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Pourquoi j'ai dit Bye Bye au Courrier vinicole de la SAQ

Voici pourquoi, afin de rester fidèle à mes principes, j'ai récemment dû, à mon grand regret, décidé de dire au revoir aude la SAQ.
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Voici pourquoi, afin de rester fidèle à mes principes, j'ai récemment dû, à mon grand regret, décidé de dire au revoir au Courrier vinicole de la SAQ.

Le Courrier vinicole, c'est quoi?

Rappelons que ce véhicule promotionnel est utilisé par les Services SAQ Signature afin de mettre en vente à quelques reprises durant l'année des vins rares et prestigieux, souvent regroupés sous un même thème (pays, régions, cépages, etc.). Il s'adresse avant tout à des amateurs avisés, lesquels comptent bien souvent parmi les meilleurs clients du monopole, en termes de dollars dépensés bien entendu.

Celui qui est présentement en cours propose 96 vins d'Espagne et du Portugal, à des prix variant entre 29,00 $ et 1,073,00 $ (voir ici). Ces vins doivent être commandés en ligne via les Services SAQ Signature, pour une livraison ultérieure en succursales.

Il ne faut confondre le Courrier vinicole avec le magazine CELLIER, qui lui paraît plus souvent durant l'année, proposant des vins moins dispendieux, et que l'on peut se procurer à partir de dates précises dans certains des magasins de la Société des alcools du Québec.

De mémoire, le Courrier vinicole existe depuis quinze ans, si ce n'est plus. Dès le début, je me suis inscrit afin de recevoir par catalogue et par courriel les différentes offres. J'ai ainsi commandé au fil du temps certains des produits qui m'intéressaient, la plupart prenant la direction de ma cave à vin.

La SAQ vend ainsi à chaque année pour des millions de dollars de vins de haute et de très haute gamme auprès de cette clientèle souvent composée de fins connaisseurs... et en moyens pour la plupart.

Un petit changement

Il y a quelques semaines j'ai reçu par courriel, ainsi que j'imagine les milliers de membres du Courrier vinicole, le message qui suit :

Bien qu'officiellement la SAQ nous dise que cette exigence s'insère dans "une optique de centralisation des communications"(voir ici), il est quelque peu surprenant, après avoir réussi à me contacter par courriel avec succès depuis toutes ces années, que celle-ci déclare qu'à compter du 25 février 2016, elle ne sera plus en mesure de le faire si je ne suis pas détenteur d'une carte Inspire!

S'il y avait une catégorie de clients sur lesquels le monopole possédait déjà et depuis des années les données (nom, adresse, téléphone, courriel), c'était bien celle de ses membres du Courrier vinicole. Que ceux-ci soient inscrits à SAQ Inspire ne lui donnera pas plus d'informations.

Alors pourquoi, soudainement, la carte Inspire devient-elle indispensable pour qu'un courriel de sa part puisse être acheminé vers ses clients de longue date? Notre système monopolistique d'état est-il devenu si bureaucratisé que tout doit absolument entrer dans le même moule? On dirait bien que oui. Seront-ils seulement bientôt capables de téléphoner à un client si celui-ci ne possède pas de carte Inspire? Je blague, évidemment, mais sait-on jamais?

Une décision personnelle

Vous aurez compris que je n'ai pas de carte Inspire et que je n'en désire pas, pour différentes raisons et motifs personnels.

À titre d'indice, même si certains trouveront ça un peu bizarre, je n'ai pas non plus aucune carte du type Air Miles. Je ne suis pas prêt à sacrifier l'historique des mes achats personnels qui valent de l'or pour le marketing des entreprises, pour les quelques miettes que l'on est prêt à me donner en retour. Pas plus que je ne suis prêt à laisser une tierce partie entrer dans ma vie privée. Savoir que Big Brother m'épie en tout temps et engrange à des fins commerciales mes informations personnelles et mes préférences d'achat, très peu pour moi.

C'est mon choix, et c'est mon droit.

Je sais qu'aujourd'hui la plupart des gens s'en foutent, mais ce droit à la vie privée obtenu de haute lutte est important pour moi et je ne veux pas m'en départir. Question de principe. Personne ne m'obligera à faire ce que je ne veux pas faire, encore moins cette exigence discriminatoire.

Réfléchissons un peu

Bien sûr, on jure sur la Bible à la SAQ que ces données ne seront pas vendues ou remises à personne. Mais parfois, les choses changent.

Qu'arrivera-t-il, par exemple, à vos données personnelles si la SAQ devait être un jour privatiser? Ce n'est pas ce que je souhaite, mais dans la vie, il faut souvent envisager le pire... lequel arrive plus souvent qu'on ne l'imagine.

Autre chose aussi. Quand votre patron vous ordonne de faire quelque chose, le faites-vous? Oui, si vous tenez à votre travail. Qui est le patron de la SAQ? Le ministre des Finances du Québec. Ne me dites-pas que vous l'ignoriez, tout de même! Imaginons que Revenu Québec ait des doutes sur les revenus réels d'un particulier. Revenu Québec pourrait alors demander à la SAQ pour combien cette personne achète d'alcool par année, donnée disponible grâce à la carte Inspire.

Si ce contribuable a déclaré des revenus de 28 000 $ et qu'il a acheté pour cette même année pour 10 000 $ à la SAQ, je crois qu'il pourrait avoir à fournir quelques explications. Ne me dites pas que c'est impossible, le gouvernement utilisant de plus en plus de telles informations croisées entre ses ministères pour fins de vérification. Et je vous rappelle que la SAQ et Revenu Québec relèvent du même ministère, celui des Finances.

Il est quelque peu ironique que certaines personnes, pour épargner 10-15 $ par année avec le programme SAQ Inspire, pourraient devoir payer des centaines, voire des milliers de dollars en impôts impayés, sans compter les intérêts et les pénalités, trahies par leurs achats d'alcool.

Rassurez-vous, je n'ai rien à cacher au fisc pour ma part. La protection de ma vie privée est mon principal motif de ne pas m'inscrire au programme de la carte Inspire.

Mais je le répète, ceci relève d'une décision personnelle. Je ne porte aucun jugement sur les personnes qui en possèdent une.

Lorsque suffisamment de données seront colligées sur les détenteurs de la carte Inspire et que les courriels commenceront à entrer dans votre boîte de réception cet automne, les détenteurs comprendront pourquoi une adresse courriel est obligatoire pour avoir cette carte. Certains voudront peut être alors s'en départir. Pas si simple que ça. Vous comprendrez alors tous les sens du mot "adhérer" quand il s'agit d'annuler.

Libre et volontaire

Lors de l'introduction de cette carte, la direction du monopole avait pourtant dit et écrit que personne ne serait obligé de participer à ce programme, tel qu'on peut le lire à la dernière ligne de ce communiqué, lorsque la Société des alcools du Québec avait annoncé en primeur l'introduction prochaine de sa carte Inspire.

Une participation gratuite et volontaire, avait-on dit. Je ne pense plus que ce soit maintenant le cas, car celle-ci devient dorénavant obligatoire si l'on désire recevoir de l'information de la part du monopole et continuer à pouvoir bénéficier de l'ensemble de ses services.

On est rendu là. C'est quoi la prochaine étape? Des portes de succursales qui ne s'ouvriront que si l'on y glisse dans un lecteur sa carte Inspire? Voilà ce que, poussé à l'extrême, ce concept pourrait donner.

Vous riez? Déjà, afin de pouvoir s'inscrire aux nouveaux cours de formation SAQ-ITHQ, vous devez être membre du programme SAQ Inspire.

Résumons : réception par courriel d'offres du Courrier vinicole, dégustations, repas avec des producteurs, voyages, cours de formation, tout ceci n'est désormais plus accessible qu'aux personnes qui ont accepté de dévoiler leurs données personnelles au programme SAQ Inspire. On voudrait que les personnes qui refusent d'y adhérer se sentent comme des clients de deuxième classe que l'on ne procèderait pas différemment.

Je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec certains pays où il y a des élections, mais où on ne peut voter que pour un seul parti politique pour lequel on doit bien sûr détenir... une carte de membre. Les sectes, très peu pour moi. Je préfère garder toute ma liberté.

Si la SAQ n'était pas en situation de monopole, ce type de décision arbitraire m'importerait peu. Je pourrais toujours allez acheter mon vin chez l'un de ses concurrents si on m'impose des conditions qui ne font pas mon affaire. Mais non, puisqu'au Québec nous sommes des acheteurs captifs. Si le système devient autocrate, il mène alors à l'abus de pouvoir.

Et si...

Je ne me berce pas d'illusions. Je suis probablement l'un des seuls à penser ainsi. Mais je trouve qu'avec cette obligation pour les clients du Courrier vinicole de s'inscrire au programme SAQ Inspire, le monopole prend certains risques. Qu'arrivera-t-il si seulement 10 ou 20 % des clients actuels refusent de se plier à cette exigence et cessent de placer leurs commandes, faute de recevoir les informations par courriel comme avant? Il y a ici plusieurs millions de dollars en jeu.

Alors Bye Bye Courrier vinicole, car c'est ici que nos chemins se séparent. Tes exigences entrent en contradiction avec certains de mes principes qui sont non négociables. J'ai décidé de voter avec mon portefeuille. Sache cependant que ce n'est pas moi qui te quitte, mais bien toi qui ne désire plus me parler.

P.S. (1) Si tu décides de passer outre à ta propre règle et décides tout de même de m'écrire, je te répondrai avec plaisir.

P.S. (2) Je viens de voir que David Pelletier, alias le Sommelier fou, a publié ceci sur sa page Facebook. Pas bête, ce David. J'ai suivi son conseil et j'ai appelé. Il est aussi possible de faire connaître son opinion par courriel à l'adresse info@saq.com. On verra bien.

Suggestions de vins de la semaine:

Mon TOP 5 des vins offerts par le nouvel arrivage CELLIER 100 % Italie

2ième partie : 10 mars 2016

Disponibles (pour le moment) même sans carte Inspire

Le blogue personnel d'Yves Mailloux : Club des Dégustateurs de Grands Vins

Pour vos commentaires, questions, suggestions, etc., écrivez-moi en privé à : clubdgv@gmail.com

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