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Il était une fois un fisc trop vorace...

De toute évidence, le modèle social-démocrate dont le Québec s'est doté ne fonctionne plus. En clair, nous vivons collectivement au-dessus de nos moyens et nous nous tirons dans le pied si nous pensons que c'est en demandant à ceux qui font déjà largement plus que leur juste part d'en faire encore plus.
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C'est sans surprise qu'on apprenait la semaine dernière que l'impôt entrave l'économie québécoise selon une étude de l'Institut Fraser intitulée Compétitivité fiscale du Québec: une barrière à la prospérité. Cette étude compare les taux d'imposition des individus et des entreprises au Québec avec ceux des autres provinces canadiennes et des États américains.

Certains taxeront d'emblée l'Institut Fraser de «méchant think tank de droite», mais les chiffres sont les chiffres. Pour deux des trois niveaux de revenu annuel évalués (50 000 $CA et 75 000 $CA), les contribuables québécois sont les plus taxés en Amérique du Nord. À un niveau de revenu annuel de 150 000 $CA, les Québécois arrivent au deuxième rang des contribuables les plus lourdement imposés sur le continent, après Les Néo-Écossais. Et c'est sans compter la pléthore d'autres taxes, droits et frais de toutes sortes que perçoit annuellement l'État québécois. Selon l'Institut Fraser, notre fardeau fiscal est tellement lourd qu'il nuit à la croissance de notre économie. Une conclusion contraire serait surprenante.

Bien entendu, les impôts sont essentiels pour couvrir le coût des services publics de base. Cependant, malgré la lourdeur de notre fiscalité, nous peinons à financer adéquatement nos services publics essentiels : le réseau de la santé - qui accapare grosso modo la moitié du budget annuel de l'État québécois - est affligé par de graves problèmes d'accessibilité, les commissions scolaires coupent dans les services aux élèves, l'état de nos infrastructures collectives est lamentable, etc. De toute évidence, le modèle social-démocrate dont le Québec s'est doté ne fonctionne plus. En clair, nous vivons collectivement au-dessus de nos moyens et nous nous tirons dans le pied si nous pensons que c'est en demandant à ceux qui font déjà largement plus que leur juste part d'en faire encore plus que nous nous porterons mieux collectivement.

D'une part, l'État québécois maintient en place des structures totalement inutiles comme la Commission municipale du Québec et perpétue le dédoublement de systèmes comme celui de déclaration de revenus (nous sommes les seuls au Canada qui devons produire annuellement deux déclarations de revenus). C'est sans compter le véritable déluge de subventions et de crédits d'impôt qui déferle sur la province chaque année. D'autre part, depuis des années, ce sont toujours les mêmes qui sont appelés à contribuer davantage à l'assiette fiscale. Au Québec, les «riches» ont le dos large...

En effet, les 15 % de contribuables gagnant plus de 70 000 $ paient la moitié de l'impôt sur le revenu. Pour ce groupe, des services comme la santé et l'éducation sont loin d'être «gratuits»; de tels services leur coûtent très cher chaque année. Et ces contribuables qui sont devenus la vache à lait de l'État au fil des décennies en ont de moins en moins pour leur argent. Pour ma part, pas une année ne passe sans que j'aie la désagréable sensation de me faire flouer.

Il y a un exercice auquel j'ai toujours voulu me prêter, mais ce n'est toujours pas fait. Il faudrait que je comptabilise la totalité des sommes que je verse aux différents niveaux de gouvernement au cours d'une année donnée: impôt fédéral, impôt provincial, impôt foncier, taxe scolaire, taxes de vente, droits et frais de toutes sortes. Deux raisons expliquent ma procrastination : je suis trop occupé à travailler pour alimenter le fisc et je serais totalement découragé par le chiffre auquel j'arriverais après avoir additionné la totalité de ce que je contribue à la société.

Créée en juin dernier par le gouvernement de Philippe Couillard, la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise est chargée d'un mandat fort complexe, celui de formuler des propositions visant à accroître l'efficacité, l'équité et la compétitivité du régime fiscal tout en assurant le financement des services publics. Ce sera tout un défi à relever.

Comme on dit en anglais, «Too much tax kills tax» (trop d'impôt tue l'impôt). Par rapport à la plupart des États sur ce continent, le Québec est très généreux envers celles et ceux qui ne contribuent pas à l'assiette fiscale (il faut savoir qu'environ 40 % des contribuables québécois ne paient pas d'impôt provincial). Par contre, il est en train de carrément étouffer bon nombre des 20 % les plus riches qui paient 70 % de l'impôt total perçu - la classe dite «moyenne» qui fait l'objet d'innombrables ponctions de l'État. Or ce sont ces contribuables qui devraient pouvoir respirer un peu pour contribuer à faire prospérer notre économie. Toutefois, moins ils disposent de revenu disponible, moins ils sont en mesure de faire rouler l'économie. L'équation est à la fois simple et implacable.

Il faudra que les travaux de la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise soient plus que cosmétiques; une réforme fiscale en profondeur s'impose au Québec dans un double objectif: redistribuer plus efficacement les montants perçus en impôts et taxes, d'une part, et rendre le modèle de perception plus équitable envers ceux qui font vivre l'État québécois, d'autre part.

Et le temps presse... Le Québec s'enlise et son régime fiscal est en train d'étouffer son économie. La solution à nos problèmes de finances publiques ne passe pas par l'alourdissement d'un fardeau fiscal qui est déjà trop lourd. Comme contribuable déjà lourdement taxé, j'espère que Philippe Couillard et son gouvernement l'ont compris et qu'ils agiront en conséquence.

Mais quand je lis, par exemple, que le ministre de l'Éducation, Yves Bolduc (un homme dont la crédibilité est irrémédiablement entachée, selon moi), envisage de saccager le réseau de l'enseignement privé, ça ne m'inspire pas confiance. On ne règle pas des problèmes en en créant de nouveaux...

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