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J'avoue avoir été choquée au début des. Choquée par la crudité du propos, par la façon dont ces femmes sur la scène exposent leurs secrets les plus intimes, sans fard, sans peur et sans reproche. Et puis, au fur et à mesure, je me suis prise au jeu car, musulmane ou pas, une femme est une femme, les préoccupations sont universelles même si le bagage culturel est différent.
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J'avoue avoir été choquée au début des Monologues voilés. Choquée par la crudité du propos, par la façon dont ces femmes sur la scène exposent leurs secrets les plus intimes, sans fard, sans peur et sans reproche. Et puis, au fur et à mesure, je me suis prise au jeu car, musulmane ou pas, une femme est une femme, les préoccupations sont universelles même si le bagage culturel est différent.

Adelheid Roosen, femme de théâtre néerlandaise, a interviewé 74 femmes musulmanes issues de divers pays. Elles lui ont parlé de la sexualité, de la jouissance, de l'orgasme, de l'excision et du viol, de leurs rapports avec les hommes. Mais surtout d'elles-mêmes. Vierges, lesbiennes, mères de famille, heureuses dans leur couple ou aux prises avec des vies insoutenables, elles ont toutes contribué à tracer ce portrait qui va au-delà des préjugés et des idées préconçues. Si ce qui en ressort a sûrement été thérapeutique pour elles, il en va de même pour le spectateur. J'ai davantage appris au cours de cette soirée sur la culture musulmane vue à travers le regard féminin que dans tous les essais ou romans que j'ai pu lire et qui s'attardent trop souvent à l'aspect misérabiliste de la condition des femmes.

Les comédiennes, belges d'origine musulmane, sont toutes formidables. Elles déploient une énergie et un plaisir communicatifs dans les épisodes festifs ou humoristiques et une intensité savamment mesurée au cours des moments plus tristes ou dramatiques. Elles expriment avec justesse des existences placées sous le signe du chaos, souvent, de la résilience, forcément. Des existences faites de compromissions et qui ne sont pas exemptes du mensonge ou de la violence. Mais il y a aussi des moments très rigolos, entre autres le monologue sur l'hymen où on souligne que d'Istanbul à Damas, l'hymen est plus important que le tympan, car si le premier déchire les résultats auront des conséquences autrement plus dramatiques que pour le deuxième. Il y a aussi cette mère, manifestement comblée physiquement par son mari, qui dit à sa fille le matin que son père et elle ont passé leur nuit à réinventer l'amour. Tout cela est jouissif, plein de vitalité et d'ardeur et nous permet de jeter un regard différent sur une culture trop mal connue où, oui, le voile et ce qu'il symbolise nous obnubile trop souvent. C'est un spectacle riche en images, en sensations et en émotions mais où le pathos est tenu en laisse.

Le seul petit bémol c'est que les comédiennes parlent parfois très vite et que la qualité du son à la Cinquième salle de la Place des arts m'est apparue moins bonne que d' habitude, ce qui fait que de temps à autres des bribes des monologues nous échappent.

Mais le plus important c'est que Les monologues voilés m'ont fait comprendre que le poids de la tradition et des rituels est bien lourd et qu'on ne s'en débarrasse pas en criant lapin. Et que celles qui sont issues de cette culture parfois opprimante commencent doucement à bousculer les idées reçues et à prendre la place qui leur revient, tout doucement. J'ai compris aussi que ce combat fait remonter à la surface d'immenses contradictions et qu'on ne peut pas impunément les jeter par-dessus bord sans renier une partie de soi-même.

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