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Terrorisme: au nom de qui et de quoi?

Il y a quelque chose de gênant dans les campagnes «pas en mon nom» visant à se dissocier, en tant que musulmans, des terroristes islamistes. D'autant qu'elles ne «réhabilitent» pas les populations musulmanes aux yeux de certaines élites occidentales.
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Il y a quelque chose de gênant dans les campagnes « pas en mon nom » visant à se dissocier, en tant que musulmans, des terroristes islamistes. D'autant qu'elles ne « réhabilitent » pas les populations musulmanes aux yeux de certaines élites occidentales. Au Québec, l'initiative lancée par le jeune Ali Chebli à la suite des deux attentats de Saint-Jean et d'Ottawa, a certes connu un franc succès, mais ce succès demeure celui d'un jeune que les commentateurs ont d'ailleurs vite félicité pour son « rare courage » : sans doute « celui d'être sorti du lot ». En effet, de nombreux commentaires se sont réjouis, comme lors de chaque campagne, « qu'enfin quelqu'un se lève dans cette communauté » pour dénoncer le terrorisme.

Face à l'amalgame fait entre musulmans et terroristes, Ali - comme d'autres avant lui - a jugé bon de dire publiquement qu'en tant que musulman, il se dissocie du groupe État islamique tout en se donnant comme mission de lutter contre « le discours haineux et les actes des djihadistes ». Les intentions de ce jeune, tout comme celles des initiateurs et initiatrices de campagnes similaires, sont nobles et ça fait toujours plaisir de voir des jeunes prendre la parole sur la scène publique. Après, une fois qu'on a dit cela, une question mérite tout de même d'être posée. C'est celle de savoir si les groupes terroristes islamistes commettent réellement leurs atrocités au nom des musulmans ? Ce qui justifierait que des musulmans, comme notre jeune concitoyen, sentent le besoin de s'en dissocier.

Le fait est que ces groupes signent plutôt leurs actes au nom de l'islam et non pas au nom des musulmans. On conviendra qu'islam et musulmans, ce n'est pas la même chose. Et c'est à ce niveau qu'on peut aussi ressentir un certain inconfort dans les campagnes « pas en mon nom » en ce sens qu'elles participent, sans doute involontairement, à entretenir un autre amalgame, entre une religion et ses adeptes. Cet amalgame peut être perçu comme une entrave au droit à la critique des religions. Inversement, l'extrême droite, en Occident, use de façon volontaire de cet amalgame pour stigmatiser les populations issues de l'immigration musulmane. Il est en effet plus facile d'invoquer le droit à la critique des religions que de se définir comme raciste. L'extrême droite européenne, par exemple, prétend avoir peur de l'expansion d'un « islam réactionnaire et violent » et vouloir lui résister pendant que dans les faits elle s'attaque aux immigrants d'origines algérienne, marocaine, turque.... qui sont déjà largement discriminés dans la société.

Si des terroristes veulent s'inspirer de l'islam, du christianisme ou d'une autre religion, peut-on vraiment les empêcher de le faire? S'ils se réclament de l'islam est-ce une raison suffisante pour condamner cette religion et la considérer comme une religion de violence alors que des centaines de millions de musulmans vivent paisiblement leur foi, partout dans le monde? D'ailleurs, il est connu que les intégristes haïssent les musulmans. Ils leur reprochent de s'être éloignés des fondements de leur religion qu'ils n'interprètent qu'à l'aune du Moyen Âge.

A-t-on besoin de rappeler que les populations musulmanes sont les principales victimes du terrorisme? On peut même blâmer l'Occident - non pas les peuples, mais les gouvernements - d'avoir permis que, sur son sol, des extrémistes islamistes glorifient des boucheries commises dans les pays musulmans. Cela a été notamment le cas dans les années 90, quand les relais des groupes islamistes armés célébraient publiquement, depuis des capitales occidentales (Londres, Bonn et New York notamment), les assassinats d'intellectuels et de civils en Algérie.

Les groupes terroristes sont une minorité, mais ils ont des moyens financiers importants et c'est un secret de polichinelle que de désigner les monarchies du golfe comme leurs principaux bailleurs de fonds. Or, ces monarchies ne doivent leur survie qu'à leur soumission aux puissances occidentales et notamment aux É.-U. Cela ne signifie-t-il pas qu'au final les atrocités commises par les groupes terroristes le sont au nom de l'Occident ?

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