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Syndicalisme et développement international: un rempart contre l'exclusion

L'inclusion de la paix et de la sécurité, la participation démocratique, la primauté du droit et l'égalité entre les sexes essuient des reculs marqués depuis 10 ans.
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Ce billet du blogue Un seul monde, une initiative de l'AQOCI et du CIRDIS, a été écrit par Denise Gagnon, directrice du service de la solidarité internationale à la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) et présidente du Centre international de solidarité ouvrière (CISO). Une version plus longue de cet article a initialement été publiée le 9 mars 2015 dans Le Carnet de Louis Favreau de la Chaire de recherche en développement des collectivités (CRDC).

La population canadienne est généralement peu au courant de ce que le syndicalisme fait en matière de solidarité internationale, et pourtant, il existe une longue tradition de coopération syndicale au Canada. Cette coopération vise par exemple à coordonner les stratégies, développer des liens, contribuer au dialogue, dispenser des formations, développer des espaces de solidarité au sein d'organisations syndicales internationales, comme la Confédération syndicale internationale, et des alliances stratégiques pour un développement inclusif.

La coopération internationale : un prolongement de l'action syndicale

La coopération au développement est donc partie intégrante de l'action syndicale. Elle peut prendre diverses formes, allant de la mutualisation des services, la défense des droits, l'amélioration des infrastructures, à des initiatives économiques. Le mouvement syndical participe activement aux activités en coopération, tant ici qu'à l'étranger, pour des projets bien concrets.

C'est la raison pour laquelle les syndicats veulent y faire reconnaître l'importance de leur action pour la vie associative et démocratique afin de contrer la pauvreté et l'exclusion sociale.

Réunion du comité des femmes travailleuses au Sénégal, 2010 © Michèle Asselin

Les relations entre le mouvement syndical et les mouvements sociaux et coopératifs remontent aux origines des syndicats. Les premières associations de travailleuses et de travailleurs se sont formées en Europe. Au XVIIIe siècle, les syndicats avaient d'ailleurs plus le profil de coopératives que la forme actuelle.

Le monde du travail a connu plusieurs mutations depuis. Les syndicats sont devenus acteurs du développement social jusqu'aux années 1980. Or, les attaques que le syndicalisme subit sous le poids de la mondialisation et des politiques néolibérales freinent lourdement son action.

Depuis la crise financière de 2008, les injustices ont entraîné une perte de confiance envers un système de marché devenu fondamentalement inéquitable. Plusieurs travailleuses et travailleurs ont non seulement perdu leur emploi, mais aussi leur protection sociale, garante de leur émancipation, au profit des riches financiers et spéculateurs de ce monde identifiés comme les premiers responsables de cette crise financière mondiale.

Les syndicats québécois et canadiens étaient très actifs en coopération internationale avant les coupes de l'aide internationale, alors que les syndicats négociaient des fonds de contrepartie avec l'État, qui représentaient des contributions importantes.

Ces coupes ont mis en péril les acquis des projets de développement de proximité peu coûteux et efficaces. Par conséquent, l'inclusion de la paix et de la sécurité, la participation démocratique, la primauté du droit, l'égalité entre les sexes, et la protection de l'environnement, qui sont les bases de la coopération syndicale, essuient des reculs marqués depuis 10 ans.

Un changement de paradigme s'impose

Le mouvement syndical est un acteur clé pour le développement, qui doit être fondé sur les droits de la personne. Une approche qui ne s'attaque pas aux causes profondes et structurelles de la pauvreté et privilégie plutôt des solutions rapides et sur le court terme ne sera ni efficace, ni légitime, ni durable.

Il faut mettre en œuvre de nouveaux mécanismes de participation démocratiques et d'appropriation citoyenne. Le réseau de la coopération au développement de la Confédération syndicale internationale favorise une telle vision basée sur les principes suivants : appropriation démocratique, autonomie, partenariat, transparence, responsabilité, cohérence, inclusion, égalité et pérennité des projets de développement.

L'articulation des orientations syndicales repose sur la dimension sociale du développement. Une telle approche fait aussi consensus à l'Organisation internationale du travail, seule organisation des Nations unies qui est tripartite (gouvernements, syndicats et employeurs), et préconise un développement basé sur l'emploi décent. Il s'agit là d'une dimension essentielle à une mondialisation plus juste afin d'assurer la paix et la prospérité pour tous et toutes.

Un défi mondial pour l'avenir : contrer le travail précaire

Les programmes d'austérité contribuent grandement à la pauvreté et à l'accroissement des inégalités. Au début des années 1990, ces mesures étaient qualifiées de programmes d'ajustement structurel par la Banque mondiale dans les pays en développement, et ont jeté à la rue des millions de personnes qui détenaient des emplois dans les services publics, grossissant ainsi les rangs des travailleuses et travailleurs marginalisés dans l'économie.

Aujourd'hui, les programmes d'austérité entraînent toujours le chômage, la pauvreté, l'inégalité, la discrimination, la précarisation et le développement d'une économie informelle. On entre dans cette économie de survie non par choix, mais par nécessité.

On estime dans nombre de pays la part de l'économie informelle à plus de 50 %. Les personnes marginalisées sont généralement exposées à de plus grands risques de pauvreté et de maladie. Elles sont souvent hors de portée des régimes de protection sociale. La Conférence internationale du travail a adopté en 2015 une recommandation afin d'offrir un cadre normatif pour faire face à ce problème mondial.

La solidarité, pas la charité

C'est dans cette perspective que les syndicats s'impliquent en solidarité internationale. Au début, les syndicats ont adopté une approche philanthropique. Aujourd'hui, les syndicats visent davantage des initiatives structurantes, pour une coopération de réciprocité. Au Québec, depuis 40 ans, plusieurs personnes militent activement en solidarité internationale au Centre international de solidarité ouvrière (CISO) dans les activités d'éducation ou des missions.

Le mouvement syndical doit relever d'énormes défis. Il doit innover pour élargir ses bases et mondialiser les solidarités en contrepoids aux enjeux de l'heure : inégalités montantes, risques environnementaux, pouvoirs exorbitants des multinationales, privatisations, répression envers les défenseurs des droits, migrations forcées, conflits régionaux, pour ne nommer que ceux-là.

Il importe donc de faire mieux faire connaître ses actions pour que les mouvements sociaux se renforcent mutuellement. Le mouvement syndical international demeure un rempart important contre les inégalités aujourd'hui comme hier.

N'hésitez pas à contacter Charles Saliba-Couture, fondateur et coordonnateur du blogue Un seul monde, pour en savoir davantage sur le blogue ou connaître le processus de soumission d'articles. Les articles publiés ne reflètent pas nécessairement les points de vue de l'AQOCI, du CIRDIS ainsi que de leurs membres et partenaires respectifs.

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