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L'anxiété, une déconnexion d'avec soi qui se traite

Depuis 200 ans, des chercheurs, élus et juges ont varlopé l'intuition qui justement nous connecte à notre nature humaine comme porte d'entrée vers notre conscience créative.
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Dans cet article du Devoir, l'ombudsman de l'Université de Montréal note un accroissement de déséquilibre mental chez les étudiants. Ce problème précède certainement l'âge universitaire. Il s'agit d'une déconnexion graduelle du cœur émotif pour adhérer à la société du raisonnable.

Le problème d'anxiété est beaucoup plus qu'un comportement à traiter. Il s'agit de rétablir la capacité d'autonomie à ressentir son propre système plutôt qu'à raisonner d'après les intérêts d'un système extérieur (social, professionnel, politique, etc). Plus spécifiquement, le projet collectif actuel, basé sur la productivité, se préoccupe peu de l'identité humaine à la base de l'équilibre mental.

Avoir de l'identité, c'est être propriétaire d'un territoire abstrait, le mental, dont la direction nous appartient et qui repose sur les capacités créatives de l'être. Cette créativité est l'oxygène de notre quotidien. Or plus nous construisons nos identités à partir de la logique, plus nous nous déconnectons des sources d'oxygènes de l'esprit. Ce travers produit de l'angoisse, puis de l'anxiété et des problèmes psychosomatiques s'ensuivent. Multipliez par un nombre croissant d'individus, et la société manque d'air. La morbidité atteint les corps et le système de santé ne peut plus fournir.

L'anxiété des étudiants, je l'ai vécue à l'université il y a une vingtaine d'années. À l'époque, il nous suffisait d'échanger entre étudiants pour nous apercevoir que nous n'étions pas seuls à vivre des tensions psychologiques, voire un stress physique contreproductif. Une fois la glace brisée, une couche de pression tombait. Nous avions encore le droit de nous ressentir...

Aujourd'hui, il y a les palliatifs: les antidépresseurs et autres béta-bloqueurs utilisés en période d'examen par les étudiants. Or les médicaments soulagent un mal qui s'accroîtra s'il n'est pas considéré dans toutes ses dimensions.

Se considérer: c'est cela qu'il faut reconstruire d'abord. S'arrêter, s'observer, ne pas se juger, respirer et s'apercevoir que le problème d'anxiété est une affaire de mauvaise hygiène de vie. L'anxiété vient d'un cercle vicieux: plus on réfléchit, plus on déconnecte de notre cœur émotif, plus notre corps obéit à des décisions idéologiques, plus l'être devient rigide; moins il accepte de quitter son idéologie, plus son cœur émotif asphyxie; et plus il est déconnecté du cœur, plus il cherche des solutions avec son cerveau réflectif, moins il a envie de s'intérioriser pour ressentir dans son propre système ce qui le remettrait, lui, en équilibre. Douter de son ressenti appelle une surenchère de la raison qui produit une mauvaise hygiène. C'est le pattern habituel engendré par l'incapacité à respecter son être.

Les gens croient qu'ils sont des individus parce que la charte des droits individuels nous vend l'idée. Mais si nous sommes incapables de prendre des décisions en fonction de notre système intérieur, alors nous ne sommes pas de réels individus; notre vie appartient à un autre système.... Et plus on dénigre notre individualité, plus le corps se tend. Pour en sortir, il faut apprendre à connaitre les mécanismes de l'âme et de l'esprit qui construisent notre identité sur la base d'une conscience créative.

La chaîne instable de productivité reflète notre méconnaissance de soi

Dès l'aube, nos enfants sont éduqués pour se conformer à un système d'éducation qui cherche dorénavant à fabriquer de bons soldats pour alimenter la chaîne de production, sur la base d'une réalité purement économique. Et aujourd'hui, certains s'étonnent de voir que ces êtres ne sont plus aptes à se rendre normalement vers le banc d'école, pour ne pas dire à l'abattoir.

Cette chaine de productivité est favorisée par nos élus qui, eux, dirigent dorénavant l'État non plus pour les citoyens, mais pour les entreprises productrices. Nos politiciens technocrates nous ont répété que tout est affaire d'économie. À force de répéter un message, un être même intelligent intériorisera ce message comme une vérité sans contester, s'il ne se connait pas. Alors pour contrôler les peuples, il vaut mieux encourager la méconnaissance du soi. Et ceux qui refusent de se déconnecter de leur cœur émotif seront pointés du doigt et ostracisés de ce système désormais producteur d'instabilité et de morbidité collective.

Le signal erroné d'une identité déshumanisée

Le système juridique n'est pas en reste au contraire, il serait plutôt une courroie importante dans la construction de notre identité collective: la société de droit à la sauce corporative. La surenchère du raisonnable est stimulée ici par la dualité de points de vue d'experts qui ne concernent plus ni l'accusé ni la victime. Des experts se concurrencent pour avoir raison et pas nécessairement parce que c'est «vrai». Ainsi le système juridique envoie le signal qu'un Guy Turcotte n'a pas besoin de faire de la prison après avoir commis un double crime sur ses enfants. Ce cas particulier au Québec, et contre lequel une majorité s'est insurgée reflète bien le bris entre l'idéologie corporatiste - élevée au rang des dieux par le pouvoir moral des juges - et l'intuition, que la société de droit a évacué pour rendre apparence de justice.

Ce système encourage les gens à croire que la raison est parfaite dans son jugement et donc supérieure à l'intuition. Et nous y croyons parce que nous donnons au «juge» plus d'autorité qu'à notre propre ressenti. Le signal erroné que le système de droit envoie à propos de la nature humaine est retourné contre quiconque le conteste.

Depuis 200 ans, des chercheurs, élus et juges ont varlopé l'intuition qui justement nous connecte à notre nature humaine comme porte d'entrée vers notre conscience créative. La science a fait de même. Une séparation entre l'intuition du principe remplacée par la seule logique comme base créative a fait dériver notre science vers la spéculation. Ajoutons à cela les jeux d'egos et enjeux financiers qui rigidifient et enferment la pensée créative dans un sectarisme bien ficelé. Et voilà l'être déconnecté de son oxygène spirituel naturel. Est-ce cela que les jeunes universitaires pressentent?

L'esprit n'est pas de la réflexion mais de l'intelligence créative qui nous amène à maitriser l'inconnu. La réflexion, elle, ne crée rien, elle organise les pensées connues et ne reconnait pas ce qui est inconnu. Pour reconnaitre les pensées créatives, il faut se connaitre en profondeur, ce qui nous amène à connaitre la source de la pensée créative et à la manipuler avec grâce.

Retrouver l'essence

Les universités ont perdu leur âme depuis qu'elles ont succombé au charme du raisonnable au service des entreprises qui financent leur propre dogme, en nommant des chaires à leur nom. En brimant l'essence du savoir pour n'en conserver que l'aspect opérationnel, on marche à contrecourant de la nature humaine. Et l'orgueil de cette «science» nous empêche de voir que l'intelligence ne réside pas seulement dans le cerveau central, mais dans tous les brins d'ADN où notre âme sait peser le juste et rejeter ce qui ne l'est pas.

L'étudiant sensible et encore ancré dans sa nature propre aura plus de mal à suivre le rythme d'une science ontologiquement malade car incomplète en essence. Ce jeune être doit apprendre à ne pas sous-estimer son ressenti devant un système intimidant et de plus en plus déconnecté du réel. Lorsque nous sommes anxieux, c'est que quelque chose de non juste est en train de nous miner. Alors l'être ne doit pas se sentir redevable devant ceux qui voudraient une justification strictement rationnelle à l'état de son système. Il existe des outils qui donnent la force de faire fi de l'intimidation du système.Choisir d'être accompagné pour gérer notre sentiment de vulnérabilité est un signe d'intelligence.

L'humain n'est pas que raisonnable. En brimant les autres voies du savoir, les universités, les politiciens et les chaires corporatives musellent la «science de l'équilibre» qui bouille à l'intérieur de chacun.

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