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Féministes: «Pour la toute première fois, nous commençons à nous reconnaître dans la FFQ»

Les déclarations anti-travailleuses du sexe, transphobes et islamophobes que nous avons vues sont déshumanisantes.
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En tant que féministes, nous adhérons à 100% au slogan de la FFQ: «Égalité pour toutes, égalité entre toutes» et nous invitons toutes les membres de la FFQ qui ne sont pas à l'aise avec les dernières propositions à s’interroger sur les motivations qui se cachent derrière ces réserves.
Maskot via Getty Images
En tant que féministes, nous adhérons à 100% au slogan de la FFQ: «Égalité pour toutes, égalité entre toutes» et nous invitons toutes les membres de la FFQ qui ne sont pas à l'aise avec les dernières propositions à s’interroger sur les motivations qui se cachent derrière ces réserves.

Depuis l'Assemblée générale extraordinaire de la Fédération des femmes du Québec (FFQ) du 28 octobre dernier, de nombreux articles et chroniques dans les médias ont tenté de convaincre le grand public que les féministes ne se reconnaissaient plus dans la FFQ, que celle-ci s'était égarée et que ses dernières positions étaient en contradiction avec les principes mêmes du féminisme.

Le principal argument avancé par ces détracteurs est que la FFQ a finalement reconnu l'agentivité, c'est-à-dire la capacité d'agir, des travailleuses du sexe et que nous pouvions leur faire confiance, comme toutes les femmes, pour prendre les meilleures décisions pour elles-mêmes. Le deuxième argument concerne la proposition de solidarité avec les femmes musulmanes, qui soutient leur droit de choisir de porter ce qu'elles veulent. Finalement, on a relevé le fait que la présidente de la Fédération, Gabrielle Bouchard, est une femme trans.

Pour nous ces changements vont dans la bonne direction. Pour la toute première fois, nous commençons à nous reconnaître dans la FFQ.

En tant que féministes, nous ne comprenons absolument pas comment ces points pourraient être néfastes. Pour nous, au contraire, ces changements vont dans la bonne direction. Pour la toute première fois, nous commençons à nous reconnaître dans la FFQ.

Clarifions ici certaines choses. L'histoire du féminisme n'est pas sans tache. Certes, les luttes féministes ont permis à certains groupes de femmes de réaliser de nombreux progrès, mais le mouvement n'a pas encore fait ses preuves pour ce qui est de s'assurer que toutes les femmes bénéficient de ces avancées. À de nombreuses reprises, les femmes racisées et/ou femmes trans et/ou travailleuses du sexe (ainsi que toutes les femmes qui ne se gênent pas pour exprimer leur sexualité) ont été humiliées et exclues par le mouvement. Pour nous, c'est complètement inacceptable.

En tant que féministes, nous adhérons à 100% au slogan de la FFQ: «Égalité pour toutes, égalité entre toutes» et nous invitons toutes les membres de la FFQ qui ne sont pas à l'aise avec les dernières propositions — positions ou inclusion de toutes les femmes à la FFQ — à s'interroger sur les motivations qui se cachent derrière ces réserves. Comme féministes, nous nous devons d'examiner en permanence nos analyses et nos pratiques afin de nous assurer que nous nous battons véritablement pour notre libération collective.

Par ailleurs, nous sommes préoccupées par le fait qu'au cours des dernières semaines, nous avons vu de nombreux articles circuler, qui ont donné une définition inexacte du concept de l'intersectionnalité. Nous l'avons vu qualifié d'individualisme, ce qui, en fait, ne pourrait pas être plus éloigné de la vérité. S'il s'agit d'un terme nouveau pour vous, laissez-nous dissiper toute confusion.

L'intersectionnalité est un terme qui reconnaît la relation entre les multiples identités que portent les femmes, et les différentes oppressions auxquelles elles font face quotidiennement.

L'intersectionnalité est un concept mis de l'avant par la professeure afro-américaine Kimberlé Crenshaw, qui a créé ce terme afin de reconnaître la relation entre les multiples identités que portent les femmes, et les différentes oppressions auxquelles elles font face quotidiennement. En aucun cas, une approche intersectionnelle ne sape notre lutte collective pour la justice et l'égalité.

Nous voulons également que ce soit parfaitement clair: les femmes trans, les femmes autochtones, les femmes racisées, les femmes musulmanes, les travailleuses du sexe... font entièrement partie de notre mouvement. De plus, nous assurer que toutes les femmes soient incluses et que leurs expériences soient valorisées, respectées et prises en compte dans nos revendications collectives n'exclut aucunement celles qui parmi nous ne partagent pas ces identités.

Nous souhaitons réitérer notre soutien à la nouvelle position adoptée à la FFQ en faveur des travailleuses du sexe.

Les déclarations anti-travailleuses du sexe, transphobes et islamophobes que nous avons vues sont déshumanisantes. Il est pour nous primordial de reconnaître que la déshumanisation est une étape préliminaire à la violence physique et qu'elle a de graves conséquences, telles que la tuerie à la mosquée de Québec, les meurtres et les disparitions des filles, femmes et personnes bispirituelles autochtones, ainsi que la violence faite aux travailleuses du sexe et aux femmes trans. Et bien que nous pensions que cela devrait être absolument évident, il semble nécessaire de répéter que tout discours ou toute action encourageant la violence à l'égard des femmes n'est pas féministe.

En terminant, nous souhaitons réitérer notre soutien à la nouvelle position adoptée à la FFQ en faveur des travailleuses du sexe. Plus que jamais, nous devons nous unir afin de lutter de façon efficace contre le patriarcat et nous questionner sur ce qui nous divise. Il est temps de réfléchir autrement afin d'adopter d'autres pratiques et stratégies qui incluent toutes les femmes dans le mouvement.

La position de la Fédération tant décriée dans les médias promeut en réalité la reconnaissance des droits de toutes les femmes dans les décisions qu'elles prennent dans leur vie. Elle assure que toutes soient entendues et soutenues. Nous déplorons que les positions antagonistes au sujet du travail du sexe invisibilisent et stigmatisent un trop grand nombre de femmes.

Nous désirons enfin saluer le courage et le leadership de Gabrielle Bouchard dans son rôle de présidente.

Il est évident qu'il reste encore beaucoup de travail à faire, mais nous sommes prêtes. Nous attendons avec impatience l'AGA du printemps, lors de laquelle nous espérons que les membres seront enfin prêtes à exprimer leur solidarité avec les femmes musulmanes, les femmes autochtones et toutes les femmes qui sont souvent laissées de côté par le féminisme paternaliste.

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