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Comment aider les victimes d'actes criminels, à leur détriment

Comment financer des programmes et services à l'intention des victimes d'actes criminels? Doit-on considérer comme bailleurs de fonds des personnes défavorisées qui volent pour assurer leur subsistance?
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Comment financer des programmes et services à l'intention des victimes d'actes criminels? Doit-on considérer comme bailleurs de fonds des personnes défavorisées qui volent pour assurer leur subsistance?

Une loi des conservateurs récemment entrée en vigueur rend désormais obligatoire la suramende compensatoire - une sanction supplémentaire imposée au moment de la détermination de la peine aux contrevenants déclarés coupables. Elle est perçue et conservée par les gouvernements provinciaux et territoriaux, et sert à financer des programmes et des services à l'intention des victimes d'actes criminels dans la province ou le territoire où l'acte criminel a été commis.

La nouvelle loi a modifié les dispositions du Code criminel relatives à la suramende compensatoire de manière à doubler la somme que le contrevenant doit verser lorsqu'il est condamné et à faire en sorte qu'elle soit imposée dans tous les cas.

Jusqu'à l'adoption de cette loi, les juges pouvaient renoncer à imposer la suramende compensatoire, lorsque son versement causait un préjudice injustifié au contrevenant ou aux personnes à sa charge.

Certes, il faut que les victimes aient accès à des programmes et services de première qualité. De même, il est essentiel que les services aux victimes soient financés de manière fiable et adéquate. Cela pourrait être assuré par le gouvernement fédéral, qui pourrait, en collaboration avec les provinces et territoires, déterminer les besoins. Après une analyse des besoins, le gouvernement fédéral pourrait introduire des mesures budgétaires prévoyant des transferts aux provinces et territoires en matière pour financer les programmes et services offerts aux victimes.

Par contre, le gouvernement - en regard des services aux victimes - a déposé la Loi sur la responsabilisation des contrevenants à l'égard des victimes, qui double le montant de la suramende compensatoire et la rend obligatoire. Cette approche «une taille pour tous» fait, entre autres, abstraction du fait que les taux de la criminalité diffèrent entre les régions et que les fonds amassés, qui sont gérés par les provinces et territoires, ne reflètent pas les besoins spécifiques à chaque région. Elle fait également fi des variations dans les coûts des services en fonction du lieu - dans le nord, par exemple, les coûts sont plus élevés qu'ailleurs.

Les conservateurs invoquent la nécessite de responsabiliser les contrevenants. Et je crois qu'on ne peut qu'être d'accord avec le fait que les contrevenants qui peuvent payer la suramende le fassent. Que faire, par contre, de ceux et celles qui n'ont pas les moyens de la payer?

Certaines provinces se sont dotées de programmes visant à permettre aux contrevenants de travailler durant leur incarcération afin de payer la suramende. Mais, cette option n'est pas offerte partout. En conséquence, certains juges, qui se sont vu retirer leur pouvoir discrétionnaire, ont trouvé des méthodes créatives pour se conformer à cette nouvelle loi lorsque les délinquants sont impécunieux. Certains donnent aux contrevenants jusqu'à 99 ans pour s'acquitter de la suramende, et au moins un juge d'Ottawa a déclaré la nouvelle loi anticonstitutionnelle et sans effet.

De façon prévisible, les procureurs de la Couronne jugent inacceptables ces décisions judiciaires et en appellent présentement de quelques-unes de ces décisions. Notons qu'il est à prévoir que les frais judiciaires encourus par ces appels - et défrayés par les contribuables - excéderont le montant de la suramende.

J'ai déposé en Chambre des questions écrites, demandant au gouvernement de donner des détails quant à la preuve sur laquelle il s'est basé et quant à l'étendue de la consultation à laquelle il s'est livré afin de présenter son projet de loi. J'ai également demandé quelles mesures ont été mises en place afin d'assurer le financement diligent et total des services fournis aux victimes dans l'éventualité où le caractère obligatoire de la suramende serait jugé inconstitutionnel.

En réponse à mes critiques, le ministre de la Justice, Peter MacKay, a fait valoir que je préfère voir l'argent dans les poches des criminels plutôt que dans celles des victimes. Je le répète, je pense que les contrevenants qui le peuvent doivent payer la suramende. Mais, dans les cas où le contrevenant ne peut pas payer, on ne peut justifier l'imposition de la suramende, ni l'emprisonnement pour défaut de paiement.

J'ai confiance en les juges de ce pays, et je crois qu'ils et elles peuvent utiliser leur discrétion pour déterminer qui doit payer une suramende et à quel montant elle doit s'élever. Le gouvernement, lui, a retenu l'approche la plus simpliste et la plus sévère, qui pourrait mettre en péril l'entièreté du programme si elle est était jugée inconstitutionnelle, alors que nous devrions nous concentrer sur le financement direct de programmes répondant aux besoins des victimes, que, tous, nous désirons aider.

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