Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

«Omogenia»: comment la Grèce nourrit sa diaspora

En ces temps mouvementés, je pense à ces centaines de milliers de personnes qui ont décidé de quitter la Grèce pour espérer trouver ailleurs une meilleure qualité de vie.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

En ces temps mouvementés pour la Grèce et l'Europe, à l'heure où les décisions concernant le maintien ou non du malade européen dans la zone euro se prennent, je pense à ces centaines de milliers de personnes qui ont décidé de quitter leur pays pour espérer avoir ailleurs une meilleure qualité de vie.

Le cas des Grecs est si proche de celui des jeunes Libanais qui quittent en masse et depuis de nombreuses années le pays des Cèdres. Par volonté intellectuelle ou par obligation économique, la sève de ces pays méditerranéens coule un peu plus loin en Europe, aux États-Unis ou au-delà, recréant des liens amicaux, familiaux et professionnels. Au départ si ce n'est que pour quelques années, c'est finalement trop souvent pour toute une vie.

Je pense surtout aux jeunes Grecs qui se sont le plus massivement exprimés contre les mesures d'austérité en disant «non» à 80% lors du référendum du 5 juillet. Il ne faut pas chercher très loin la cause de ce «non»: on estimait fin 2014 le chômage des jeunes grecs à plus de 50%!

Si un jeune sur deux ne trouve pas d'emploi dans son pays que fait-il? Il s'exile. Et il est facile de partir à 18 ou 20 ans pour terminer des études ou pour effectuer un stage, acquérir une expérience professionnelle enrichissante ou apprendre une langue. On se dit que ce n'est que pour quelques mois, quelques années tout au plus, et puis c'est finalement plus facile de rester loin de son pays meurtri. Le déchirement sentimental du début laisse la place au pragmatisme du quotidien. Que ce soit en Amérique, en Australie, en Angleterre, en France (malgré un chômage gangrenant) ou ailleurs, une partie des Grecs, comme des Libanais, s'intègrent si bien professionnellement (et personnellement) qu'il serait alors «stupide» de revenir au bercail. C'est ainsi qu'un pays nourrit sa diaspora.

Il est important de se pencher sur les causes de cette diaspora - ironiquement le mot est d'origine grecque - dite «omogenia» en Grèce, d'autant plus que l'hémorragie s'annonce de plus en plus grande avec les récents événements.

On estime à environ 7 millions le nombre de Grecs qui vivent à l'extérieur de leur pays, qui abrite plus de 10 millions d'habitants. C'est un nombre important mais, toute proportion gardée, très loin des 15 millions de Libanais vivant à l'étranger pour un petit total de 4 millions de locaux. Alors que la cause principale de la diaspora libanaise est l'instabilité du pays post-guerre civile, pour les Grecs les raisons contemporaines de cette fuite sont principalement au nombre de trois: économique, politique ou intellectuelle. On pourra bientôt supprimer les deux dernières.

Pour des pays comme la Grèce où le Liban, où les valeurs familiales sont primordiales et au cœur de la société, cette diaspora n'est pas une mince affaire. Malgré leurs nouvelles vies réussies, les exilés s'avèrent viscéralement attachés à leur pays d'origine. Et même si nous vivons à l'ère de la communication et des réseaux sociaux, qui donnent l'illusion de rester en contact permanent, et si ce phénomène permet souvent d'ouvrir les esprits, de favoriser l'enrichissement et le brassage des peuples, dans un sens comme dans l'autre, il divise également et rend surtout le quotidien de milliers de personnes de plus en plus difficile.

À l'heure où l'avenir de la Grèce se décide à Bruxelles et en empruntant une si belle phrase au regretté Michel Berger, je veux penser aux Grecs «qui sont loin de chez eux, et qui ont dans leurs yeux quelque chose qui fait mal qui fait mal».

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Crise économique en Grèce

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.