Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Nos sociétés sont-elles prêtes à arrêter les massacres?

Si la question du contrôle des armes mérite d'être posée, c'est avant tout la nécessité de mieux comprendre le rapport entre nos sociétés "hypermodernes" et les armes qui est la clef du problème. D'après, en Allemagne, chaque propriétaire possèderait, en moyenne, quatre armes. Aux Etats-Unis, il n'est pas rare que les propriétaires d'armes en disposent de plus de cinq.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.
Alamy

La tuerie de masse de Newton le 14 décembre 2012 pose, comme à chaque tuerie de masse, la question du contrôle des armes. Comme à chaque tuerie de masse, nous avons le droit aux positions clivées des pro armes et des abolitionnistes qui sont le plus souvent stériles et qui ne parviennent pas à répondre à une question plus fondamentale : nos sociétés modernes ont-elles un problème avec les armes ? Comment se fait-il comme le relève le Small Arms Survey 2011 que 75% des armes en circulation soient détenues par des civils contre 25% par des militaires ? Comment se fait-il que le marché des armes licites aux particuliers aux Etats-Unis ne cesse de croître pour atteindre près de 9 milliards de dollars aujourd'hui, toujours d'après le Small Arms Survey ?

Naturellement, les guerres récentes ont entraîné un surcroît d'armes en circulation qui n'ont pu être détruites profitant alors notamment à la criminalité organisée. Mais cette explication n'est pas l'élément majeur du surcroît d'armes chez les civils. Une étude récente au Québec a démontré qu'entre 2008 et 2012, les différents corps policiers de cette province canadienne ont saisi 33 000 carabines, pistolets, fusils mitrailleurs et révolvers. Or à peine 0.2% ont été saisies dans les milieux criminels. Parmi la plus grande majorité, les armes saisies l'avaient l'ont été légalement, mais sont soit tombées entre de mauvaises mains pas la suite, ou alors leur propriétaire en a fait un usage dangereux. Rappelons que dans le cadre de la tuerie de Newton, Adam Lanza avait volé les armes à sa mère.

En fait, l'augmentation des armes en circulation ne provient pas du crime organisé ou des guerres mais du consumérisme compulsif d'un nombre de plus en plus croissant d'individus qui souhaitent s'armer voire se "sur armer". Aux Etats-Unis, comme dans tous les pays occidentaux, les gens s'arment soit par peur (les individus tolérant de moins en moins les problèmes d'insécurité), soit pour le plaisir : pour le plaisir de tirer (tir sportif), de chasser, pour le plaisir de l'arme elle-même. D'après Die Zeit, en Allemagne, chaque propriétaire possèderait, en moyenne, quatre armes ! Aux Etats-Unis, il n'est pas rare que les propriétaires d'armes en disposent plus de cinq.

Face à cet engouement vis-à-vis des armes, nous sommes, semble-t-il, démunis. En effet, les pays qui décident de mettre en place des contrôles restrictifs sur les armes, peinent à les maintenir de manière efficace, les contrôles devenant avec le temps inopérants. Alors que le Canada était très en avance sur la question de l'enregistrement des armes suite à la tuerie de masse de l'école de Polytechnique en 1989, le gouvernement fédéral a adopté en avril 2012 une loi sur l'abolition et la destruction du registre faute d'être en mesure de gérer la base de données qui devenait pléthorique. Les registres, la réglementation sur les armes, les saisies d'armes sont très certainement utiles pour limiter les massacres (et à ce titre, la constitution d'un groupe de travail piloté par le vice président des Etats-Unis Joe Biden se concentrant en particulier sur la création d'un fichier national des propriétaires d'armes à feu est une bonne chose), mais ces politiques deviendront de plus en plus inefficaces face à la croissance des armes dans les sociétés riches.

Par conséquent, si la question du contrôle des armes mérite d'être posée, c'est avant tout la nécessité de mieux comprendre le rapport entre nos sociétés "hypermodernes" et les armes qui est la clef du problème.

Olivier Hassid, auteur de tueurs de masse, un nouveau type de tueur est né avec Julien Marcel.

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.