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La littérature au-dessus de la mêlée!

Je joins ma voix à celle de Jérôme Pruneau, directeur général de la Diversité artistique Montréal pour dénoncer, comme il l'a relevé dans son essai, cette méprise envers les artistes de la diversité et cette attitude de manque caractérisé de considération envers les auteurs de la diaspora.
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Deux grands festivals de littérature ont lieu ces jours-ci à Montréal et à Trois-Rivières. La seizième édition du FIL (Festival International de la Littérature) qui se déroule du 24 septembre au 4 octobre et la trente-et-unième édition du FIPTR (Festival International de Poésie de Trois-Rivières) qui aura lieu du 2 octobre au 11 octobre 2015. Ce sont deux événements majeurs dans la vie culturelle au Québec et au Canada. Ils réuniront des centaines d'écrivains et de poètes du monde entier.

Cette année, en parcourant le programme proposé par ces deux manifestations littéraires, vous ne pouvez pas imaginer combien ma surprise puis ma tristesse et enfin mon amertume étaient grandes de ne trouver aucune mention ni même un clin d'œil, ni de loin ni de près, aux grands drames qui secouent notre planète. Aucune évocation, aucune conférence, aucune rencontre, aucune journée dédiée à la détresse de l'humanité qui s'agglutine aux portes de l'Occident.

Ni la tragédie des réfugiés qui se jettent sur les barbelés aux frontières de l'Europe, ni les enfants qui se noient dans la mer devant les yeux des caméras, ni la destruction de Palmyre, ni les massacres des ethnies en Syrie et en Irak, ni la guerre au Yémen, ni les attentats qui frappent régulièrement les villes et les villages en Occident comme dans le reste du monde ne semblent intéresser ni interpeller les organisateurs de ces deux grands rendez-vous de la littérature.

Aucun écrivain, non plus, de ces pays dévastés par la guerre civile et par l'intervention de la coalition internationale n'a été invité à ces deux hauts lieux de la littérature mondiale. À défaut d'auteurs de ces régions, ils auraient pu, au moins, inviter des écrivains de la diaspora arabe, là, non plus, aucun auteur Néo-Québecois ou Néo-Canadien ne participe. Pourtant, il n'en manque pas à Montréal et ailleurs dans le pays. Des plumes importantes de cette diaspora demeurent au Canada comme Naim Kattan, originaire de l'Irak, May Telmissany et Mona Latif Ghattas de l'Égypte, les Libanais d'origine comme Nadine Ltaif, George Abou-Hsab, Rawi Hage, Abla Farhoud, Wajdi Mouawad, les Tunisiens Tahar Bekri et Hédi Bouraoui, les Marocains Abdelhak Serhane, Redouane Najib, Sofia Benyahia, les Algériens Nadia Ghalem, Salah Benlabed, Soraya Benhaddad, Mouloud Belabdi, Ouanessa Younsi, Nacéra Belloula, Karim Akouche, Hamid Benchaar, Katia Belkhodja, SEK Beddiari et la Palestinienne Yara El-Ghadban.

Que la terre brule et que la lave la recouvre, nos promoteurs de la chose littéraire persévèrent à concocter des programmes au-dessus de tout soupçon. Bref, que Persépolis, Ctésiphon et Uruk se voilent, que Sabratha et Cyrène s'enfoncent dans le sable, que Palmyre s'effondre sur ses propres décombres, que Pétra, Ninive et Nippur, les yeux bandés, appréhendent leur tour, pour retourner à la poussière, que le déluge les emporte tous, les organisateurs restent de marbre. Voyez-vous la littérature est noble et pure, elle dédaigne les questions terre-à-terre, elle ne peut s'abaisser au niveau des catastrophes et souffrances humaines! La littérature est au-dessus de la mêlée, pensent-ils.

Je joins ma voix à celle de Jérôme Pruneau, directeur général du DAM (Diversité artistique Montréal) pour dénoncer, comme il l'a relevé dans son essai, cette méprise envers les artistes de la diversité et cette attitude de manque caractérisé de considération envers les auteurs de la diaspora. Selon Jérôme Pruneau les artistes de la diaspora ne sont pas représentés dans les instances culturelles du pays. Il affirme dans un article de La Presse que

« Le problème du manque de diversité ethnoculturelle au petit et au grand écran, comme du reste au théâtre et dans la plupart des autres disciplines artistiques, est récurrent au Québec.»

Et il ajoute que

« Très peu d'artistes dits de la diversité sont visibles ou présents, on les a oubliés, mis de côté, jusqu'à les ignorer carrément »

s'indignant que ce soit « une sorte d'ostracisme dénié, insidieux, ineffable ».

Dans ces moments difficiles que traverse la planète, avec, surtout, la montée des intégrismes et des extrémismes de toutes parts, on ne fait même pas le geste de présenter les écrivains de la communauté arabe, celle montrée du doigt de l'inquisition. C'est qu'elle ne se compose pas que d'imams et de prédicateurs, il y a aussi des hommes de culture et des artistes et des poètes et des dramaturges. L'art, n'est-il pas le meilleur antidote à l'extrémisme religieux?

Ce déni ou cet oubli démontre le peu d'intérêt des instances culturelles du Québec à s'ouvrir aux écrivains de la diversité. C'est une méprise flagrante, consciente ou inconsciente, de la part des organisateurs de ces événements.

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