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Des écoles publiques optimales pour soutenir l'interculturalisme, l'égalité des chances et l'économie

Les études rapportent que le rendement scolaire de jeunes de milieux défavorisés serait meilleur s'ils fréquentaient des classes avec des pairs issus d'un milieu plus favorisé.
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Ces dernières années, le Québec a vu croître son réseau privé d'éducation. Celui-ci procure une large part des services éducatifs dans la province. Plusieurs ignorent que c'est chez nous qu'on retrouve le plus vaste réseau scolaire privé per capita en Amérique du Nord.

Paradoxalement, le Québec n'est pas l'un des États les plus riches de son continent. N'y a-t-il pas ici une étrange dichotomie?

L'éducation est demeurée longtemps un service privé ou de nature confessionnelle dans notre belle province. Ce n'est qu'en 1950 que Jean-Paul Desbiens, alias Frère Untel, a osé remettre en question le système scolaire. Ce dernier s'était maintenu sans grand bouleversement pendant 300 ans.

Il a fallu attendre encore 10 ans pour que des leadeurs politiques décident de créer un ministère d'éducation provinciale. C'est à partir de ce moment, en 1960, que l'éducation s'est démocratisée. Ainsi, l'héritage du secteur privé en éducation est nettement plus enraciné chez nous que celui du secteur public.

Donc, on pourrait croire que la place de l'éducation privée au Québec s'inscrit dans les traditions et que cela est juste. D'ailleurs, certaines écoles privées ont le mérite de procurer à des jeunes de toute classe socioéconomique et origine des services spécialisés que le réseau public peine à offrir aux jeunes qui sont aux prises avec des difficultés graves d'apprentissage.

Toutefois, que faut-il en penser quand un tel réseau grandit en voyant aussi s'ouvrir des écoles qui se soustraient des programmes ministériels pour des motifs culturels ou religieux? Dans de telles situations, ces institutions peuvent engendrer une ghettoïsation et nuire aux idéaux interculturels du Québec.

Toute société, même pluriethnique, a besoin de repères sociaux communs. Elle a tout avantage à entretenir des institutions capables d'accueillir tous ses citoyens pour qu'ils apprennent à grandir et à vivre ensemble. Le Québec a besoin d'écoles publiques optimales!

De plus, que dire des écoles réputées qui vendent à fort prix leurs places aux familles en récoltant du même coup des allocations publiques? Celles-ci forment des microsociétés qui tendent à s'homogénéiser selon leur statut économique et à s'isoler de la classe moyenne et, bien entendu, des autres : les pauvres.

Plusieurs parents y inscrivent leurs enfants. Ceux-ci croient en des rumeurs selon lesquelles la cohabitation de leur progéniture avec des pairs provenant de milieux défavorisés nuirait à leurs apprentissages. Or, cela se produira tant qu'il y aura une hétérogénéité disproportionnelle.

C'est ainsi que cette croyance perdure, malgré des travaux scientifiques qui démontrent qu'une mixité sociale proportionnelle dans les classes est bénéfique pour réduire les écarts, sans risquer de ralentir les plus doués.

Des recherches ont démontré qu'il existait un «effet-classe» selon lequel la composition sociale d'un groupe d'élèves influence le climat d'apprentissage et le rendement scolaire.

D'une part, dans des classes homogènes, on peut observer des différences dans le rendement scolaire entre les classes qui regroupent des élèves favorisés et les autres. D'autre part, dans les classes hétérogènes, les élèves issus de milieux favorisés ne voient pas leur rendement scolaire diminuer, contrairement à ce que plusieurs veulent croire. Cependant, la présence des élèves issus de milieux favorisés profite à tous dans des groupes hétérogènes. Ainsi, les études rapportent que le rendement scolaire de jeunes provenant de milieux défavorisés serait meilleur s'ils fréquentaient des classes avec des pairs issus d'un milieu socioéconomique plus favorisé.

Donc, nous devons reconnaître qu'il est possible de réduire les écarts du rendement scolaire des jeunes provenant de milieux défavorisés et d'améliorer la qualité de leurs apprentissages. Il suffit de préconiser l'hétérogénéité dans les classes à l'école. Or en finançant les écoles privées avec des fonds publics, nous faisons tout à fait le contraire! Tout cela mériterait donc que nous nous questionnions au sujet de la place du secteur privé en éducation au Québec.

Si nous favorisions la mixité sociale en classe, cela améliorerait le rendement scolaire d'un grand nombre d'élèves. En agissant ainsi, on s'engagerait collectivement à favoriser la persévérance scolaire.

Quand on tient compte que les décrocheurs sont plus susceptibles de nécessiter des soins de santé et des services sociaux, pouvez-vous imaginer les sommes que nous serions susceptibles d'épargner à long terme?

De plus, n'oublions pas qu'une personne qualifiée et scolarisée contribue bien plus à l'économie d'une société. Alors, qu'adviendrait-il de notre économie si nous parvenions à dûment qualifier un plus grand nombre de jeunes pour occuper des emplois spécialisés?

Enfin, le Québec aurait avantage à se donner les moyens de ses ambitions. À mon avis, la relance de l'économie québécoise ne relève pas d'une formule magique ni d'un «investisseur-sauveur». Elle peut être lente et progressive, mais solide à la fois. Pour ce faire, nous devons réintroduire une réelle égalité des chances pour tous les jeunes et actualiser notre réseau scolaire.

Dans la lutte au décrochage scolaire, puis face à l'inéluctable nécessité d'apprendre à vivre ensemble, qu'attendons-nous pour réinvestir dans un réseau scolaire public et le revamper avec une attention proportionnelle à celle que chaque parent accorde à un enfant?

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