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J'ai l'impression qu'il ne se passe pas une semaine sans que la classe politique nous montre ce dont elle est capable en matière d'abus...
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J'ai l'impression qu'il ne se passe pas une semaine sans que la classe politique nous montre ce dont elle est capable en matière d'abus... Dans ce texte, je fais référence particulièrement à ce qu'on pourrait appeler l'« affaire Bolduc ».

En effet, on a appris récemment qu'Yves Bolduc, ancien ministre de la Santé sous Jean Charest et actuel ministre de l'Éducation sous Philippe Couillard, a empoché une généreuse « prime » de 215 000 $ pour prendre en charge une liste de patients, lorsqu'il était dans l'opposition. À peine 19 mois plus tard, il a dû laisser tomber ces patients : « [...] Le premier ministre m'a demandé d'occuper les fonctions de ministre de l'Éducation et malheureusement je ne peux continuer la pratique médicale. » Pauvre M. Bolduc...

La nouvelle était sortie en octobre 2012 : un mois après la défaite de son parti, le Dr Bolduc retournait à la pratique de la médecine à temps partiel, affirmait-il. À Ottawa, on critique les sénateurs qui vaquent à d'autres occupations professionnelles tout en empochant un salaire annuel de près de 140 000 $. La même critique peut s'adresser aux membres de l'Assemblée nationale - et à tout élu - tant qu'à moi. Lorsqu'on choisit de se porter candidat à une élection et qu'on est élu, on ne devrait pas avoir le droit de piger dans plusieurs pots d'argent public. Dans la vie, il faut faire des choix...

Or, Yves Bolduc s'est trouvé à tirer profit d'un programme qui est sa propre création (pendant ses années comme ministre de la Santé, soit de 2008 à 2012). De citer Réjean Hébert, ministre de la Santé dans le gouvernement minoritaire de Pauline Marois : « Il a profité d'une brèche qu'il connaissait bien dans le système. Je ne comprends pas comment, en travaillant à temps partiel, on peut inscrire 1 500 patients par année. [...] »

Comme on pouvait s'y attendre, les bons docteurs Couillard et Barrette se sont portés à la défense de leur confrère... Les actuels premier ministre et ministre de la Santé ont affirmé qu'il n'y avait rien d'illégal dans ce qu'avait fait Yves Bolduc, qu'il avait suivi les règles en place. Il va sans dire que Bolduc n'a rien fait d'illégal : il a simplement profité d'un programme qu'il avait lui-même fait adopter lorsqu'il était ministre de la Santé. Mais est-ce moralement acceptable de piger dans autant de pots d'argent public et de persister à défendre l'indéfendable dans un contexte d'austérité imposé aux autres par les mêmes acteurs politiques?

Le dictionnaire Larousse propose la définition suivante du mot prime : « Somme d'argent ou don accordés à titre de récompense ou d'encouragement ». Pendant son séjour dans l'opposition, M. Bolduc a touché son salaire de député et un salaire de médecin. Était-il réellement nécessaire de lui verser une prime variant de 100 $ à 200 $ par patient pris en charge pour l'« encourager » à pratiquer une activité professionnelle qu'il avoue lui-même aimer pratiquer? Quel sens devons-nous donner à « prime » dans un tel contexte? S'agirait-il d'un néologisme?

Encore une fois, les Québécois ayant voulu du changement en votant pour le PLQ le printemps dernier seront fort probablement déçus lorsque viendra le moment de dresser le bilan du premier mandat du gouvernement Couillard. Jusqu'à maintenant, c'est pas mal le maintien du statu quo; les abus sur le dos des contribuables se perpétuent. Philippe Couillard peut bien préférer parler en termes de vérité et de réalité que d'austérité, il peut difficilement déroger à une prémisse fondamentale sans perdre des plumes sur le plan de la crédibilité : avant d'en demander encore plus aux Québécois, il doit mettre fin à de tels abus au lieu de les cautionner.

Malheureusement, encore une fois, M. Couillard a préféré défendre un de ses partisans que défendre l'intérêt supérieur des Québécois. Pourtant, l'époque où on pouvait avoir le beurre et l'argent du beurre est révolue, si l'on se fie aux signaux lancés par nul autre que le premier ministre Couillard depuis son entrée en fonctions. Encore une fois, on semble être devant une situation « deux poids, deux mesures » qui avantage un membre du gouvernement.

Si Yves Bolduc aime tant pratiquer la médecine, rien ne lui empêche de démissionner de ses fonctions ministérielles et parlementaires et de reprendre sa pratique. Ce n'est pas comme s'il passera à l'histoire pour avoir été un grand ministre et parlementaire de toute façon... Quant au gouvernement, ses membres auraient intérêt à montrer l'exemple s'ils veulent avoir un tant soit peu de crédibilité au moment où ils laisseront tomber le couperet.

Comme électeur et contribuable, je ne demande rien de mieux qu'un gouvernement crédible qui prêche par l'exemple pour atténuer le cynisme qui m'habite depuis trop longtemps. Je ne peux pas me dire déçu de ce qui se passe, car je n'ai pas cru pour un instant que les choses changeraient sous Philippe Couillard. Mais il existe une expression en anglais dont ce dernier devrait s'inspirer : walk the talk!

Quant à Yves Bolduc, dont la crédibilité a été écorchée à plus d'une reprise depuis sa récente accession au conseil des ministres, invitons-le à repenser son refus de rembourser un traître sou de la généreuse prime qu'il a touchée. Mais soyons réalistes : son patron cautionne le tout, alors...

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