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Brutalité policière: un devoir de résistance

Je dirais simplement que la brutalité policière m'est insupportable, que je ne peux accepter que le SPVM règne en maître dans nos rues et qu'un jour une personne qui m'est chère joue de malchance en tombant sur un policier nerveux qui décide de frapper, qui décide de tirer. Que cette violence affecte quelqu'un qui m'est complètement inconnu m'est d'ailleurs tout aussi insupportable.
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Samedi dernier, j'ai tenté de participer à la manifestation contre la brutalité policière. Je dis bien «tenté» parce que vous ne pouvez l'ignorer à présent : il n'y a pas eu de manifestation. Le SPVM a chargé les quelques personnes présentes non pour les disperser, mais pour les arrêter, pour les maintenir dans le froid pendant plus de deux heures.

Tel est le scénario qui se répète depuis plus d'un an sous le couvert du règlement municipal P6. Pour manifester à Montréal, il faut être prêt à être pourchassé, à se faire violenter et à rester à l'extérieur, immobile, été comme hiver, sans eau, sans accès à des toilettes, etc. Voilà le prix à payer pour ce qu'il nous reste de liberté d'expression.

Mais revenons à la manifestation de samedi dernier. On me demande souvent : «Pourquoi vous rendez-vous à un rassemblement qui chaque année tourne à l'affrontement?». Ce à quoi je réponds : «Savez-vous que les affrontements dont on parle tant sont principalement initiés par les forces policières? Pourquoi vous offusquez-vous de l'oppression lorsqu'elle se produit au loin pour fermer les yeux quand elle se déroule au coin de chez vous?».

Vous rappelez-vous les dérives policières du printemps 2012, les nombreuses blessures infligées aux étudiants, la mort de Freddy Villanueva, de Donald Ménard ou celle, plus récente, d'Alain Magloire? Tout cela, malgré son ampleur, n'est que la pointe de l'iceberg. Le SPVM a tué près de 50 personnes en 27 ans à Montréal. Cela, encore, n'est qu'un autre bout de la pointe du même iceberg, car les petites manifestations qui ne «bénéficient» pas d'une couverture médiatique font depuis de nombreuses années l'objet d'une violente répression de la part du SPVM, surtout celles qui osent remettre en question les injustices liées au capitalisme, comme la manifestation du 1er mai.

Pour répondre à la question qui m'a été posée à de multiples reprises, je dirais donc simplement que la brutalité policière m'est insupportable, que je ne peux accepter que le SPVM règne en maître dans nos rues et qu'un jour une personne qui m'est chère joue de malchance en tombant sur un policier nerveux qui décide de frapper, qui décide de tirer. Que cette violence affecte quelqu'un qui m'est complètement inconnu m'est d'ailleurs tout aussi insupportable. Il en va de la liberté d'expression et même, plus prosaïquement, de notre sécurité à toutes et à tous.

D'autres personnes me disent qu'elles non plus n'acceptent ni P6 ni la brutalité policière, mais qu'elles ont trop peur de manifester. Comme je les comprends! Au lieu de critiquer les actes de violence policière, de soulever l'incohérence des paroles de Marc Parent ou de Ian Lafrenière, les médias se contentent de relayer les messages de peur et d'intimidation du directeur et du porte-parole du SPVM et de passer en boucle les images de la répression. Comment, ensuite, ne pas être effrayé à l'idée de descendre dans la rue? Quel choix reste-t-il aux citoyen(ne)s qui aimeraient faire entendre leur voix sans risquer de finir blessés ou, au minimum, avec en main une amende dépassant les 600$?

Samedi dernier, plusieurs résidents ont été pris en otage à l'intérieur de leur propre demeure rue Chateaubriand. Est-ce légal? Ces personnes ne pourraient-elles porter plainte contre cet abus de pouvoir du SPVM? À ma connaissance, c'est la première fois qu'en prenant des manifestants en souricière, le SPVM bloque, en plus de toute circulation, tout accès à des résidences privées. Et que dire des personnes qui ont reçu pendant la souricière la visite peu courtoise de policiers exigeant qu'elles cessent de communiquer avec les arrêtés ou de les soutenir verbalement? Voir des manifestants essayer de trouver refuge chez des gens et se heurter à des portes closes m'a rappelé des images terribles associées à la Seconde Guerre mondiale, car samedi dernier, ce sont à de véritables rafles que j'ai assisté. Vous trouvez que j'exagère? Je ne pense pas. Demandez donc aux personnes qui se trouvaient aux abords du métro Jean-Talon ce 15 mars.

Vous ne pouvez ou ne voulez manifester pour des raisons personnelles, mais vous appuyez la lutte contre la brutalité policière et son impunité? Résistez, tout simplement en refusant de collaborer en quelque situation que ce soit. Chaque policier du SPVM, qu'il arbore le sourire bon enfant du gardien de la paix dans nos quartiers ou qu'il vous malmène, devrait se faire rappeler qu'il appartient à un groupe paramilitaire oppresseur au service du pouvoir - pouvoir corrompu, dois-je le rappeler?

Alors qu'il reste trois semaines à la campagne électorale, on peut constater que la question de la gestion des forces policières n'a pas été retenue. Pourtant, je n'ai pas rêvé, nous étions nombreuses et nombreux dans les rues il y a bientôt deux ans, casseroles à la main, pour dire que nous ne voulions pas de la loi 78 parce qu'elle était liberticide. Le règlement municipal P6 donne lui aussi un chèque en blanc au SPVM, lequel gaspille les deniers publics en intervenant avec des moyens pour le moins disproportionnés. Samedi dernier en est le dernier exemple. Pourquoi n'exigeons-nous pas que la gestion des forces policières soit ramenée au cœur des débats?

Chaque personne, qu'elle soit candidate aux élections, intellectuelle, artiste ou qu'elle se considère simple citoyenne a le devoir de dénoncer le statu quo que nous subissons. Nous avons toutes et tous ce devoir de résistance, parce que d'autres avant nous ont livré bataille pour nos droits civiques, parce que chaque jour vécu sous l'oppression est un jour de trop.

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