperconnectés.

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