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Une tête brûlée dans la mêlée montréalaise

J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec Michel Brûlé au printemps 2011, à une époque où il ambitionnait déjà de se lancer dans la politique municipale. Je réalise, finalement, que ses propos n'ont pas pris une ride avec le temps. J'en profite donc pour lui redonner la parole à nouveau en remaniant cet entretien réalisé à bâtons rompus.
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Quelques impressions sur Michel Brûlé, un électron libre sur l'échiquier municipal

Michel Brûlé, cet éditeur coloré et fort en gueule, vient d'annoncer sa candidature pour la course à la mairie de Montréal. N'y allant pas par quatre chemins, le principal intéressé veut provoquer du mouvement au sein de l'administration montréalaise. Il pousse même l'extravagance jusqu'à réclamer que l'on réduise le nombre des élus de la métropole à 30.

Michel Brûlé n'a pas d'expérience en politique municipale et ses positions controversées à propos de la culture anglophone risquent fort de l'isoler. Pourtant, il soulève des questions qui nous taraudent tous. C'est ainsi qu'il avait déjà - à l'époque du lancement de son petit brulot intitulé 65 mesures pour améliorer le Québec - évoqué les dérives de notre parlementarisme perverti. Il fustigeait, entre autre, «la politique de la ligne du parti, une véritable atteinte à la démocratie». L'éditeur allait jusqu'à prôner l'abolition du parlement, une agora où «les députés se comportent comme des enfants dans une cour d'école».

J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec lui, au printemps 2011, à une époque où il ambitionnait déjà de se lancer dans la mêlée municipale. Je réalise, finalement, que ses propos n'ont pas pris une ride avec le temps et j'en profite donc pour lui redonner la parole à nouveau en remaniant cet entretien réalisé à bâtons rompus.

L'incurie municipale

Notre interlocuteur ne décolère pas face à ce qu'il nomme «l'orgie de fonction publique». Il affirme que les lourdeurs de l'administration publiques auraient des conséquences directes sur le marasme économique qui frappe Montréal. Celui qui venait d'acquérir (printemps 2011) une nouvelle résidence sur le Plateau Mont-Royal dit faire les frais d'une bureaucratie qui décourage les citoyens qui veulent rénover leur propriété. En effet, il reproche à l'administration de cet arrondissement d'avoir «enlevé aux fonctionnaires le droit de délivrer des permis de construction, de sorte qu'on évalue quinze projets par mois et que, dans certains cas, on évalue le même projet plusieurs fois».

Sans pour autant s'opposer à la volonté de nos édiles d'améliorer la qualité des aménagements - ou de préserver le patrimoine bâti - Michel Brûlé estime que l'on aurait tout intérêt à simplifier les procédures administratives dans un contexte où la multiplication des mesures tatillonnes peut finir par décourager les particuliers et les commerçants désireux de faire leur part pour améliorer le cadre bâti des anciens faubourgs de la métropole.

Une corruption endémique

L'éthique et la probité sont un peu les marottes de cet apprenti politicien qui est ulcéré devant les fournisseurs qui facturent leurs travaux à des prix exorbitants. Il affirme qu'«il est temps de lancer des messages clairs contre l'abus et le copinage et que des mesures sévères de suivi devraient être mises en place afin d'évaluer la qualité des travaux effectués sur la voirie ou les infrastructures municipales».

Il propose aussi que l'on remette en valeur le travail des fonctionnaires, en leur confiant le déneigement, la collecte des ordures, le recyclage et une part substantielle des travaux de mise à niveau des infrastructures. En fait, au lieu de s'en prendre à la fonction publique municipale, Brûlé souhaite plutôt que l'on réduise le nombre des élus et tout le personnel politique qui gravite autour.

Son verdict est sans appel : «la ville de Montréal, c'est tout sauf une structure au service de la population. Ils passent leur temps à mettre des bâtons dans les roues des gens et, comble de malheur, les élus municipaux disposent de budgets qui leur permettent de graisser la patte d'une nuée de parasites. Essayez d'avoir accès aux livres comptables et vous m'en donnerez des nouvelles», précise-t-il.

Une métropole qui s'anglicise

L'auteur de l'essai, fort controversé, Anglaid, n'est pas tendre à l'égard des élites du West-Island et des autres irréductibles de la langue de Shakespeare. «J'ai étudié à McGill et les francophiles y sont rarissime, tempête-t-il, et lorsque tu tentes de leur (les étudiants de cette institution) adresser la parole en français ils te répondent en anglais. Pour eux, le français représente quelque chose d'accessoire en définitive».

Reprochant à la classe politique montréalaise de céder le terrain aux élites anglo-saxonnes, Brûlé estime qu'il faudra que les francophones partent à la reconquête de cette métropole du Québec qui s'en va à la dérive. Il n'en revient tout simplement pas que le conseiller municipal indépendant Nicolas Montmorency ait été ostracisé par la majorité de ses confrères durant l'été 2009. Ce dernier avait lancé une campagne pour que la rue Amherst change de nom en raison des exactions menées par le Général Amherst contre les Algonquins.

Brûlé fustige aussi des leaders d'opinion qui prennent, eux aussi, fait et cause pour l'anglais. Il n'est pas tendre à l'égard de Gilbert Rozon, grand patron du Festival Juste pour rire, à qui il reproche ses positions en faveur du bilinguisme de Montréal. «Il délire, carrément, n'étant pas conscient de la richesse culturelle de la planète».

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Pierre Karl Péladeau

Qui se présente? Qui ne se présente pas?

Le gros bon sens

Ayant débuté dans le monde des affaires comme vendeur de livres itinérant, l'aspirant maire aime couper les coins ronds. Ce polyglotte globe-trotter voue une admiration sans borne à l'Allemagne, pays qui aurait le mérite de concilier plaisir de vivre avec efficacité. Il souhaite faire appel aux urbanistes et autres concepteurs allemands afin d'améliorer l'aménagement du domaine public s'il est élu. Il n'en revient tout simplement pas que l'on détruise la chaussée des grands artères à chaque fois qu'il faut réparer ou mettre à niveau les infrastructures fluides. «Là-bas, en Allemagne, ils ont conçu des trottoirs sous formes de modules creux qui permettent d'encastrer les canalisations et d'éviter de tout foutre en l'air».

Idem pour les transports en commun et l'affluence automobile. Le polémiste estime que l'on fait fausse route à vouloir mettre l'emphase sur le tramway ou les développements linéaires de type TOD. S'il admet qu'il faudra améliorer la fréquence des métros et des autobus, il croit que l'avenir est aux petits véhicules. Ainsi, on gagnerait à utiliser de petites fourgonnettes afin de remplacer les autobus sur les circuits peu utilisés, une mesure qui ferait des miracles en Moldavie. Par ailleurs, il prône l'instauration d'un service nationale de covoiturage qui ferait en sorte d'aménager des accès prioritaires pour les voitures ayant plus de deux passagers à leur bord.

Un chien dans un jeu de quilles

Montréal devrait être une métropole francophone et ludique pour celui qui incite ses concitoyens à bruler les feux rouges de la pudibonderie anglo-saxonne. «Dans presque tous les pays du monde, on a le droit de boire une bière dans la rue. Mais pas au Québec. Quand les baby-boomers étaient jeunes, c'était toléré, mais, maintenant qu'ils ont vieilli et qu'ils sont au pouvoir, tout ce qu'il leur était permis, ils l'interdisent», souligne-t-il.

Quelques fois on se demande si Michel Brûlé ne serait pas un brillant agitateur qui, tel un chien dans un jeu de quilles, tente de foutre la pagaille. Il fait sans doute figure d'opportuniste , mais ce coloré personnage apportera certainement un souffle de gaieté qui nous aidera à traverser la morosité ambiante. Et, qui plus est, il soulève des questions pertinentes en bout de ligne.

«65 mesures pour améliorer le Québec»; Auteur: Michel Brûlé; Éditeur : Michel Brûlé, 2011; ISBN: 9782894855010 (289485501X)

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