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L'ABC de la religion du Canadien de Montréal: les lettres I à L

Ça commence comme un jeu pour les enfants: «Saurez-vous retrouver le poisson dans le logo du Canadien?» Car, il est bien là, caché au cœur de l'image! Pour le faire apparaître, il suffit d'enlever le «C», d'effacer les deux petits carrés et de compléter la ligne intérieure. Il devient alors évident!
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Inspiré par la belle Langue de puck de Benoît Melançon et pour conclure mes recherches sur la religion du Canadien de Montréal, j'ai rédigé mon ABC de la religion du Canadien, dont voici quatre autres lettres.

I comme «I.CH.T.U.S»

Ça commence comme un jeu pour les enfants: «Saurez-vous retrouver le poisson dans le logo du Canadien?» Car, il est bien là, caché au cœur de l'image! Pour le faire apparaître, il suffit d'enlever le «C», d'effacer les deux petits carrés et de compléter la ligne intérieure. Il devient alors évident!

Or, ce poisson est un symbole classique du christianisme, un des premiers symboles chrétiens, celui que l'on retrouve notamment dans les catacombes. Car en grec, poisson se dit «Ichtus», et les lettres qui composent ce mot sont les initiales de cinq mots grecs qui forment une brève confession de foi, que l'on peut traduire en français par: «Jésus Christ Fils de Dieu Sauveur».

Alors, que penser de la présence de ce poisson dans le logo du Canadien? Le Canadien en est-il seulement conscient? Joue-t-il sur cette ambiguïté graphique dans son logo, comme il joue sur le petit visage souriant qu'il révèle, moyennant un quart de tour? S'agit-il d'une déclaration de foi subliminale? La présence du poisson serait-elle l'indice que le Canadien serait, subrepticement, une organisation chrétienne? Le Canadien affirmerait-il, très discrètement pour ne pas choquer un public majoritairement catholique, une foi évangélique? Sur un terrain aussi glissant, on n'osera pas se prononcer, laissant à chacun le risque de se prononcer.

[Entrée inspirée de mon livre Une théologie du Canadien. Bayard: 2011]

J comme «Jesus Price»

Dans les bons soirs, dans les bons soirs seulement, Carey Price, le gardien du Canadien, est désigné par le surnom de Jesus Price (le «e» de Jesus ne porte pas d'accent aigu parce que c'est de l'anglais), essentiellement en vertu d'une assonance avec un certain Christ (pour peu qu'on le prononce à l'anglaise) dont ni Jésus ni Jesus n'était le prénom. Aussi pour ses miracles qui lui permettent parfois de sauver une équipe en perdition («dans les bons soirs», on vous l'avait écrit), parfois aussi pour les soirs où il est crucifié devant son filet, enfin peut-être en reconnaissance de la petite croix qu'il porte fièrement sur l'arrière de son masque (instrument de torture pour l'un, instrument de salut pour l'autre).

Mais peut-on fonder une religion, même la religion du Canadien, sur un mauvais jeu de mots? Et peut-on prendre au sérieux une telle religion? À chacun de décider si Dieu est (aussi) humour. En tous les cas, on connaît au moins un précédent célèbre. L'Évangile selon Matthieu a osé mettre dans la bouche de Jésus (le vrai s'entend) une boutade tout aussi vaseuse. À son disciple Pierre qui venait de comprendre qui était son maître, Jésus aurait répondu: «Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église.» Matthieu 16, 18

Pour Voltaire, que «la puissance papistique» soit «fondée sur un jeu de mots» démontrait l'ineptie du christianisme et la bêtise des chrétiens. Jugera-t-on de la même façon que le fait que la puissance habstique soit elle aussi fondée sur un jeu de mots démontre l'ineptie de la religion du Canadien et la bêtise des partisans? Faut-il porter au crédit ou au discrédit de la religion du Canadien son humour?

K comme... «Koivu, Kovalev, Komisarek, Kostytsyn»

Peut-on vraiment croire que Dieu existe, quand on se trouve à devoir chercher des mots en «K» pour poursuivre son abécédaire de la religion du Canadien? Oui, car Dieu, dans son infinie Providence, a créé la Finlande et la Russie et qu'il y a placé le goût du hockey, donnant ainsi au Canadien une belle liste de joueurs dont le nom commence par «K».

On pourra toujours objecter que ces joueurs sont précisément des joueurs de hockey, des joueurs qui ont joué pour le K-nadien, mais qu'ils n'ont rien à voir avec une quelconque religion du Canadien.

Sauf que!

  • Sauf que dans toutes les religions, on compte des héros et des héroïnes, des saintes et des saints, des martyrs, des patriarches et des matriarches, des grandes figures que l'on connaît plus et mieux.
  • Sauf que dans toutes les religions, on compte aussi, surtout des «petits destins presque anonymes» comme le chantait Serge Reggiani, d'innombrables croyantes et d'innombrables croyants dont l'Histoire peine à retenir les noms.
  • Sauf que, en bonne théologie (c'est-à-dire en théologie protestante), il n'y a pas plusieurs classes de croyant(e)s. Devant Dieu, tous les êtres humains sont égaux et dans l'Église, le sacerdoce est universel.

Et c'est ainsi que tous les «K» du Canadien, des «K» plombiers ou employés de soutien (comme on les nomme un peu cruellement) jusqu'aux «K» les plus célèbres (on pense immédiatement à Kovalev-l'Artiste, à Koivu-Capitaine Courage), tous ont leur place dans le panthéon du Canadien.

L comme «La Mecque»

Dans une religion du Canadien très largement inspirée de la religion chrétienne et plus particulièrement de sa version catholique, on trouve au moins une métaphore religieuse qui est directement empruntée à une autre religion, à l'islam en l'occurrence.

Car quand il s'agit de hockey, Montréal n'est jamais au grand jamais comparé ni à Byzance, ni à Rome, jadis fières capitales des empires chrétiens d'Orient et d'Occident, ni à Jérusalem, la ville où un certain Jésus a été exécuté. Non, quand il s'agit de hockey, Montréal était, est et restera, hier, aujourd'hui et pour les siècles des siècles, la Mecque du hockey.

Mais pourquoi cet emprunt à l'islam? On imagine que c'est en raison d'une certaine ressemblance et d'un possible triple souhait.

  • Une certaine similitude: comme la Mecque a vu naître le Prophète, comme la Mecque a vu le Coran lui être dicté par Gabriel, Montréal a vu naître le hockey et Montréal a vu ses règles fixées dans The Gazette.
  • Un possible triple souhait: que l'on décrète Montréal ville sainte et qu'on la réserve aux seuls partisans du Canadien, puisque la Mecque est réservée aux seuls musulmans; que l'on exige des amateurs de hockey qu'ils placent leur écran plat en direction de Montréal, puisque les musulmans prient en se tournant vers la Mecque; que l'on rende obligatoire le pèlerinage annuel à Montréal obligatoire, puisque tout musulman doit au moins une fois dans sa vie effectuer le hajj vers la Mecque.

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